Une Classe Médias au collège, un levier pour travailler l’oral

En effet, conscientes de l’importance sociétale accordée aux médias, il nous a semblé nécessaire de les faire découvrir aux élèves, sous leurs différentes facettes. Partant de ce que les programmes de l’Éducation nationale proposent, nous voulions aller au-delà des préconisations et pousser les élèves dans une démarche réflexive autour de la notion de « médias ». Nous voulions inscrire notre projet dans un parcours lissé et l’incorporer à toutes les disciplines. Les élèves auraient alors à travailler, tout au long de l’année, autour de la thématique des médias. Il s’agirait pour eux de comprendre leur diversité, leurs rôles et l’importance qu’ils ont dans la société actuelle.

Mise en œuvre du projet

Une des premières étapes a été de faire un état des lieux du matériel nécessaire pour mener à bien notre projet. L’atelier WebTV avait déjà acquis une base qui pouvait nous permettre de travailler sur une plus grande échelle. En effet, nous disposions d’un fond vert, d’un appareil photo permettant de filmer, d’un micro et d’une perche, d’un ordinateur portable, et d’un enregistreur MP3.
La seconde étape consistait à repenser l’espace du Centre de Connaissances et de Culture (3C) pour pouvoir « dégager » un espace Média qui permettrait la mise en place d’un studio télé. Le 3C est doté de 3 petites pièces attenantes, anciennement deux réserves et un local plus technique. Depuis plusieurs années à présent, ces trois pièces ne sont plus utilisées dans leur but premier, puisque nous étions engagés dans une réflexion sur la gestion des espaces en créant des tiers lieux, des espaces de travail partagé, favorisant l’échange et la sociabilité. Ainsi, une réserve avait déjà été « transformée » en petite salle permettant de travailler les disciplines scientifiques de manière plus personnalisée, une autre en bureau pour l’assistant TICE et la professeure documentaliste. Le petit local technique a, lui, été repensé en studio télé et en salle de montage. Il sera totalement équipé à la rentrée de septembre 20201.
Enfin, la dernière étape de notre projet consistait à convaincre. Lors d’un conseil pédagogique, nous avons exposé notre projet à nos collègues et à la direction. Tous étaient convaincus que dans le monde actuel, face à des élèves en difficultés scolaires et/ou sociales, un tel projet avait du sens. Nous avons donc réussi à constituer une équipe pédagogique pour une classe. Le niveau 4e nous a semblé le plus pertinent, compte tenu de l’âge des élèves, mais aussi des programmes disciplinaires. Pour constituer cette classe, nous nous sommes rendues dans chaque classe de 5e en fin d’année scolaire pour expliquer notre projet. Les élèves intéressés devaient nous faire parvenir une petite lettre de motivation. C’est ainsi que la classe est née.

Dès la rentrée de septembre, l’ensemble de l’équipe de la 4e 3 avait intégré dans sa progression disciplinaire une dimension « média ». Ainsi, en français, les élèves ont été invités à produire un journal papier sur leur ville avec la notion de vraies ou fausses informations. En anglais, les élèves ont travaillé sur la création de tutos YouTube sur l’alimentation. Ce fut leur première expérience devant la caméra avec insertion d’images à l’aide du fond vert. En anglais encore, ils ont réalisé de petits reportages vidéo sur l’importance de la maîtrise orale de la langue dans le monde aujourd’hui. En histoire-géographie, ils ont travaillé sur l’évolution de la presse écrite et des médias. En technologie, ils ont découvert le montage vidéo et sont allés à la rencontre de professionnels afin de participer au concours Je filme le métier qui me plaît. En éducation musicale, ils ont créé leur jingle pour le futur journal télévisé. En arts plastiques, ils ont développé leur logo. Enfin, en vie de classe, la professeure de français et la professeure documentaliste ont travaillé tout au long de l’année sur les médias en général, et les étapes de la création de reportages vidéo…
Notre volonté, au-delà de faire découvrir les médias, a été de travailler l’oral sous différentes formes (oral spontané, écrit oralisé, interview, témoignage, expression créative…), et, à chaque fois, de manière collaborative. Si cette dimension est pleinement intégrée dans la progression de chaque discipline, l’alignement d’une heure de français et d’une heure de vie de classe a permis de disposer de deux heures consécutives, ce qui a facilité le travail de montage, mais aussi les sorties à l’extérieur du collège. Les élèves qui le souhaitaient (et ils étaient assez nombreux) pouvaient venir en plus en autonomie au 3C pour avancer sur leurs projets, en fonction de leur emploi du temps. Nous avons eu également la chance d’avoir un journaliste comme « parrain » de la classe. En effet, Noham Huclin, journaliste sur la chaîne régionale des Hauts-de-France Wéo2 a rencontré régulièrement les élèves (environ une fois par mois), afin de leur faire découvrir le métier de journaliste et leur a permis, à cet effet, de se rendre sur un plateau de télévision. Une journaliste de La Voix du Nord est aussi intervenue auprès de la Classe Médias. Les élèves ont ainsi eu la possibilité de découvrir différentes facettes du métier de journaliste (TV et presse écrite). Nous voulions que les élèves puissent découvrir également les coulisses des médias et ne pas rester uniquement sur la pratique du reportage vidéo.

Plateau de la chaîne Wéo, la découverte d’un studio télé, novembre 2019

 

Autonomie, responsabilisation et confiance en soi de l’élève

Les élèves ont ainsi travaillé durant cette année sur différents supports, devenant acteurs de leur propre progression. Les professeurs des différentes disciplines et la professeure documentaliste ont pu les accompagner dans les différentes étapes de leur travail. Ils les ont accompagnés dans leurs recherches, les ont poussés à travailler leur jugement par rapport au monde qui les entoure.
Les élèves ont eu à réfléchir sur la véracité de ce que l’on voit, de ce que l’on lit et ainsi ils ont pu apprendre à déceler, à discerner et à se créer un jugement qui leur est propre.
Ce projet s’est avéré bénéfique pour bon nombre d’élèves. Des élèves qui ont coutume d’être en retrait, plus timides lors de la prise de parole en classe, ont pu s’engager dans un travail collectif et ainsi trouver leur place au sein du groupe. Les élèves ont également appris à se responsabiliser. Ainsi, du fait de la mise en œuvre d’un travail « factuel » (création du journal avec un certain nombre d’articles, répartition en groupe, mais aussi création d’un montage vidéo), l’élève qui ne s’est pas investi totalement, n’a pas eu de « rendu » à présenter et a donc dû assumer son manque d’investissement. Ce n’est pas le cas lors d’évaluations sommatives où il est toujours possible de « broder » et de rendre un travail superficiel. Dans le cas des projets médias, cela n’est pas possible. A contrario, les élèves d’un niveau faible mais investis, qui, malgré leur sérieux, n’arrivent pas à obtenir de résultats probants lors d’évaluations sommatives, ont pu, dans le cadre de ces projets, grâce à leur investissement et à la cohésion d’un groupe, obtenir des résultats très satisfaisants et fournir un travail de qualité.
Le projet média, c’est avant tout un projet humain, un projet de classe, une multitude d’échanges entre adultes enseignants et élèves. En effet, certains élèves connaissent parfois davantage les réseaux que le corps enseignant ; ils ont pu, à l’inverse des cours traditionnels, transmettre leur savoir de manière plus prononcée. Cet échange est aussi un échange d’élèves à élèves où chacun a pu mettre à profit son expérience personnelle dans cette cohésion de groupe que requiert la Classe Médias. Il y a eu synergie et le travail fourni s’est avéré productif sur le plan pédagogique et humain.
C’est un projet porteur où l’individualité propre à chacun crée une émulation autour d’un projet collectif. Les élèves prennent davantage confiance en eux et voient un réel intérêt à leur investissement personnel dans le travail demandé, car le rendu leur semble plus factuel, ils se considèrent comme un maillon concret de la chaîne « classe ».
Sur une année, la découverte des champs possibles des médias n’a pu être exhaustive ; cependant, les élèves ont été sensibilisés, acteurs de leurs propres travaux, investis dans une démarche collaborative. Ils ont pu découvrir l’enseignement d’une manière différente et s’inscrire dans un processus de cheminement de la pensée, se forger un esprit critique et rationnel.
Cette volonté de mettre à profit ce projet dans une perspective de groupe, de collaboration entre tiers a été un pari dont nous sommes fières, car au fil des mois, on a pu s’apercevoir que la classe devenait une unité de plus en plus établie. Bien que certains aient été plus motivés ou plus investis que d’autres, personne n’a été mis de côté ou moqué. Chacun a trouvé sa place. Cette unité est le fondement de la réussite d’un tel projet. C’est la raison pour laquelle nous sommes désireuses de poursuivre l’aventure une seconde année, afin que cette unité, installée, puisse permettre aux élèves de se dépasser. L’individualité de chacun, l’autonomie des élèves sont bien évidemment maintenues et constituent en elles-mêmes le vecteur de la cohésion de groupe, un gage de réussite et d’épanouissement.

Régie technique, novembre 2019

 

Classe Médias, levier d’oralité

Le programme dans les différentes disciplines repose dans la Classe Médias, tout comme dans toutes les autres classes, sur le socle commun des connaissances.
Nous nous sommes essentiellement appuyées sur trois domaines de compétences :
– Domaine 1 : Des langages pour penser et communiquer :
Compétence 1.1 Être auteur ; Compétence 1.2 Argumenter ;
– Domaine 2 : Des méthodes et outils pour apprendre : comprendre et s’approprier les espaces informationnels et les outils de recherche ;
– Domaine 3 : La formation de la personne et du citoyen : apprendre à partager les informations de façon responsable.

Cependant, le parcours pédagogique travaillé par les professeurs met l’accent sur les compétences numériques et l’aptitude à retranscrire des élèves. Ainsi, l’accent mis sur l’oralité et l’écrit est-il intrinsèque à la réussite de l’élève de Classe Médias. Pourquoi ? Parce que les projets mis en place dans les différentes disciplines amènent l’élève à interpréter, reformuler les informations recherchées pour aboutir au travail final. L’élève, en tant qu’apprenti journaliste, devient maître d’œuvre de son travail et de sa capacité à le partager. Ce partage peut se faire via l’écrit, comme lors de la création d’un journal (presse écrite), ou lors des interviews métiers, ou encore par l’intermédiaire du tuto YouTube en anglais. L’élève doit alors prendre en compte le format média sur lequel repose son travail et apprendre à s’adapter aux destinataires (par exemple, apprendre à interagir avec l’interviewé, être à son écoute, être attentif à ses silences et à sa parole ; ou parler à la caméra, et en même temps manipuler des accessoires et rester attentif à la parole du co-intervenant3).

Oser s’exprimer… en partant d’un outil que les élèves affectionnent, telle la vidéo, a permis de lever certaines barrières quant à la prise de parole.
Nous avons en tête une élève, particulièrement timide mais avec une maturité et un esprit très vif. La Classe Médias a été pour elle un déclencheur. Elle, qui n’osait jamais prendre la parole, elle qui baissait les yeux à chaque fois qu’on lui demandait de donner son avis, comme si elle s’excusait d’être là, est aujourd’hui, à la fin de son année de 4e, une élève moteur, qui a été élue rédactrice en cheffe lors de l’écriture de notre journal papier.
Pour les élèves « fragiles », la Classe Médias représente une ouverture sur le monde extérieur, une culture méconnue, un levier pour leur ambition.
À cet effet, l’oralité, au-delà même des projets finaux à réaliser, est inhérente au parcours de l’élève. L’élève, acteur de ses recherches, doit réussir à exposer aux professeurs et aux membres de son groupe l’importance de l’information retenue. Il doit pouvoir mettre en lumière par la langue, les enjeux qu’il perçoit dans l’information lue ou entendue. Il devient ainsi le maillon décisionnaire des choix opérés grâce à sa capacité à retranscrire. Sa capacité à communiquer, à se justifier atteint son paroxysme en Classe Médias car la parole permet à l’élève de se réaliser.

Oser s’exprimer aussi, lorsque l’élève est un élève à besoin spécifique. Dans cette classe de 4e, deux élèves ULIS sont intégrés dans différentes disciplines. Il nous a semblé important que ces deux élèves soient inclus dans le projet Médias. Pour eux aussi, cette expérience a été d’une grande richesse, ils ont osé questionner les journalistes rencontrés, osé prendre place dans des projets communs, trouvant ainsi une place importante dans le groupe classe. Ils n’ont certes pas pu participer à toutes les actions, mais ils ont pu être présents sur les temps forts du projet.

