Pratiques participatives
Le concept moderne de démocratie participative agite plus que jamais le débat politique et citoyen. La rencontre de l’insuffisance de la démocratie représentative et de la démocratisation des technologies du numérique invite à repenser profondément les moyens de participation de tous à l’intérêt général, l’accroissement du pouvoir d’agir – l’empowerment –, l’autonomisation et l’engagement de chacun au collectif, la formation d’un contre-pouvoir nécessaire à la société démocratique. Il s’agit de redonner au citoyen un rôle et un pouvoir d’acteur de la vie publique en faisant « tomber les murs ». Selon John Dewey, cette nécessité s’appuie sur une « citoyenneté active et informée » et sur la « formation d’un public actif, capable de déployer une capacité d’enquête et de rechercher lui-même une solution adaptée à ses problèmes »*. En ce sens, la participation citoyenne est notamment intrinsèquement liée à l’accès à l’information, et à la capacité d’en exercer une lecture critique (cf. dossier spécial sur la pensée critique in InterCDI n°268-69). Et nous touchons là du doigt le rôle, essentiel, du professeur documentaliste, et la résonance évidente de ces questions au cœur de ses pratiques ! Il n’y a d’ailleurs qu’à relire à cette lumière la circulaire de missions 2017, qui replace le professeur documentaliste au cœur de « l’équipe pédagogique » dont il partage les « missions communes » et anime les « co-enseignements ». Ses missions spécifiques en font par ailleurs un « acteur de l’ouverture de l’établissement sur son environnement éducatif, culturel et professionnel (…) en lien avec les dispositifs pédagogiques et éducatifs mis en place dans l’établissement, dans et hors du CDI ». Le professeur documentaliste se trouve ainsi posé en véritable maître d’œuvre d’une « pédagogie favorisant l’autonomie, l’initiative et le travail collaboratif des élèves, autant que la personnalisation des apprentissages, l’interdisciplinarité et l’usage des technologies de l’information et de la communication » dont le but est de « rendre l’élève acteur de ses apprentissages ». Et il s’agit bien là, à l’échelle de l’École, de la formation du futur citoyen au collectif, à une participation et une action démocratique éclairées. Il nous semble donc intéressant d’aller explorer et de nous interroger sur les pratiques participatives des lieux de formation et d’information, notamment vos CDI, qui recèlent souvent des trésors de créativité !
En effet, dans une dynamique collaborative, la posture de l’enseignant comme unique interface du savoir est abolie, et le CDI, lieu particulier au sein de l’établissement, espace tout à la fois d’enseignement, de culture, de documentation, d’information, d’ouverture, semble tout indiqué pour accueillir et nourrir la mise en oeuvre d’une pédagogie coopérative.
Les dernières années ont vu fleurir de nombreuses publications de fond et de méthode exposant et préconisant les approches participatives et collaboratives notamment dans le champ de la construction des savoirs et des compétences. À un tel point qu’une approche sociale des intelligences collectives et participatives est devenue prioritaire chez les acteurs de l’école, des apprentissages, plus largement de la formation. Mais dans quelle mesure ces approches ne sont-elles pas porteuses d’idéologies et d’utopies, voire d’idéaux partiellement en phase avec la réalité de l’organisation actuelle des apprentissages et des savoirs ? Comment en tant que professeurs documentalistes mettre en œuvre des pratiques participatives en information-documentation sans succomber aux sirènes de ladite innovation pédagogique, parfois complices d’une approche non critique de l’information ?
L’éducation est participative, ou elle n’est pas, serait-on tenté d’énoncer d’emblée. Toutefois, loin d’être évidente et loin d’être appliquée dans les faits sur le terrain que constitue l’école, cette affirmation appelle des justifications ; les unes, a contrario, qui distinguent l’éducation d’autres modes d’enseignement à l’école, les autres qui permettent de situer le processus éducatif dans la participation, d’autres encore qui élucident le sens même de « participer1 ».
Un CDI de collège, c’est un peu l’école démocratique pour tous
Les écoles démocratiques, qui proposent le modèle d’une pédagogie alternative libre, sans cours ou programme préconçus, sont très médiatiques et attirent les familles....
Faire participer les lycéens, les amener à être des citoyens actifs au sein de l’établissement et de ses institutions est un défi dans le lycée où j’enseigne. Quand je suis arrivée, il y a presque dix ans, la MDL avait été fermée,...
Les pratiques participatives et collaboratives sont au cœur des TraAM Documentation, que l’on examine la méthode de travail des professeurs documentalistes qui y sont impliqués ou les objets d’étude mobilisés dans nombre de projets. Laureline Lemoine, professeure documentaliste au collège de Baccarat et référente du groupe TraAM Documentation de l’Académie de Nancy-Metz nous explique le fonctionnement de ces dispositifs, leurs avantages et leurs inconvénients, ainsi que les sujets et expérimentations menées au sein de son académie ces dernières années, qui font des pratiques participatives et collaboratives dans les établissements un objet d’étude.
Quelles que soient les situations dans lesquelles le professeur documentaliste est amené à exercer ses missions – accueil des élèves en autonomie, projet interdisciplinaire, enseignement de l’EMI – des opportunités existent pour développer le partage des savoirs. La philosophie des Communs de la connaissance me tient à coeur1. Cela ne m’intéresse pas de faire un cours pour expliquer ce que c’est. Je tends à ce que les élèves, la communauté éducative et moi-même, nous construisions ensemble des connaissances à partager sous diverses formes
« C’est en forgeant qu’on devient forgeron » dit l’adage ; « c’est en lisant qu’on devient liseron » ajouterait Raymond Queneau. Ces maximes s’appliquent aussi à la relation que l’on crée avec certains lieux et, dans le cas qui nous intéresse, que les élèves et que les collègues créent avec le CDI.
Pour agir sur un climat scolaire qui devenait délétère, le collège Lucie Aubrac de Tourcoing a choisi de miser sur le développement d’une culture de la participation. Le CDI participe pleinement à cette dynamique, notamment par la mise en place de Juniors Associations1 qui gèrent des espaces et portent des projets.
Cet ouvrage collectif rassemble des contributions sur des projets participatifs menés dans différentes bibliothèques (médiathèque municipale, bibliothèque de quartier, bibliothèque universitaire, BNF…) mais aussi dans des centres culturels...