Ainsi, cette expérience de Classe Médias se révèle positive à tous les égards. Les enseignants, les élèves, le journaliste parrain, tous souhaitent renouveler l’expérience l’an prochain. Il s’agira de créer de façon pérenne une Classe Médias en 4e qui poursuivra son travail en 3e avec, dans la mesure du possible, la même équipe enseignante. Bien sûr, tout est perfectible et nous avons manqué de temps pour emmener les élèves vers un projet original. Ce qui va nous laisser la possibilité de créer notre journal télévisé sur les 2 niveaux Médias.
Bien que conscientes de la perfectibilité de notre projet, comme indiqué ci-dessus, bon nombre de bénéfices ont été constatés. Notre mission de professeures s’est avérée fortement enrichie, notre sentiment d’utilité encore davantage. En effet, intégrer l’apprentissage des médias au sein de l’enseignement au collège permet d’établir un lien entre le dehors et le dedans. L’élève a souvent des connaissances numériques en dehors du lieu scolaire (télévision, réseaux sociaux, YouTube), il accumule des savoirs sans même le vouloir. Lui permettre d’explorer ces champs numériques en classe l’invite à poursuivre sa démarche d’« apprenant numérique » dans la classe et en dehors de celle-ci. L’élève devient plus curieux, plus soucieux de vérifier les informations, certainement moins naïf également. Et le rôle du parrain professionnel vient appuyer cela. L’élève réfléchit davantage par lui-même, et au-delà des programmes disciplinaires, le rôle de l’enseignant est aussi celui-là : permettre à l’élève, futur adulte, d’apprendre à penser par lui-même, d’apprendre à ne pas toujours cloisonner sa pensée en fonction des différentes instances sociales qui l’entourent (amis, famille). Lui apprendre à être maître de sa pensée est aussi -et surtout- l’aboutissement de l’enseignement. Nous formons des élèves et des attendus de savoir en fin de chaque cycle sont requis. Cependant, notre mission est aussi d’élever nos élèves au-delà, de leur apprendre à être libres dans une société où le conformisme est souvent de rigueur. Leur apprendre à rechercher, à discriminer les informations qu’ils reçoivent, à réfléchir par eux-mêmes, c’est tout simplement former les citoyens de demain : des citoyens conscients de leurs choix, de leurs actes, et faisant preuve de discernement.

Enfin, le projet Média vient accroître selon nous, cette faculté qu’ils auront de savoir se justifier, de pouvoir rendre compte de leur pensée et surtout de savoir argumenter. L’oralité, la capacité que peut avoir une personne à s’exprimer est un tremplin fondamental dans la société actuelle. C’est un atout indispensable pour leur futur professionnel, un atout qui peut faire la différence quand ils auront trouvé leur voie. En effet, quoi de plus exaltant que d’avoir, face à nous, une personne capable, avec toutes les subtilités langagières et oratoires, de faire entendre sa voix.

 

 

 

Veille numérique 2020 N°4

Oralité

Prix « Éveil à la citoyenneté »

Créé en 2015, Le Prix EVEIL permet à tous les adolescents de collège et lycée de présenter une vidéo sur la liberté d’expression et d’opinion. Cette année, les sujets abordés par les élèves dans les vidéos sont la maltraitance infantile et le harcèlement numérique. Le jury du Prix Eveil a récompensé les élèves du Collège des Bourgognes à Chantilly pour sa vidéo « Ma faute ».
https://youtu.be/vJOy_oWkV9c

Les masques connectés

Après les masques biodégradables ou lavables, les masques “intelligents” arrivent sur le marché. Tout d’abord, les masques amplificateurs de voix ou traducteurs en six langues créés par l’entreprise japonaise Donut Robotics ; ces masques se collent à un masque classique et sont connectés à un smartphone via une application. Puis, les masques anti-pollution et anti-virus au look très futuriste de la société américaine Eo Air capables d’adapter la quantité d’air respirable en fonction de l’effort. Ceux-ci utilisent des nano-filtres et un mini système de ventilation.


éducation

L’exposition Afropolitan Comics

L’Institut Français d’Afrique du Sud (IFAS) et la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image (CIBDI) se sont associés pour proposer une exposition virtuelle sur la BD africaine. L’exposition est composée de trois thèmes (Autobiographie, Héros et Histoire, Folklore et Futur) et divisée en deux parties en miroir : d’une part, les œuvres d’Afrique du Sud, d’autre part, celles des autres pays africains.
https://www.afropolitancomics.com/fr

#culturecheznous

Au cours du confinement, le Ministère de la Culture a lancé un site internet qui favorise l’accès aux arts. La découverte s’articule autour de sept onglets : Enfants, Art & patrimoine, Films & vidéos, Spectacles, Audios, Livres & savoirs, Jeux. La recherche par mot-clé offre la possibilité d’utiliser des filtres thématiques (architecture, art urbain, bande dessinée, cinéma, danse, histoire, mode, peinture, …). Il est aussi possible de s’en remettre à la sérendipité, en naviguant sur la page d’accueil qui contient de nombreuses recommandations.
https://www.culturecheznous.gouv.fr/

British Museum

Les collections en ligne du British Museum ont été réorganisées afin de faciliter les visites virtuelles. Deux façons de naviguer : soit par thème (Americas, Animals, China, Death and memory, Desire, Love and identity, Africa, Egypt), soit par galerie (Lower floor, Ground floor, Upper floors, Virtual galleries). La haute définition des images donne l’occasion de les agrandir et de les examiner dans le détail. De plus, un grand nombre de celles-ci sont sous licence CC BY-NC-SA 4.0, ce qui assure une réutilisation libre sans but commercial.
https://www.britishmuseum.org/

Covid-19 : décrypter la désinformation

Magalie Le Gall, bibliothécaire à la Sorbonne Université a publié sur le site de l’ABDU une infographie sous la forme d’un sketchnote intitulée « Décrypter la désinfo avec ma bibliothèque ». En complément, un formulaire d’évaluation des sites d’informations douteux est disponible, toujours sous la forme d’un sketchnote, et peut être envoyé à la Commission pédagogie qui centralise les données. Les deux documents sont téléchargeables au format PDF.
https://adbu.fr/decrypter-la-desinfo-covid-19/

Lecture numérique

Éditions des femmes – Antoinette Fouque en ebooks

Le printemps 2020 a été particulièrement difficile pour les femmes victimes de violences conjugales pendant le confinement. Projet de longue date, les Éditions des femmes – Antoinette Fouque ont sauté le pas en publiant leurs premiers livres numériques dès la fin avril. Parmi les premiers titres choisis, nous retrouvons, entre autres, Les Sociétés matriarcales d’Heide Goettner-Abendroth, Backlash de Susan Faludi, Gravidanza Féminologie II d’Antoinette Fouque et Clit Révolution – Manuel d’activisme féministe de Sarah Constantin, Elvire Duvelle-Charles et Alice Des.
https://www.desfemmes.fr/

Fabricius : traducteur de hiéroglyphes

Google a lancé un logiciel capable de traduire les hiéroglyphes, mais de façon basique pour le moment. En effet, seul les emojis et quelques mots sont proposés pour cette fonction. Néanmoins, cet outil va être amélioré car il utilise le machine learning et donne accès à un espace pour les chercheurs et les étudiants en égyptologie. Une partie du site est consacrée à l’apprentissage ludique des hiéroglyphes. Fabricius n’est, à l’heure actuelle, disponible qu’en anglais et en arabe.
https://artsexperiments.withgoogle.com/fabricius/en

WordToEPUB

Le consortium Daisy et Microsoft ont développé l’application WordToEPUB, un outil pour convertir les documents Word en EPUB (format des ouvrages numériques). Ce logiciel gratuit convertit un ou plusieurs fichiers Word d’un simple clic droit. Il convient néanmoins de rappeler que le logiciel libre de traitement de texte LibreOffice et le gestionnaire de bibliothèques numériques Calibre proposent déjà cette conversion vers le EPUB.

Droit et données personnelles

Loi contre la haine sur internet

Très controversée, la loi Avia supposée lutter contre la haine en ligne a été retoquée par le Conseil Constitutionnel. Ce texte transférait à des particuliers ou à des organismes privés, à savoir à des néophytes en droit, la décision de juger de l’illégalité ou de la légalité de certains propos tenus sur Internet : les entreprises interpellées par les internautes étaient priées de retirer dans les 24 heures, voire dans l’heure, les propos « manifestement » illicites. Selon de nombreuses associations, cette formulation pour le moins ambiguë ouvrait la porte à toutes les interprétations et aurait pu conduire à des suppressions s’apparentant à de la censure, portant par la même atteinte à la liberté d’expression. De cette loi, ne reste que l’observatoire de la haine en ligne mis en place fin juillet. Contrôlé par le CSA, il regroupe différents acteurs : associations, géants du Net, ministères, défenseur des droits, son rôle est préventif.

Base de données

Mémoire du confinement à la BNF

Depuis le 17 mars, les archivistes de la BNF collectent de très nombreux documents web sur le covid-19 et l’impact sur la population française afin qu’ultérieurement les chercheurs ou journalistes puissent retrouver ces documents éventuellement supprimés de la toile. En temps normal, une équipe de dix bibliothécaires et experts informaticiens de la BNF est chargée de collecter des documents en ligne sur certains évènements importants.

Le patrimoine de la BD française

La Cité internationale de la bande dessinée et de l’image met à disposition sur son site internet ses collections numérisées qui couvrent la période de la fin du XIXe au début du XXe siècle. La CIBDI propose de consulter le fonds par auteur (Benjamin Rabier, Rodolphe Töpffer, Jean Trubert, Will Eisner, Edmond-François Calvo, Louis Forton…), thème (guerre 14-18, Maison Quentin, pirates, animaux…) ou périodique (Excelsior Dimanche, Dimanche illustré, l’Epatant, Pierrot, Lisette…).
http://collections.citebd.org/in/faces/homeInBook.xhtml

Educadhoc

L’application éducadhoc (Hachette Livre) qui permet aux enseignants et aux élèves d’avoir accès à des ressources pédagogiques, continue d’intégrer des éditeur partenaires en plus de ceux du groupe depuis mai 2020. À la rentrée scolaire, les manuels des éditions Hachette Éducation, Hatier, Didier, Foucher, Istra, Bertrand-Lacoste, Docéo, Fontaine Picard, Le Génie Éditeur, Maison des Langues et Dunod font partie du catalogue de l’application.
https://educadhoc.fr/

Technologie

Applis pour éviter la foule

Depuis le début du déconfinement, des applications smartphone aident les personnes qui fuient la surpopulation dans les lieux publics. Pour les musées, centres administratifs, piscines, bibliothèques, l’appli Affluence donne en temps réel le taux de fréquentation. Pour les commerces, ce sera l’application Crowdless qui informera sur l’affluence dans les magasins aux alentours avec un code couleur (rouge, orange, vert, gris).

Lydia, l’appli de paiement française

La start up parisienne propose un service simple, gratuit et immédiat de paiement entre personne. Concrètement, le paiement s’effectue via un numéro de téléphone. Pas étonnant que les millennials aient adhéré très rapidement à ce concept. En pleine expansion, la néobanque a réalisé une levée de fonds de 40 millions d’euros en 2020 et s’ouvre à l’international en faisant entrer au capital le géant chinois Tencent.
https://lydia-app.com/fr/

écologie

Plantyflix

Les serveurs des plateformes de vidéo à la demande et de jeux vidéo en ligne consomment énormément d’énergie. Afin de compenser nos émissions carbone, la start-up Plantyflix propose, en fonction du nombre d’heures passées sur ces services, de choisir un forfait mensuel de 1 € à 6 € destiné à la sauvegarde des forêts. Des exemples de consommation de CO2 par séries ou films aident à prendre conscience de l’impact écologique. Les dons sont reversés majoritairement à l’ONG partenaire Eden Reforestation Projects.
https://www.plantyflix.com/


No future…

Emojis de la discorde

Comme chaque année, la journée des émojis (17 juillet) relance le débat sur ces pictogrammes qui ponctuent nos messages électroniques. Au cœur des discussions, la lutte concernant les représentations des personnes, des cultures et des territoires. Par exemple, les représentations culinaires sont largement dominées par l’industrie alimentaire américaine. Constituent ou ont constitué des sujets sensibles : la religion, le travail des femmes, le handicap, l’homosexualité, les minorités. En France, certaines régions réclament leur drapeau en émojis (Corse, Bretagne, Pays basque, Normandie).

Netflix 1,5x

Après Youtube, c’est au tour de Netflix de proposer aux utilisateurs de contrôler la vitesse de lecture de leurs films et séries. Concrètement, vous pouvez regarder des films en accéléré ou plus lentement… Selon la plateforme, c’était une demande expresse de la communauté des utilisateurs de Netflix ! Actuellement, les vitesses disponibles sont 0.5x, 0.75x, 1.25x, 1.5x. À quand le 10x !?

 

 

La mise en scène de l’oralité : quand les ados prennent la parole

La question de l’oralité est une problématique importante dans la construction de soi à l’adolescence. L’injonction à l’expression orale est extrêmement présente dans le cadre scolaire, comme dans celui du groupe des pairs, générant pour beaucoup une grande pression et possiblement de l’angoisse et de la solitude. Cependant, si l’oralité est un objet d’apprentissage comme un autre, elle peut aussi être un vecteur d’épanouissement et de partage.
La littérature aborde ce sujet sous différentes facettes, que ce soit par le biais du théâtre, du slam, de la prise de parole publique ou d’internet et tous ces items se regroupent autour de deux thématiques majeures. Beaucoup de récits, tout d’abord, mettent au jour la passion des personnages pour ces pratiques, que ce soit pour l’amour de l’art ou pour transmettre ses convictions, pour faire porter sa voix sur des sujets qui nous tiennent à cœur. L’autre partie des romans du corpus s’attache à démontrer comment cela peut permettre de se révéler à soi et aux autres, de vaincre ses difficultés, de rompre avec la solitude et de créer de nouvelles relations.

L’oralité comme passion

Entre tradition et modernité, la passion de l’oralité dans la littérature destinée aux adolescents va mettre en scène deux types de personnages : soit des mordus de théâtre, sans autre propos que de mettre en avant leur implication dans leur art et les belles rencontres que cela génère, soit des youtubeurs, dont l’expression recherche un plus large public et vise souvent un but politique.
Concernant la première catégorie, quatre romans peuvent être évoqués ici à titre d’exemple. L’incontournable Marie-Aude Murail propose le titre 3000 façons de dire je t’aime ; elle place l’action parmi un groupe d’amis évoluant au sein du conservatoire d’art dramatique de leur ville. Ils se connaissent depuis le collège et partagent une passion pour le théâtre depuis que leur professeur de français les a emmenés voir une pièce. L’autrice développe ici les problématiques liées à l’apprentissage de cet art, le travail que cela induit, le stress, l’ambition, etc.
Cette passion se retrouve également dans un roman comme Libérez l’ours en vous, de Carol Trébor. Ici, le club théâtre du lycée auquel prennent part Kolia et Lisa va mettre toute son énergie à monter une pièce pour leur professeure malade qui ne pourra pas les accompagner pendant cette année. C’est toute l’implication des jeunes qui est ici mise en avant, alors que ce qui n’était pour eux qu’un simple hobby revêt tout d’un coup un enjeu plus important.
Nous pouvons également citer deux romans qui mêlent passion pour le théâtre et passion amoureuse. Lucy dans tous ses états de Sophie Guillou met en scène de manière très drôle une adolescente amoureuse d’un membre de sa troupe et qui va tout faire pour se payer le stage de théâtre où elle prévoit de se rapprocher de lui. Moins récent, dans Sur les trois heures après dîner de Michel Quint, Rachel s’éprend de son prof de théâtre. Lorsque celui-ci subit un accident cérébral, elle s’investit à ses côtés pour l’aider dans sa rééducation, tout en poursuivant son apprentissage de la scène.
Les arts urbains tiennent également une grande place dans ce panorama littéraire autour de l’oralité. Parée pour percer, d’Angie Thomas, raconte la passion de Bri, 16 ans, pour le rap. Fille d’un rappeur de légende aujourd’hui décédé, elle rêve de suivre ses traces, jusqu’au moment où, pour sortir sa famille de l’impasse, ce rêve devient une nécessité impérieuse. Par ailleurs, pour faire le lien avec les thématiques précédentes et celle qui suit, nous pouvons évoquer Molière vu par une ado et par son chien ! de Cécile Alix, qui mêle le théâtre, le slam et YouTube. On y suit Inès, une jeune fille passionnée par Molière et qui entreprend de rendre accessible la vie du dramaturge en déclamant du slam sur sa chaîne vidéo.
Si peu d’adolescents sont réellement sensibilisés au théâtre, les nouvelles technologies ont permis de démocratiser une nouvelle forme d’oralité. Avec YouTube, les jeunes ont pu prendre la parole sur différents sujets, avec la certitude (parfois illusoire) d’être entendus. Quelques auteurs et autrices se sont appropriés ce topic et témoignent de la diversité des sujets transmis par les jeunes vidéastes.
Jérémy Behm, par exemple, avec son roman 1 million de vues, met en scène un panel de youtubeurs qui participent à un concours dont le gagnant ressortira riche et célèbre. Chacun a sa spécialité mais aussi son histoire, plus ou moins dramatique. Un récit sur les dérives de la société de consommation qui élève les influenceurs au rang de superstars.
Enfin, Charlotte Bousquet, comme à son habitude, propose un roman social fort avec À cœurs battants. On y suit plusieurs personnages en plein mouvement social et qui participent à une manifestation marquée par des violences policières. La protagoniste qui nous intéresse ici est Samia, vlogueuse, dont l’objectif est de donner à sa parole et à celles des manifestants une valeur de témoignage.

L’oralité pour se révéler à soi et aux autres

Néanmoins cette passion pour la prise de parole et pour la déclamation n’entre généralement pas dans la vie de nos protagonistes sans une raison plus profonde et c’est ce moment de la découverte et ce qu’elle implique qui est le plus souvent mis en exergue dans la littérature pour ados. Cette dernière s’attache à décortiquer ce passage de l’enfance à l’âge adulte qui nécessite de se découvrir soi-même et de s’affirmer face aux autres, ce qui ne se fait pas sans difficultés. Ici, l’accession à l’oralité devient un prétexte au dépassement de ses angoisses et à la proclamation de sa personnalité, et permet d’inscrire ces récits dans la lignée des romans d’apprentissage.
La question généraliste de la confiance en soi est la plus souvent traitée dans notre corpus. Par exemple, Signé poète X, d’Elizabeth Acevedo, dont la particularité est d’être rédigé en vers libres, raconte l’histoire d’une adolescente de 15 ans, Xiomara, née dans une famille pieuse et qui rêve d’émancipation. Déjà poète, sa découverte du slam dans le club de son lycée lui permettra de faire porter sa voix et de faire entendre ce qu’elle a à dire. La découverte du slam est aussi au centre du roman de Jean-Philippe Blondel, Brise glace, dans lequel Aurélien, un jeune garçon solitaire, parvient enfin à exprimer la souffrance qui le ronge à la suite d’un deuil qu’il a toujours gardé secret. En prenant la parole, le protagoniste s’autorise enfin à commencer à se reconstruire.
Dans Demandez-leur la lune, Isabelle Pandazopoulos s’intéresse aux concours d’éloquence. Quatre adolescents en décrochage scolaire pour des raisons diverses sont pris en charge par une professeure de français, alors qu’ils sont déjà considérés comme irrattrapables par beaucoup. Son objectif : leur permettre de se réapproprier leur voix et leur histoire, de créer leur propre langage et de mettre des mots sur leurs problèmes, afin d’être en mesure de les dépasser.
Si l’on revient sur le sujet du théâtre, nous pouvons de nouveau évoquer l’auteur Jean-Philippe Blondel avec cette fois-ci Double jeu. Ici, le personnage principal est un adolescent de 17 ans qui a tendance à s’attirer des ennuis. Ne se sentant à sa place nulle part et cherchant la confrontation partout où il va, il va atterrir dans le club de théâtre de son nouveau lycée qui monte la pièce La Ménagerie de verre de Tennessee Williams. En s’identifiant alors au personnage principal, il va pouvoir répondre à de nombreuses questions et faire des choix importants. Alex Gino, de son côté, choisit dans George le théâtre comme moyen de se révéler aux autres. Dans ce roman, George est une fille transgenre. Assignée garçon et perçue comme tel par son entourage, elle se révèle aux yeux de tous en interprétant contre toute attente un rôle féminin dans la pièce de son école.
Enfin, certains romans s’attachent à démontrer que l’appropriation de l’oralité peut être un moyen de dépasser ses troubles du langage et des apprentissages. Deux exemples peuvent être cités. D’une part, dans Dys sur 10, Delphine Pessin décrit le quotidien de Dylan, un jeune dyslexique et dysorthographique qui fait tout pour dissimuler ses difficultés, jusqu’à sa rencontre avec un professeur plus attentif à ses besoins. Puisque l’expression écrite est particulièrement pénible pour l’adolescent, son enseignant a l’idée de l’initier aux joies de l’expression orale en lui faisant découvrir le théâtre. D’autre part, la série Ma vie en vlog d’Emma Moss met en scène une adolescente harcelée à cause de son bégaiement et qui va se réapproprier sa parole et son image en créant sa propre chaîne YouTube.

Les nouvelles exigences scolaires autour de l’oralité et cristallisées autour du nouveau Grand oral du bac nécessitent de porter une attention particulière aux jeunes qui peuvent être le moins à l’aise dans ce type de situation. Dans ce corpus, peut-être que des adolescents timides, introvertis, en retrait, trouveront de quoi s’enthousiasmer pour les différentes pratiques de l’oralité que peuvent être le théâtre, le slam, l’éloquence ou encore le vlogging.

 

 

L’art de parler

EXPOSITIONS, ARCHIVES, MUSÉES, ÉVÉNEMENTS

Le département de l’Audiovisuel de la BnF, issu de la Phonothèque nationale, conserve et communique les collections de documents sonores, de vidéos et de documents multimédias. Gallica regroupe toutes les archives sonores, dont Archives de la parole – Musée de la parole et du geste, des discours. Certains documents audios sont disponibles en podcast, d’autres sont à consulter sur place.
https://gallica.bnf.fr/html/und/enregistrements-sonores/fonds-sonores?mode=desktop

Les archives orales du service historique de la défense :
https://www.servicehistorique.sga.defense.gouv.fr/ressources/les-archives-orales

Le fonds des archives orales et audiovisuelles s’articule autour de 3 grands ensembles : les archives orales constituées par les Archives nationales, les archives audiovisuelles produites et collectées par les administrations publiques de l’État, les fonds privés conservés par l’institution.
http://www.archives-nationales.culture.gouv.fr/web/guest/archives-audiovisuelles-et-electroniques

Le Musée du Barreau de Paris :
Contient, entre autres, une riche collection de notes de plaidoiries. https://www.museedubarreaudeparis.com/

La Maison de la radio, Paris :
C’est dans ce lieu que sont enregistrées les émissions des chaînes de Radio France. Y sont également proposés des visites, des concerts, des ateliers (notamment avec les scolaires). Des projets à l’année peuvent être montés avec les collèges et les lycées.
https://www.maisondelaradio.fr/

Encyclopédie de la parole : « projet collectif qui cherche à appréhender transversalement la diversité des formes orales […] collecte toutes sortes d’enregistrements et les répertorie en fonction de phénomènes particuliers de la parole ». Animé par des artistes (acteurs, plasticiens, musiciens, metteurs en scène etc.).
https://encyclopediedelaparole.org/fr#/collections

La Maison du Conte, Chevilly-Larue :
Des classes Conte, des projets Conteur dans la classe ainsi que des classes à PAC sont possibles. Des ateliers de sensibilisation à la narration orale et de découverte des métiers de la Maison du Conte peuvent également être mis en place.
https://lamaisonduconte.com/

Le Centre de documentation Le « Litt’oral », Paris
Plus de 4000 ouvrages (recueil de contes, légendes, épopées, grands récits d’enfance, ouvrages sur la littérature orale, études scientifiques ayant pour objet les pratiques de l’oralité + un fonds d’archives), enregistrements inédits de conteurs et de conférences.
https://www.association-calliope.fr/lelittoral.html

L’École de l’oralité, Saint-Etienne
Cette école propose de vivre la pratique artistique par une pédagogie basée sur l’oralité. Des ateliers hebdomadaires sont ouverts à tous. Possibilité de partenariat pour des projets.
http://www.ecoledeloralite.org/

L’Association pour le Développement des Arts de l’Oralité (ADAO), Brest : festivals de contes dans le pays de Brest. L’association intervient dans les collèges et organise différents festivals ainsi que des spectacles.
https://associationadao.wordpress.com/category/lassociation/

Dastumedia : archives du patrimoine oral de Bretagne ; donne un accès à des milliers d’archives (enregistrements sonores, manuscrits, photographies) sur le patrimoine oral de Bretagne (chansons, musique instrumentale, contes, légendes, témoignages, etc.).
http://www.dastumedia.bzh/

 

Programmes et repères pédagogiques

Collège

Français, cycle 3 – Le langage oral.
https://eduscol.education.fr/cid101008/francais-cycle-langage-oral.html
S’exprimer à l’oral. Ressources d’accompagnement. Éduscol, 2016.
https://eduscol.education.fr/cid102485/francais-cycle-exprimer-oral.html
Évaluation de l’oral. Ressources d’accompagnement. Éduscol, 2017.
https://eduscol.education.fr/cid102736/francais-cycle-3-evaluation-de-l-oral.html

Français, cycle 4. Enseigner l’oral au cycle 4
https://cdn.reseau-canope.fr/archivage/valid/feuilletage-enseigner-l-oral-au-cycle-4-N-11608-16221.pdf

Diplôme national du brevet : épreuve orale.
« L’épreuve orale de soutenance d’un projet permet au candidat de présenter l’un des objets d’étude qu’il a abordés dans le cadre de l’enseignement d’histoire des arts, ou l’un des projets qu’il a menés au cours des enseignements pratiques interdisciplinaires du cycle 4 ou dans le cadre de l’un des parcours éducatifs (parcours Avenir, parcours citoyen, parcours éducatif de santé, parcours d’éducation artistique et culturelle) qu’il a suivis. »
Bulletin officiel n°1 du 4 janvier 2018
https://www.education.gouv.fr/bo/17/Hebdo42/MENE1731896N.htm?cid_bo=122780

La place de l’oral dans tous les cycles pour toutes les disciplines. https://www.education.gouv.fr/sites/default/files/2020-02/t-l-charger-les-programmes-48461.pdf

Lycée et Collège

Physique-Chimie
L’oral, enjeu d’apprentissage en physique-chimie et enjeu d’apprentissage en soi. Éduscol, janvier 2020. https://eduscol.education.fr/cid129214/recherche-et-innovation-en-physique-chimie.html

Lycée général et technologique

Français, arts, langues
Bulletin officiel n° 34 du 19 septembre 2019 : nature et durée des épreuves terminales, session 2021.
https://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=144874

Grand oral. Terminale
Le Grand oral rompt avec la tradition française qui mettait l’accent sur l’écrit dans les examens scolaires. Et sa préparation replace les pratiques documentaires au centre du travail de l’élève (recherche documentaire, sélection d’idées, travail sur le discours) :
Bulletin officiel spécial n° 2 du 13 février 2020
https://www.education.gouv.fr/bo/20/Special2/MENE2002780N.htm?cid_bo=149115
Le Grand oral est une épreuve des nouveaux bacs général et technologique avec un coefficient 10 en voie générale et 14 en voie technologique. Elle dure 20 minutes et est précédée de 20 minutes de préparation.
https://www.education.gouv.fr/nouveau-bac-comment-se-passe-le-grand-oral-100028

Humanités, littérature et philosophie. Première et Terminale
L’oral dans l’enseignement de spécialité « humanités, littérature et philosophie ». Éduscol, 2019.
https://cache.media.eduscol.education.fr/file/HLP/74/1/RA19_Lycee_G_1-T-HLP_Oral-enseignement-HLP_1219741.pdf

Lycée professionnel

Terminale CAP et Bac Pro
Le chef-d’œuvre est un travail effectué seul ou en groupe. L’élève doit le présenter devant un jury. L’épreuve consiste à expliquer l’ensemble de la démarche, de la conception à la réalisation du projet.
BO n° 4 du 23 janvier 2020
BO n° 47 du 19 décembre 2019

 

SITES INSTITUTIONNELS

Rapport au Ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse : «Faire du grand oral un levier de l’égalité des chances», 24 juin 2019. Cyril Delhay, professeur d’art oratoire à Sciences Po Paris :
Ce rapport propose également une réflexion sur la place de l’oral de l’école au lycée.
https://www.reseau-canope.fr/nouveaux-programmes/magazine/oral/lapprentissage-de-loral-un-enjeu-de-societe.html

Séminaire PNF (Plan National de Formation) : La prise en compte de l’oral au lycée ; travailler les compétences orales avec les élèves, 2019. Vidéos et ressources pour les enseignants de toutes disciplines en vue de la préparation du Grand oral :
https://eduscol.education.fr/cid140653/la-prise-en-compte-de-l-oral-au-lycee-travailler-les-competences-orales-avec-les-eleves.html

« Se préparer à l’oral par la pratique médiatique – collège, lycée, LP » : dossier pédagogique à télécharger sur le site de l’académie de Bordeaux
18 fiches réalisées par le CLEMI de Bordeaux sur la relation entre pratique médiatique et maîtrise du langage oral avec une série d’activités pédagogiques concrètes.
http://www.ac-bordeaux.fr/cid145302/oral-et-pratique-mediatique.html

Pour approfondir, consultez la curation de Brigitte Pierrat qui regorge de références institutionnelles et d’exemples de mise en pratique d’un enseignement de l’oral :
https://atelier75.canoprof.fr/eleve/Sitographies/competences_orales_eleve/

 

Pistes pédagogiques

Réaliser une webradio. Pour allier l’oral, l’écrit, les techniques de création, de production et de diffusion en ligne. Quelques outils pour créer une webradio :
https://www.clemi.fr/fr/medias-scolaires/creer-une-webradio.html
http://www.ac-toulouse.fr/cid74776/des-fiches-et-des-conseils-pour-votre-projet-radio.html
https://radioclype.scola.ac-paris.fr/
Appli Elocance, pour transformer les écrits en podcasts :
https://www.elocance.com/fr/

Réalisation d’une revue de presse orale. Cette prestation peut être enregistrée avec un micro ou filmée. Partenariat possible avec la maison de la radio :
https://www.maisondelaradio.fr/ateliers-autour-des-metiers-de-la-radio

Analyser et réaliser un journal télévisé :
http://cache.media.education.gouv.fr/file/Education_aux_medias/20/5/Se_preparer_a_l_oral_par_la_pratique_mediatique_-_clemi_bordeaux_-_novembre_2019_1204205.pdf
Utiliser des capsules vidéo : http://mediafiches.ac-creteil.fr/spip.php?article343

Mettre en place un atelier d’improvisation théâtrale.
https://eduscol.education.fr/cid114218/pratique-de-l-improvisation-theatrale.html

Des vidéos pour se préparer à l’oral : improvisation théâtrale, éloquence, Canopé, 2019. https://www.reseau-canope.fr/nouveaux-programmes/ressources-audiovisuelles/oral.html

Participer à Interclass’ : réalisation de reportages radiophoniques avec des professionnels de France Inter :
https://www.franceinter.fr/emissions/interclass
Résidence d’auteur avec un slameur ou Atelier de pratique du slam avec intervenants extérieurs dans le cadre de l’éducation artistique et culturelle :
https://eduscol.education.fr/cid112947/slam-a-l-ecole.html

Club lecture à voix haute : jouer autour de variations sur la lecture à voix haute, lire et bruiter un texte, prendre la voix d’un personnage.
Écoute, recherche documentaire et étude des discours d’orateurs et d’oratrices célèbres à travers les temps (ex : discours de Greta THUNBERG, Assemblée nationale française, 23 juillet 2019 ou Yes we can, discours de Barack Obama, 8 janvier 2008 à Nashua, dans le New Hampshire, lors des primaires de la campagne présidentielle).

Recherche documentaire sur les tableaux, dessins, photos en lien avec l’oralité.

Participer à une joute oratoire, à un débat normé, structuré (ex. jeu de rôle : procès, simuler une plaidoirie), réaliser un débat radiophonique, organiser un débat d’éloquence.
Le débat réglé ou argumenté :
https://cache.media.eduscol.education.fr/file/EMC/01/1/ress_emc_debat_464011.pdf (éduscol, 2015)
Le débat littéraire et interprétatif :
https://cache.media.eduscol.education.fr/file/Culture_litteraire_/05/9/21-RA16_C3_FRA_5_culture_litt_debat_591059.pdf (éduscol, 2016)

Participer à l’un des nombreux concours d’expression orale existants (concours d’Éloquence, de plaidoiries etc.).

Monter une classe « Éloquence » en troisième avec les professeurs d’art.
https://eduscol.education.fr/cid141066/experimentation-enseignement-eloquence-classe-troisieme.html

Le blog Souffle vous propose de suivre deux classes de 3e à travers les séances menées en classe et les ateliers de pratique théâtrale
https://souffle.school.blog/

Après avoir visionné une séance d’entretien d’embauche dans un film (ex. : La loi du marché, entretien d’embauche via Skype) simuler des entretiens professionnels avec les élèves, notamment en lycée pro, en STMG ou organiser une séance ciné-débat.
https://www.reseau-canope.fr/savoirscdi/cdi-outil-pedagogique/base-initiatives/initiatives-pedagogiques/techniques-de-recherche-demploi/methodologie-de-lentretien-dembauche.html

Se servir des examens nationaux pour préparer les élèves à l’oral : oraux de français (EAF), de langues… : simulations, entraînements, des élèves prennent la place du jury, présentation d’un diaporama… https://www.lumni.fr/video/10-trucs-pour-assurer-a-l-oral

 

Les concours

De nombreux concours d’éloquence ont fleuri ces derniers temps en régions. Parallèlement, les élèves peuvent également participer à des évènements d’ampleur nationale, voire internationale :

Le concours d’éloquence de la fondation des femmes organisé par le Centre Hubertine Auclert et la Région Île-de-France en partenariat avec France culture : pour mettre en lumière le talent des femmes et dénoncer le sexisme par le verbe, au studio 104 de la Maison de la radio. Jury présidé par Christine Taubira, ancienne garde des sceaux. Prix Gisèle Halimi pour la meilleure prestation.
https://m.centre-hubertine-auclert.fr/outil/concours-d-eloquence-de-la-fondation-des-femmes-2018

Le concours de lecture à voix haute organisé par la Grande Librairie.
https://www.lumni.fr/dossier/la-grande-librairie-concours-de-lecture-a-voix-haute

Le concours de plaidoiries des lycéens organisé par le Mémorial de Caen : https://www.memorial-caen.fr/les-evenements/concours-de-plaidoiries-des-lyceens

« Dis-moi dix mots » piloté par les Ministères de la Culture et de l’Éducation nationale : http://www.dismoidixmots.culture.fr/concours-pedagogiques

À mots ouverts : concours international d’éloquence en français porté par l’Institut français.
https://www.culture.gouv.fr/Sites-thematiques/Langue-francaise-et-langues-de-France/Politiques-de-la-langue/Sensibilisation-des-publics/Les-concours/A-mots-ouverts-concours-international-d-eloquence

Concours de récitation organisé par la BnF à destination des collégiens et des lycéens avec un thème chaque année. https://www.bnf.fr/fr/evenements-et-concours-du-service-de-leducation-artistique-et-culturelle#bnf-concours-de-r-citation

Le programme Graine d’Orateur propose, en plus de ses formations, la Coupe de France lycéenne, une compétition de débats inter-lycées :
http://ffdebat.org/graine-dorateur

Coupe du monde de slam ; la prochaine coupe du monde se déroulera du 10 au 16 mai 2021 à Paris :
https://grandpoetryslam.com/la-coupe-du-monde/

Représentations artistiques

 Chansons

Brel, Jacques, Les Timides. Youtube, 2014. https://www.youtube.com/watch?v=HeU7xlAKyvQ

Faye, Gaël, TV, 2014 :
https://youtu.be/nee7nJzJlT8

Grand corps malade, J’écris à l’oral. Youtube, 2008. https://www.youtube.com/watch?v=lwCL6o3kCcs

Grand corps malade, Le langage du corps. Youtube, 2019. https://www.youtube.com/watch?v=nh0mzQATQIs

 Tableaux

Anonyme, Procès de Galilée devant l’Inquisition en 1633. Collection particulière.

Bach, Armand Eugène, La Cour d’Assises. Musée Carnavalet, Paris.

Belay, Pierre de, Plaidoirie de Me Moro-Giafferi. Collection particulière, 1934

Court, Joseph-Désiré, Honoré Gabriel Riqueti, Comte de Mirabeau à l’assemblée constituante de 1789, Musée des beaux-arts de Rouen.

Daumier, Honoré, Le Défenseur. Musée d’Orsay, Paris.

David. Le Serment du Jeu de Paume. Musée du Louvre, Paris.

Huot, Charles, Le débat sur les langues : séance de l’assemblée législative du Bas-Canada le 21 janvier 1793. National Gallery of Canada, Ottawa.

Lorent, Jean-François, Procès de Louis XVI à l’Assemblée de la Convention Nationale. Musée Carnavalet, Paris.

 Dessins

Depuis la loi du 29 juillet 1881, modifiée par celle du 6 décembre 1954, les photographes et appareils photo sont normalement interdits dans les salles d’audience des palais de justice. C’est pourquoi les croquis, dessins et esquisses restent les seuls moyens de rendre compte visuellement de l’ambiance des jugements.

Les croquis d’audience : dessins de Cabu, Sylvie Guillot, Julien Tiberi, Noëlle Herrenschmidt, Riss, Dominique Lemarié, Tignous, notamment.

 Photos

Discours de Jean Jaurès le 25 mai 1913 au Pré-Saint-Gervais à l’issue d’une manifestation contre la loi des trois ans, photo : Henri Roger.

Discours de Martin Luther King à Washington le 28 août 1963 « I have a dream », AFP.

Discours de Nelson Mandela prononcé à Rivonia devant les juges qui l’ont condamné en 1964.

Discours de John Fitzgerald Kennedy le 26 juin 1963 à l’hôtel de ville de Schöneberg (Berlin-Ouest), Keystone Pictures USA.

« Je vous ai compris » : discours du général de Gaulle lors de sa visite officielle à Alger le 4 juin 1958, crédits photo : Rue des Archives.

Martin Luther King, le 28 août 1963, à Washington.
AFP.

 

 

L’oral comme praxis

Normalien, agrégé d’histoire, diplômé de Sciences Po, vous avez enseigné dans un établissement ZEP à la Courneuve, au pied de la cité des 4000, avant de devenir professeur d’art oratoire à Science Po Paris. Pouvez-vous apporter quelques précisions sur votre parcours personnel en lien avec les compétences orales et professionnelles ?

Après une dizaine d’années d’études supérieures, j’ai candidaté pour un poste à exigence spécifique lors de ma titularisation dans un collège à La Courneuve. Ce fut une redescente sur terre bienvenue. Enseigner à des adolescents de 10 à 17 ans vous conduit à quitter le monde nimbé des spéculations intellectuelles pour vous river à une seule question : comment faire passer ce que j’ai envie de transmettre ? Ce fut une mise en pratique personnelle de cet art de la parole qui est en premier lieu un art de l’écoute et de l’altérité. J’étais nourri par mes études bien sûr, mais aussi par la formation et la pratique du théâtre et particulièrement par une expérience de troupe de théâtre itinérant.
À Normale Sup’, au milieu des années 1990, j’avais mis en scène quelques pièces, Sartre, Gombrowicz… Nous étions une bande de copains. Et parmi ceux-là quelques-uns à vouloir une autre aventure. Non pas jouer devant les pairs, mais devant tous les publics, dans la tradition du théâtre populaire.
Une expérience de troupe, où vous débutez la journée par des parades sur les marchés – ou les parkings de supermarchés -, puis montez les décors de bois à la visseuse l’après-midi, puis installez les projecteurs pour jouer le soir, parfois dans le vent et sous la menace de l’orage. J’avais vingt-cinq ans, j’étais chef de la troupe : ce fut une école. Avec le recul, je crois que pendant ces heures innombrables consacrées à la mise en scène et à la direction d’acteurs, je me suis forgé comme pédagogue. Et sans doute suis-je allé vers le théâtre parce qu’au fond, ce qui me touchait, c’était cet accouchement de la personne pendant la répétition.

Comment en êtes-vous venu à ce théâtre de tréteaux ?

Avec un ami, au milieu des années 1990, nous nous étions rendus à la rencontre du Foostbarn Travelling Theatre, une troupe communautaire anglaise fondée à l’époque hippie qui jouait dans la banlieue de Dijon, sous chapiteau, l’Odyssée d’Homère, un spectacle dans la tradition de la Commedia Dell’ Arte, de Molière et Shakespeare. Après le spectacle, je demande aux comédiens où ils conseillent de se former. Ils répondent : « Il n’y a qu’un lieu, l’École Jacques Lecoq à Paris ». J’ignorais tout de cette institution davantage connue aux États-Unis, en Australie ou en Corée que dans son propre pays.
La rencontre avec Jacques Lecoq (1921-1999) a provoqué un séisme personnel. C’était un immense pédagogue de théâtre. J’étais élève dans son école deux ans avant sa mort, mais il transmettait toujours en personne. C’était une pédagogie conçue comme un voyage et dont la progression sur chaque journée, chaque semaine, l’une à la suite de l’autre, était pensée. J’avais un peu plus de vingt ans, le bon élève français, un élève si raide dans son corps. J’ai beaucoup souffert à l’École Lecoq au milieu des danseurs, des comédiens, des acrobates venus des cinq continents. J’y ai reçu une grande leçon.
La pédagogie de Lecoq est fondée sur l’engagement physique et l’observation du monde. Ariane Mnouchkine du Théâtre du Soleil dit qu’il a été son maître et je comprends pourquoi. Il fut l’inventeur génial du masque neutre, lui-même hérité de la tradition du masque noble du théâtre nô japonais.
C’est un outil pédagogique qui invite à un dépouillement personnel. Un masque en cuir que l’on se met sur le visage et qui permet de ressentir la sensation physique du calme et la relation à l’espace, élément clef dans le travail de l’acteur comme de l’orateur, mais aussi de l’enseignant et plus généralement de toute personne dont l’exercice de la parole est au cœur du métier. Bien sûr, une telle qualité fondamentale, l’état de réceptivité à ce qui nous environne, peut se travailler autrement que par le masque neutre, mais ce ne sera pas le même voyage.

Ecole Internationale de Théâtre Jacques Lecoq

Et l’art oratoire dans tout ça ?

Quand j’étais chez Lecoq, je sortais de Sciences Po et j’avais été déçu de ne pas y rencontrer un enseignement de l’art oratoire. L’oral qui faisait pourtant la réputation de l’École consistait en un exposé de 10 minutes produit par les étudiants, souvent assis, à lire leurs notes à toute vitesse, de crainte de ne pas avoir le temps de dire tout ce qu’ils avaient préparé. L’exposé était suivi à chaque fois d’une reprise de l’enseignant, qui s’attachait quasi exclusivement au contenu. Sauf exception, la « conférence de méthode » répétait inlassablement le même rituel monotone, deux exposés, deux reprises, que ce soit en économie, en histoire, en droit ou en relations internationales. On n’en pouvait plus (ça a beaucoup changé depuis). Quand je suis à l’École Lecoq, je découvre une nouvelle traduction de l’Institution oratoire de Quintilien, par Françoise Desbordes. Une traduction qui rend l’auteur antique lumineux pour le lecteur contemporain. Je tombe sur ce passage du XIe livre où Quintilien rappelle que les fondations de la maîtrise oratoire sont les mêmes que celles du jeu de l’acteur, qu’elles passent par l’entraînement physique, la respiration, les exercices vocaux et la gestuelle. Ce qu’on oubliait d’enseigner en France en dehors des meilleurs conservatoires de théâtre et de chant… ou de l’École Lecoq…

Est-ce cette lecture qui a guidé votre projet ?

C’est mon Eurêka. Peu après, je soumets à Richard Descoings (1958-2012) qui avait été mon enseignant à Sciences Po – en droit, en notes sur dossiers – et devenu entre-temps directeur de l’institution, un projet de séminaire pratique qui transmettrait aux étudiants les fondations de l’art oratoire. La même année, alors que j’enseigne au Collège Jean Vilar à La Courneuve, aux pieds de la Cité des 4000, nous lançons les Conventions Éducation Prioritaire qui visent à recruter rue Saint Guillaume des talents venus des territoires défavorisés que l’on n’arrivait pas à recruter jusque-là. Nous étions en l’an 2000. Depuis, près de 2300 élèves venus de plus de 100 lycées ont été sélectionnés par cette voie d’admission. Je ne compte plus aujourd’hui ces anciens étudiants devenus des interlocuteurs, à très haut niveau de responsabilité, qui sont enfants des sans-grades, chômeurs, ouvriers, éboueurs, agents d’entretien, mineurs mis à la retraite d’office à 40 ans car on fermait les dernières mines dans le Nord et en Lorraine. Je n’oublierai jamais qu’en 2001, les détracteurs de la réforme nous opposaient : « Mais un enfant d’ouvrier, ça ne peut pas s’intéresser à la politique ! ». Dans l’enseignement de l’art oratoire comme dans le recrutement, il s’agit de révéler des talents et de restaurer l’égalité des chances.

Dans le rapport (remis le 19 juin 2019) « Faire du Grand Oral un levier de l’égalité des chances », vous insistez sur l’importance de l’oral au cours des études, de l’école au lycée, avançant l’idée que le « Grand Oral » constitue l’aboutissement du parcours scolaire.

L’héritage que nous avons reçu, c’est un oral qui ne fait pas partie des priorités de l’École républicaine, toute focalisée sur le triptyque « Savoir lire, écrire, compter » et ce, depuis plus d’un siècle. Pourtant, parler en public est bien une compétence fondamentale pour réussir dans la vie. Et accessible à tous, pour peu que les techniques en soient enseignées. Un préjugé qui a la vie dure est qu’il s’agirait d’un talent de naissance. C’est ce que disent certains qui ne l’ont jamais enseigné !
Il faut tout réinventer, mais on ne part pas de rien. De la petite enfance à la terminale, il existe des initiatives sur l’oral, menées par des enseignants, parfois par des établissements entiers dans le cadre d’un projet pédagogique ambitieux, mais malheureusement de façon marginale. Lorsque j’effectue des sondages parmi les étudiants de Sciences Po, en leur demandant s’ils ont appris à parler en public à l’école, huit à neuf sur dix me répondent par la négative. Il y a néanmoins ces quelque 10 à 20 pour cent qui ont connu une expérience heureuse et fondatrice à l’école. Il faudrait vérifier si de tels chiffres sont corroborés à l’échelle nationale. Lorsque je collabore avec des rectorats, les équipes de l’inspection sont tout à fait capables d’identifier des pratiques pédagogiques orales, certes minoritaires, mais heureuses, qui ont cours dans certains établissements. Il y a intérêt à commencer par là, établir l’inventaire des bonnes pratiques, les analyser, les faire connaître, inciter à s’en inspirer. Et avoir à l’esprit que si l’on remonte plus loin dans le temps, nous avons connu une tradition pédagogique de l’oral, à l’époque médiévale bien sûr, avec la disputatio, mais de façon plus intéressante encore depuis le XVIIe siècle, avec des progressions pensées sur plusieurs années, particulièrement dans les écoles protestantes, jésuites ou oratoriennes dont il y a aussi des enseignements à tirer.
Certains opposants à la réforme du Grand Oral vous disent qu’un élève de terminale ne sera pas capable de parler debout et sans notes pendant cinq minutes. Je crois qu’ils ne posent pas la bonne question. La vraie question, mais aussi la plus dérangeante pour nous est de nous demander pourquoi des enfants qui, à l’école primaire, sont capables de faire des exposés debout, de dire devant toute la classe des mini-nouvelles dont ils sont les auteurs, de jouer des saynètes de théâtre, de déclamer des poésies avec plaisir, perdent cette faculté pendant les années collège. Quel est ce dispositif pédagogique qui ne nous permet pas d’étayer sur les acquis de l’enfance, d’aider l’adolescent à construire avec méthode ce qui a été découvert dans un esprit de jeu ? Alors oui, dès le collège et le lycée, mais aussi bien avant, dès l’école primaire et la maternelle.

Vous faites référence aux neurosciences, en lien avec le théâtre, notamment à propos des neurones miroirs « avec les neurones miroirs, les neurosciences découvrent ce que le théâtre sait depuis longtemps » (p. 12).
Pouvez-vous développer ce point ? Comment le distinguer d’une pratique ordinaire du mimétisme ?

La formule est de Peter Brook, une autre personnalité majeure du théâtre, qui lui-même a mis en scène L’homme qui prenait sa femme pour un chapeau, adapté du livre du neurologue Oliver Sacks. Le dialogue entre art et science, teinté d’humour, ne s’arrête pas là, puisque Giacomo Rizzolati qui, avec ses équipes, a mis en évidence les neurones miroirs en 1990, cite Peter Brook dès la première phrase de l’ouvrage qu’il a consacré à sa découverte. Je doute que les neurosciences renversent la table dans notre compréhension de la parole et de son partage. Elles nous permettent de comprendre plus précisément ce qui est en jeu. Ce que les hommes de l’art, comme Peter Brook, c’est un fait, pratiquent comme règle de l’art et parfois de façon plus exploratoire depuis des millénaires. L’apprentissage par le mimétisme que vous évoquez, présent partout dans le règne animal et chez le petit humain, s’explique justement en grande partie par la mise en évidence des neurones miroirs. Comment un geste que vous faites, même abstrait, déclenche une stimulation électrique dans mon cerveau comme si moi-même j’effectuais ce geste, peut-être pas de même intensité, peut-être pas en stimulant tous les mêmes neurones mais tout de même. À partir de là, c’est toute la généalogie du langage humain qui peut être revisitée et questionnée et les scientifiques ne se privent pas de le faire. Comment nos ancêtres préhistoriques, accédant à la position debout ont pu joindre le geste à la parole ? Est-ce que le geste a précédé, accompagné ou suivi la parole transitive puis abstraite ?

 

Un tel questionnement a-t-il des incidences sur votre pédagogie ?

Ce n’est en effet pas seulement un horizon spéculatif. Cette question intéresse aussi le pédagogue. Si mon geste aide l’énonciation et la formulation, ce que des phoniatres et des pédagogues ont compris bien avant que les neurosciences ne le confirment, on saisit bien qu’un enseignement de l’art oratoire s’adressant à des élèves assis ou les mains dans le dos, ou même les bras le long du corps serait stérilisant. Combien de fois des apprenants me disent « Je ne sais pas quoi faire de mes mains, de mes bras ! ». Or, des formateurs qui ont peu de conscience corporelle n’insisteront pas sur la gestuelle, voire, parfois, pour masquer leur ignorance, glisseront la question sous le tapis, diront : « Oh de toute façon, la gestuelle, cela ne s’apprend pas… » ou encore lâcheront : « Quand on est convaincu par ce que l’on dit, le geste vient tout naturellement… ». La vérité est que la gestuelle, comme la voix se travaillent. L’entraînement réveille les potentialités de chacun, libère des habitudes qui nous limitent, qui sont acquises pour la plupart – et non innées -. Comme pour les autres arts, il faut passer par des gammes, et c’est ce qui va nous libérer. Quand le pianiste se sentira-t-il enfin libre dans son interprétation de Chopin ? Dans un autre domaine, la conduite automobile, au prix de combien d’heures d’apprentissage avons-nous acquis une fluidité au volant ? (Si jamais nous l’avons acquise un jour…) Pour la prise de parole en public, la maîtrise s’acquiert beaucoup plus rapidement et aisément. Il s’agit en moyenne de 10 minutes par jour pendant deux ou trois semaines.

Il faut donc s’entraîner, multiplier des exercices, suivre une méthode…

Mon premier ouvrage, Tous orateurs, chez Eyrolles, co-écrit avec Hervé Biju-Duval, dit comment nous envisageons les choses, comment notre pratique de l’enseignement nous permet de dire qu’elles doivent s’envisager : toute personne, avec un minimum d’entraînement, peut parler en public. L’ouvrage est une méthode, présente des mises en situation, des témoignages exclusifs d’artistes comme Alain Souchon ou Jean-Michel Jarre, d’un journaliste, Ali Baddou, et des exercices d’entraînement.
Le dernier né, Je réussis mon Grand Oral du Bac1, s’adresse spécifiquement aux lycéens de terminale. Je l’ai écrit avec Paul Vialard, compagnon de route et pédagogue comme moi. Et une éditrice, Elisabeth Sanchez, aguerrie à l’écriture de manuels scolaires. Nous avons consacré neuf mois à le composer, à l’écrire et le réécrire – Vingt fois sur le métier… – à l’illustrer, tant l’enjeu de s’adresser au public des élèves, de leur donner les clefs pour parler en public requérait d’être méthodique et précis. L’ouvrage est conçu comme un vade-mecum pour le Grand O, je pense dense, technique et sérieux, tout en étant accessible à tous. Il détaille les enjeux de l’épreuve et de sa préparation, mais a aussi pour objectif de permettre à l’élève de construire étape par étape sa compétence de parler en public. Il présente ainsi une centaine d’entraînements progressifs. Si l’élève conserve ce livre dans sa bibliothèque au-delà de l’année de terminale, parce qu’il estime que cette méthode lui sera toujours utile, nous aurons gagné notre pari pédagogique.

Enseigner l’oral cela ne demande-t-il pas du temps, un apprentissage continué ?

De combien d’heures d’enseignement jouit un élève, de la maternelle à la terminale ? Un paquet compris entre 12.000 et 15.000 heures. C’est juste colossal. Pour ce qui est de l’oral, quelques heures suffisent pour s’approprier les fondamentaux. Une demi-journée en demi-classe. Il y a très peu de prérequis. Certains linguistes et sociologues vous diront le contraire, opposant l’argument du biais social – qui existe – comme une fin de non-recevoir. Ils ne parlent en réalité pas de la même chose. Ils se focalisent sur la linguistique et la maîtrise lexicale, au lieu de considérer l’enseignement de l’oral et ses fondations. On ne peut pas leur en vouloir dans la mesure où cet enseignement de l’oral, ils ne l’ont pas eux-mêmes rencontré. Je crois qu’ils écrivent cela en toute bonne foi, mais dans une connexion très fragmentaire avec le réel. Si vous relisez attentivement Marcel Mauss et Pierre Bourdieu, vous constaterez que les fondateurs ont bien évoqué l’oral comme une technique du corps. Cela pourrait mettre la puce à l’oreille. L’oral est une praxis.

C’est à dire…

C’est une pratique sur soi en relation avec les autres et un processus. La plupart des enseignants de l’oral s’adressent à des publics de tout âge, de toute condition sociale, avec les mêmes résultats, des progrès très rapides de l’apprenant, une maîtrise des fondamentaux en quelques heures. Je travaille régulièrement avec des personnes en situation de handicap. Un collègue et ami vient d’animer un séminaire pour des personnes nées avec une trisomie 21. J’ai encore à l’esprit l’exemple de cette clinique psychiatrique où chaque année, patients et personnels soignants préparent et jouent ensemble une pièce de théâtre : chacun va le chemin, personnel et collectif, semé d’embûches bien sûr, mais qui emmène plus loin. L’oral est le plus inclusif des modes de transmission et d’interaction que je connaisse.

Quel rapport voyez-vous aux apprentissages de l’écrit ?

L’écrit et l’oral sont les deux jambes d’une éducation équilibrée. Il est funeste qu’en France, on ait cru pouvoir éduquer les élèves en leur demandant de courir à cloche-pied, en concentrant l’essentiel des apprentissages sur l’écrit. Je vous ai parlé tout à l’heure de ces écoles primaires où les enfants déclament et interprètent de la poésie. Mais imaginons que la récitation d’une poésie ne soit associée qu’à un exercice de mémorisation. Je récite par cœur et, de fait, je m’arrête au milieu du gué sur le chemin de l’oral. Car le plus intéressant ne vient-il pas après, lorsque l’enfant pourra mettre en jeu sa sensibilité pour interpréter le poème ou la fable ? Au moment où il pourra réellement nourrir son goût de la langue et les interactions avec l’auditoire.

Votre projet, votre démarche sont politiques en même temps qu’éducatifs ?

Il y a dix ans, j’ai publié une tribune dans Le Monde intitulée « Savoir lire, écrire, compter et… parler en public » (parue le 20 octobre 2011). J’enseigne l’art de la parole depuis vingt ans. À la fin de l’année 2020, j’aurais accompagné près de 8000 personnes dans l’acquisition de cette maîtrise fondamentale. Cela peut paraître beaucoup, mais sur vingt ans, ce n’est pas tant que cela. Et si l’on pense aux 67 millions de Français… Oui, c’est un combat.
Il s’agit bien d’un projet politique, une affaire de la cité : donner la capacité de parler en public à tous. Voilà bien une réforme de société, et je ne crains pas de le dire, aussi radicale et progressiste que celle des congés payés sous le Front Populaire, de l’IVG ou de l’abolition de la peine de mort. Une réforme qui concerne aujourd’hui 12 millions d’élèves. Mais je souhaite relativiser le « vous » que vous m’adressez. S’il renvoie à un individu solitaire que je serais, je le récuse. C’est par un prisme trompeur que l’on croit aux réussites individuelles et que l’on oppose la personne au collectif. L’enseignement de l’oral en France ne peut réussir que dans une dynamique collective. J’insiste sur ce point, non par humilité ou par fausse modestie, mais parce que c’est la réalité et parce que le politique naît de ce collectif.

Enseigner ou pratiquer l’oral c’est construire du collectif avant tout ?

Je crois que si, en France, on était davantage attentifs aux conditions de réussite des collectifs, et ce, dès l’école, on ferait des pas de géant. Dans notre histoire récente, on l’a constaté de façon magistrale dans notre façon de répondre à la crise sanitaire qui n’a commencé à être satisfaisante qu’à partir du moment où l’on a restauré le collectif. Les grandes réussites, qu’elles soient économiques, sociales ou artistiques ne sont que collectives. Que serait devenu Picasso sans sa rencontre avec Georges Braque et tant d’autres ? Je vous ai parlé tout à l’heure du creuset dans lequel s’est construit Jacques Lecoq. Revenons à l’enseignement de l’oral qui est une aventure collective. Je ne suis moi-même qu’une personne parmi d’autres pour la porter. Ce n’est pas moi qui ai pris l’initiative de la mission ni qui ai pris la décision du Grand Oral.

Comment s’est concrétisé ce collectif à Sciences Po ?

C’est un compagnonnage sur 20 ans. Une équipe portée au fil du temps par une trentaine de personnes, des universitaires, des comédiens, des chanteurs lyriques, des chorégraphes, qui a mis au pot commun pour spécifier les séquences pédagogiques les plus utiles pour enseigner l’art de la parole à des publics divers. Des universitaires canadiens et suisses, spécialistes en sciences de l’éducation, nous ont également donné de très précieux conseils. Sciences Po est lui-même le creuset qui a permis ces rencontres et l’exploration de cette pédagogie. L’actuel directeur de Sciences Po, Frédéric Mion, ne m’en voulez pas de lui rendre hommage, ce n’est que justice, s’est intéressé de près à ce que nous proposions, nous a fait confiance et a tout fait pour accompagner cette innovation. Il a ainsi créé un Centre d’Écriture et de Rhétorique à Sciences Po au sein duquel nous avons pu nous déployer. Si on ne fait pas confiance à une innovation, si on ne l’accompagne pas dans la durée, elle meurt ! Au-delà de Sciences Po, le rapport de préconisations sur le Grand Oral est encore le fruit d’une intelligence collective qui s’est cristallisée au printemps 2019, où les équipes du ministère et de l’inspection générale ont joué un rôle déterminant.

Convaincre, séduire, captiver un auditoire : quel sens donner à ces verbes ? Qu’en est-il de la dimension « sincère » du message et dans un contexte scolaire du « penser par soi-même », de porter sa propre parole, son ethos, fruit d’une maturation et d’une instruction comme vous le soulignez vous-même ?

Cette question est tout à fait fondamentale. Comment favoriser la parole propre de l’élève à la faveur du Grand Oral qui est aussi un oral de maturité pour reprendre la formule de Pierre Mathiot. Certains, reproduisant ce qu’ils ont eux-mêmes connus, rêvaient d’en faire un petit oral d’agrégation. Inutile de dire que si l’on transforme le Grand Oral en interrogatoire de connaissances et que l’on fait des jurys des juges de touche, on n’aura rien accompli et on ira droit dans le mur. Le plus intéressant pour le jury est de se positionner comme accompagnateur, plus du côté de la maïeutique socratique que du quizz. Le jeune adulte en face de moi, comment puis-je l’aider à aller plus loin dans sa réflexion sur sa question et sur son projet ? Ce regard exigeant mais bienveillant est indispensable pour susciter un échange de qualité. Mais il ne suffit pas.

Il y a aussi ce qui se joue du côté de l’élève…

Exactement. Et bien en amont, dès le choix des questions par l’élève. Là se jouera déjà 50 % du succès pour chacun. Une idée géniale (et je peux d’autant mieux le dire qu’elle n’est pas de moi) est que le lycéen doive articuler le choix de ses questions à une réflexion sur son parcours et ses souhaits d’orientation. Si le lycéen part de lui-même, de sa curiosité, de la façon dont il se projette pour définir sa question, avant de chercher le lien avec le programme de spécialité, nous sommes dans la bonne dynamique.

Cela n’est-il pas garanti ? La démarche projet s’inscrit dans cette perspective…

L’expérience nous a appris le contraire. Si l’élève est incité à choisir parmi une liste de 30 sujets établis à l’avance par l’enseignant, comme cela s’est vu lorsque la pratique des TPE était dévoyée, ou pis encore, parmi des sujets glanés ou achetés sur internet, on a peu de chance de susciter son adhésion au projet éducatif du Grand Oral. Permettez-moi de prendre un exemple personnel. À l’automne dernier, j’ai effectué à la demande d’un chef d’établissement, un pilote avec une trentaine d’élèves de première. À 8 h, la plupart étaient dans le brouillard pour le choix de leur sujet et pour tout dire, très peu motivés. L’un d’eux était même assis de travers m’opposant presque son dos, signe qui ne trompe pas un enseignant en début de séance.

……

J’ai d’abord voulu sauver ma séance. Nous étions début novembre. Je ne connaissais rien du texte officiel qui est sorti en février. Je leur ai dit : « Partez de vous, pas du programme de spécialité, après on verra ». Puis nous avons partagé les fondamentaux (la posture, le regard, la respiration) de façon à ce qu’ils aient les repères pour parler debout devant les autres, objectif pédagogique de la session, à la fin de la matinée. À la pause de 10 h, le même qui me tournait le dos vient me trouver. Il me dit :
« Je fais du basket, en fait, je suis même basketteur de haut niveau. Est-ce que vous pensez que je peux faire quelque chose sur « le corps du basketteur » ?
– C’est-à-dire ? je lui demande.
– Eh bien, quelle est la part de l’inné ? la part due à l’entraînement ? Existe-t-il des normes concernant ce corps du basketteur ? »
J’ai évidemment trouvé la proposition excellente. Comme ce lycéen envisageait une spécialité en SVT et en Physique, les passerelles avec le programme étaient massives : le génome, l’analyse du mouvement, etc. Ce jour-là, à l’issue de la session, les 30 élèves de première étaient capables de parler pendant 1 à 3 minutes du sujet qu’ils avaient choisi, debout devant les autres. Et cela avant les dizaines d’heures de travail que requerra la préparation du Grand Oral. Je crois que dans l’ensemble, les élèves et les enseignants peuvent être confiants dans ce choix personnel de départ. Cela peut faire peur bien sûr. Comme enseignant, on se dit qu’on ne maîtrisera pas tous les sujets, etc. En vérité, on va gagner un temps considérable, tout simplement parce que l’élève sera motivé et que l’on aura simplement à l’accompagner.

Ne craignez-vous pas de voir fleurir des sujets fantaisistes et/ou de peu d’intérêt ?

Il y a bien sûr une contrepartie au choix du sujet par l’élève et que les enseignants de spécialité auront bien sûr à valider. Outre le lien avec le programme qui va inciter l’élève à s’en enquérir de façon active, il y a l’étape fondamentale de la documentation. De la qualité de celle-ci dépend la qualité du travail qui suivra et qui pourra mûrir sur de longs mois. Recueil de données, sitographie, bibliographie. Plus que jamais les CDI seront le poumon du lycée. Il est donc tout naturel que les textes officiels aient prévus que les professeurs documentalistes qui sont responsables de la formation des élèves à l’information-documentation, à l‘éducation aux médias et à l’information puissent faire partie des jurys.

La distanciation physique en situation de pandémie ne fait-elle pas écran à l’interaction ? Ne nous amène-t-elle pas à revoir l’approche ?

Vous m’auriez posé la question en février, je vous aurais répondu qu’il était impensable d’enseigner la prise de parole en public à distance. Et puis… le confinement est venu… Comme les autres collègues, j’ai été mis au défi de m’adapter. Au total, j’ai donné une cinquantaine d’heures d’enseignement à distance en art oratoire, de fin mars à fin avril, à des étudiants qui participaient simultanément au même cours, qu’ils soient en France, au Liban, aux États-Unis ou en Asie. Et j’ai constaté que cela fonctionnait très bien. Tout simplement parce qu’il s’agit d’une pédagogie active et que les outils numériques mis à disposition permettent les interactions. Alors, oui, il faut d’emblée envisager des formations à distance, non seulement en prenant en compte le risque d’un nouveau confinement, mais tout simplement parce que désormais, avec ou sans pandémie, les élèves auront à être éloquents en présentiel comme dans la réalité virtuelle. Animer un webinaire, se présenter par une vidéo, participer à un entretien à distance ne s’improvise pas. Comme pour le reste, il y a des techniques à connaître et des apprentissages à construire.

La rentrée, c’est la reprise, après plusieurs mois d’interruption ; la priorité peut-elle être sur l’oral alors que la question de la remédiation est aussi posée ?

Il y a bien sûr la question de la distanciation physique et des préconisations sanitaires à respecter qui vont sans doute continuer à varier dans le temps et selon les territoires. Mais la crise sanitaire ne signifie pas une injonction soudaine à se taire. Je crois au contraire qu’après ces longs mois d’interruption, pour certains élèves dont la scolarité en pointillés a pu commencer dès décembre 2019, l’oral est stratégique. L’enjeu est bien de retrouver une dynamique de classe, la confiance et la bienveillance qui permettront de travailler. L’erreur serait de se précipiter sur les programmes comme s’il ne s’était rien passé. Ce qui s’est produit est majeur et a concerné, dans le monde entier, toutes les générations. Il y a un intérêt à partir de là. Cet événement, comment les élèves l’ont-ils vécu ? Qu’en pensent-ils ? Qu’ont-ils à en dire ? La parole et la qualité d’écoute qui l’accompagnera, on le sent bien, vont être décisives. Si vous profitez de ce moment, pour partager en une demi-journée, les techniques fondamentales pour l’oral (posture, respiration, regard, présence vocale, relation à l’auditoire), vous donnez aux élèves une compétence nouvelle. Ils en constateront l’effet sur eux quasi immédiatement, ils vous en seront reconnaissants. Nous nous donnons les moyens, en une demi-journée, de remettre tout le monde le pied à l’étrier.

Cyril Delhay

 

 

Déambulations Jansoniennes

Un atelier de pratique artistique théâtre réunit depuis huit ans 25 lycéens issus de tous les niveaux jusqu’aux classes préparatoires. Ils sont encadrés par une comédienne et un comédien en alternance. Stéphanie Ruaux et Laurent D’Olce. À l’occasion de la Nuit de la lecture1 le 18 janvier dernier, nous avons proposé aux élèves de l’atelier de travailler sur les grands discours. L’objectif était de leur faire comprendre que savoir exprimer ses idées est une force et savoir prendre la parole un pouvoir.

L’année s’organise en deux temps : de septembre à janvier, un travail approfondi est effectué sur le corps, la voix, le travail d’improvisation et le jeu collectif. En janvier, un événement est organisé soit dans le cadre de la Nuit de la lecture en partenariat avec le ministère de la Culture, soit sous la forme d’un spectacle théâtral. Cela nous permet d’intégrer les élèves de CPGE qui ne peuvent plus suivre l’atelier à partir des mois de mars-avril en raison de la préparation des concours. Par la pratique de cet atelier théâtre « Grands discours », ils ont ainsi pu ressentir l’articulation et le développement des idées écrites par leurs auteurs.
Du Discours sur la misère de Victor Hugo jusqu’à celui prononcé par Greta Thunberg à la COP 24, les élèves ont pu mesurer l’investissement nécessaire pour que ces discours soient compris par leur auditoire. Il leur avait été demandé de les apprendre par cœur, afin que leurs regards puissent être libres et qu’aucun pupitre ne soit nécessaire. Ce fut donc un travail « sans filet », car la présence d’un texte papier sur un pupitre constitue une béquille à laquelle il est rassurant de se raccrocher, comme le note un élève : « J’ai peur de regarder le public, je replonge dans mon texte, je ne sais pas quoi faire de mes mains, je tiens le pupitre ».
On ne se rend jamais assez compte à quel point le plus dur est de rester les bras le long du corps et d’assumer cette position : cela demande une assurance et une confiance en soi, une vraie capacité à reprendre son souffle en toute sérénité sans pouvoir se cacher d’aucune manière et c’est ce travail que nous avons proposé aux élèves.
Pour pouvoir rythmer cette présentation, car il ne faut jamais oublier le public, certains textes ont été répartis entre deux ou trois élèves. Nous avons agrémenté le parcours de deux scènes extraites d’œuvres de Molière en lien avec le langage : celle du Mariage forcé dans laquelle le débat est de savoir s’il faut dire « la forme » ou la « figure » d’un chapeau, et la scène bien connue du Bourgeois Gentilhomme au cours de laquelle Monsieur Jourdain découvre qu’il parle en prose.
Dans le cadre très particulier du lycée Janson de Sailly, fort d’un beau patrimoine historique, nous avons choisi une forme déambulatoire, afin que les élèves puissent s’approprier des lieux auxquels ils n’ont pas toujours accès, que ce lycée devienne encore un peu plus le leur et qu’ils puissent partager ce plaisir avec le public constitué en grande majorité de leurs parents et amis.
Les salles traversées ne comportant évidemment pas de scènes, afin que les élèves soient bien visibles depuis n’importe quel coin de la salle, nous avons choisi de les faire s’exprimer debout sur des tables, ce qui augmentait pour eux la sensation d’être « exposés », mais aussi le devoir d’être en maîtrise de ce que nous appelons au théâtre notre « instrument » : notre corps et surtout notre voix.
Les élèves ont été admirables dans leur engagement et la fierté qu’ils ont eu à faire cette représentation « chez eux », dans leur lycée, était très belle à voir.

Le Mariage Forcé ( Molière et Lully )

 

 

« Booktubes » La critique littéraire vidéo pour développer l’oral

C’est dans cette perspective que j’ai proposé à une collègue enseignante d’anglais, et en direction d’une classe de seconde, le projet « Booktubes1 » , une pratique médiatique bien connue des professeurs documentalistes qui permet de promouvoir une œuvre littéraire et de développer des échanges autour de pratiques de lecture à partir de courtes présentations vidéo de l’ouvrage. Le plaisir suscité auprès des élèves par ce type de projet, lors d’une précédente expérience en lycée, m’avait confortée dans ce choix.

Déroulement du projet

Après la présentation de l’intention pédagogique, nous avons remis à chaque élève un livret contenant les modalités du projet : dates-échéances, fiches conseils, ainsi qu’une description de la production demandée. Ces supports pédagogiques devaient être disponibles à chaque séance afin d’accompagner le travail en autonomie. Les élèves devaient ainsi réaliser une vidéo d’environ 3 minutes avec pour finalité de donner envie de lire un livre en langue anglaise issu du fonds documentaire du CDI. Le booktube devait être structuré en trois temps : présenter le livre choisi, donner un résumé du récit sans pour autant trop le dévoiler, décrire les principaux personnages, expliciter le genre ainsi que le style pour conclure par un avis de lecture argumenté qui incite à emprunter le livre. Dans ce type de projet nécessitant une durée de lecture importante et un temps court pour la réalisation finale, le choix des livres est une étape qu’il ne faut pas négliger. Il faut en effet éviter tout changement en cours de projet qui mettrait l’élève en difficulté par rapport au temps imparti. Ensuite, nous avons visionné avec les élèves plusieurs booktubes afin de réfléchir aux critères de réussite de cette présentation orale : regarder son auditoire (la caméra) pour lui adresser un message, être pleinement convaincu du discours que l’on porte, exploiter les ressources expressives et créatives de la parole en variant le ton, en marquant les silences, énoncer clairement ses propos…

De l’écrit à l’oral

Nous avons ensuite proposé une grille d’évaluation afin de guider l’élève vers un oral en langue vivante étrangère réussi. Une fois la lecture de l’ouvrage terminée, les élèves remettent dans un premier temps une fiche de lecture à l’enseignante d’anglais. Cette première production documentaire sert de matériau pour l’écriture du scénario de la vidéo conduisant les élèves à effectuer un exercice de synthèse de la fiche et à en exploiter des éléments pertinents pour la construction d’un argumentaire. Pour rendre leur vidéo percutante, les élèves doivent également réfléchir à une phrase d’accroche ainsi qu’à une conclusion dynamique de la vidéo. La mise en scène joue un rôle déterminant dans la réussite de la vidéo. Cet aspect a permis d’introduire quelques règles cinématographiques et conseils de tournage. Les productions sont individuelles, mais la réalisation se fait par binôme (l’un filme, l’autre présente son ouvrage). Une fois le scénario finalisé et corrigé, les éléments scéniques fixés, l’entraînement à l’oral peut commencer.

BookTube 2019 2020 : Julien. https://youtu.be/49gCFI_l4pg

Le booktube, un genre au service de l’oral

Pour réaliser la vidéo booktube, l’élève est amené à créer une situation scénarisée où il endosse le rôle d’un personnage, celui du booktuber, chroniqueur littéraire, qui se met volontiers en scène, face caméra, pour faire la promotion d’un livre. Humour, proximité avec le spectateur sont mis au service du discours, afin de convaincre de la pertinence de lire un livre. L’élève peut ainsi prendre de la distance, il interprète un rôle, celui du critique ; ce jeu de personnage à endosser protège d’une certaine manière l’élève et lui donne le sentiment de moins s’exposer personnellement. Cela contribue à réduire les appréhensions.
Le choix aussi de demander des productions individuelles permet à l’élève de s’entraîner, de se filmer sans s’exposer immédiatement au regard de la classe, de multiplier les prises de vue, au CDI ou chez soi. Les vidéos sont autant de traces tangibles à partir desquelles l’élève pourra prendre conscience de sa performance et recevoir des retours d’un camarade et des remédiations. Les enseignantes adoptent dans ce projet une posture d’accompagnement en apportant conseils et observations. Les situations d’entraînements, mises en œuvre au CDI, en binôme choisis (je filme mon camarade qui s’auto-évalue d’abord, puis je lui fais un retour constructif et inversement) favorisent la collaboration entre les élèves et l’autonomie. Trois séances d’entraînement à l’oral des élèves ont permis à toute la classe de se filmer, et de recevoir les retours des enseignantes. Nous avons utilisé les tablettes Android de l’établissement ainsi que les téléphones des élèves pour filmer et effectuer le montage à l’aide de l’application « Filmora Go », qui est gratuite et simple de prise en main. Disponible sur les plateformes Android et iOS, cette application permet d’effectuer des incrustations de textes, d’images, de vidéos et d’appliquer des effets visuels et sonores rendant les vidéos dynamiques. Une fois envoyées aux enseignantes, les vidéos sont évaluées sur la base de la grille d’évaluation remise au début du projet, et qui a également servi de grille d’observation durant les entraînements et le tournage des vidéos.

Regards sur le projet

Les élèves se sont montrés impliqués tout au long du projet ; l’attrait pour la vidéo, un média qui leur est familier, a contribué à les motiver. Les entraînements à l’oral organisés au CDI ou effectués hors du lycée ont permis aux élèves de progresser dans leurs compétences orales et d’améliorer leur confiance en eux-mêmes. Du point de vue des apprentissages info-documentaires, ce projet a permis d’aborder avec les élèves les notions d’auteur et de droit de l’information ainsi que les licences libres par l’usage des banques d’images et de sons libres de droits. Par ailleurs, les élèves ont publié une vidéo de présentation du projet sur le fil Twitter de l’établissement2, afin de partager leurs réalisations. À travers ce projet, nous avons souhaité rendre les élèves davantage actifs dans leurs apprentissages et développer une dynamique motivante pour progresser à l’oral. La réalisation des booktubes est aussi pour nous enseignantes, l’occasion d’expérimenter une approche multimodale des compétences info-documentaires. Celle-ci convoque les langages dans leur diversité : l’écriture, l’image, l’expression et leur médiatisation. Elle prend sens pour les élèves car elle s’inscrit naturellement dans une culture audiovisuelle développée dans des pratiques informationnelles personnelles. La vidéo opère aussi une médiation aisée vers la littérature et la lecture : elle offre, après explicitation et premières tentatives, un cadre propice à la prise de parole, très vite rassurant. L’élève peut se tromper, bafouiller, l’enregistrement sera effacé puis repris jusqu’à la maîtrise de l’expression. Le visionnage proposé individuellement ou par groupe engage l’élève dans un processus d’autoévaluation et d’écoute active, il lui permet de prendre conscience des éléments qui structurent une bonne expression orale : articulation, souffle, intonation, construction et narration de l’écrit oralisé, argumentation, conviction et persuasion : ces compétences communicationnelles essentielles que les lycéens devront mobiliser au-delà du Grand Oral, tout au long de leur vie.

 

 

 

 

 

Si on lisait… à voix haute

Présentation du concours

Ce mercredi 18 septembre, François Busnel lance un concours, un peu comme un défi d’ailleurs, puisqu’il fait le vœu de faire lire à voix haute un maximum de collégiens et lycéens.

Le principe est le suivant : les enseignants motivés par ce projet inscrivent une ou plusieurs de leur classe et s’engagent à travailler avec les élèves la lecture à voix haute comme ils le souhaitent. À leur convenance, ils organiseront ensuite la sélection d’un représentant pour chacune de leur classe, qui enregistrera alors dans l’établissement une vidéo de 2 minutes d’une lecture d’un texte de son choix, à voix haute.

Cette expérience mettant en avant la lecture, la littérature, l’oralité ne peut que séduire une amoureuse des livres. Dès le lendemain, j’envoyais un mail à l’attention des enseignants de lettres de l’ensemble scolaire dans lequel je travaille, pour leur présenter le projet. Le jour-même deux enseignants répondaient avec enthousiasme : un professeur pour une classe de seconde et un autre pour une classe de 1re. Le 26 septembre, je procédais à l’inscription sur le site dédié et, le 2 octobre, j’avais un mail de confirmation de notre participation au concours.

Pourquoi le professeur documentaliste dans un tel concours ?

Participer à ce projet permet, avant toute chose, un travail en interdisciplinarité avec des collègues sur le thème de l’oralité. La réforme du bac met très clairement l’accent sur cette compétence que les élèves doivent acquérir au cours de leur scolarité, en vue d’une évaluation sommative en fin d’année de terminale appelée « Grand oral ». La mise en application effective, dès la seconde, du travail de l’oral (quelle que soit la forme qu’il prend), bien que présente dans les programmes de toutes les disciplines, n’est pas forcément une réalité de terrain. La lecture à voix haute est donc une occasion parmi d’autres de former des élèves à une pratique de l’oralité.

La lecture partagée engage la relation avec les autres. Elle implique, elle impose de se dévoiler, rien que par le choix de son texte. Les jeunes disent quelque chose d’eux, parfois même de très personnel. Ce partage, tel un don, est propice à la découverte d’un texte, d’un livre, d’un auteur. Pour eux, et pour nous aussi, il faut le dire ! Un nouvel univers s’ouvre devant certains…
Ces moments créent un lien fort entre les élèves, et aussi entre eux et nous. Une complicité naissante qui annoncera d’autres échanges par la suite : des conseils de lectures, des emprunts même au CDI, des suggestions d’achats, un dialogue.
Enfin, je dirais que ce concours est une occasion supplémentaire de promouvoir la lecture auprès des jeunes. En tant qu’enseignants documentalistes, nous sommes habitués à monter des projets pédagogiques, des animations, à participer à des temps forts nationaux (la Nuit de la lecture par exemple) autour de la lecture.
La lecture personnelle, le plus souvent individuelle et silencieuse, est mise en avant. Nous la mesurons, chaque année, en éditant les statistiques d’emprunts lors des bilans. La fréquentation du lieu aussi, car tous n’empruntent pas, mais un certain nombre de nos lycéens lisent sur place.
Une lecture collective aussi, est organisée, parfois. C’est le plus souvent le professeur documentaliste le narrateur. Quelquefois les élèves.
Là, les élèves sont au centre du projet : ils seront les lecteurs. Ils défendront leur texte. Ils seront la voix des écrivains.
Ce qui suppose, bien sûr de les y préparer. Comment ?

La mise en œuvre du projet

Elle s’est organisée de façon distincte entre les deux classes, les deux enseignants et les deux niveaux : adaptation oblige à la personnalité de chacun, et surtout aux objectifs visés, tout en ayant un souhait commun, dès le départ, celui de permettre à ces deux classes de se mesurer entre elles à un moment donné !

En classe de seconde, nous avons tout naturellement intégré la lecture à voix haute à l’ensemble de notre projet d’année avec l’enseignant de lettres, Monsieur Saladin. Nous avions déjà, au mois de juin, décidé de placer l’oral au centre des apprentissages du programme de français.
Notre progression débutait par des exercices progressifs d’acquisition de savoir-être à l’oral, sur les heures de demi-groupe en français :
– la posture pour s’exprimer (debout ou assis, se tenir droit, apprendre à respirer, placer sa voix, modérer les tonalités) ;
– le rythme (la ponctuation, les silences, les modularités des intonations…) ;
– la gestuelle (rester stable sur ses pieds, bien ancré dans le sol, les quatre pieds de la chaise posés au sol, les mains posées sur la table ou le long du corps…) ;
– le langage (repérer les tics verbaux, les astuces pour y remédier, s’exprimer clairement, utiliser un niveau de langage adapté) ;
Nous avons ensuite travaillé le savoir-faire. Quels sens peut-on donner à un texte en fonction de l’intonation que nous utilisons ? Se questionner d’abord, analyser, avant de passer à l’action.
Après avoir repéré les différentes formes de discours, et visionné plusieurs extraits de discours (Barack Obama…), nous avons établi avec la classe, une grille de conseils pour adapter l’intonation, le rythme aux intentions de l’auteur du texte. Naturellement, nous en sommes venus aussi à évoquer les émotions que l’on peut transmettre à la lecture d’un texte, ce qui va lui donner tout son sens et sa force.
Parallèlement, nous avons présenté à la classe le concours de La Grande Librairie. L’accueil a été très positif. Les élèves devaient chercher pour le retour des vacances de la Toussaint, un extrait d’un texte de leur choix qu’ils liraient devant toute la classe au mois de novembre. Nous ne pouvions y consacrer trop de temps sur les heures de cours de français. Aussi, nous leur avons demandé de s’entraîner à lire un extrait d’une minute maximum.
Nous leur avons projeté en classe entière la vidéo de trois acteurs promulguant leurs conseils pour une bonne lecture à voix haute.
Et je leur ai fourni les critères d’évaluation sur lesquels ils seraient sélectionnés, les mêmes que ceux demandés par le concours.

En classe de première, en raison du programme à respecter en vue du bac, nous n’avons pas pu y consacrer le même temps.
L’accueil a été lui aussi très enthousiaste par la classe dans son ensemble. Le challenge à relever, le sentiment d’avoir été “choisi” pour représenter l’établissement au niveau national, leur plaisait bien. On pourrait même dire que cela les amusait. Ils ont aussi très vite compris leur intérêt à court terme, puisqu’à l’oral de l’EAF, la lecture d’un texte est une compétence évaluée.
Avec le groupe de lycéens latinistes j’ai pu aborder un travail sur le souffle, la posture, la diction et l’intonation au moyen de petits exercices. Le professeur de lettres, Monsieur Meunier, avait, quant à lui, travaillé avec l’ensemble de la classe sur les émotions qui se dégagent à la lecture d’un texte. Par habitude, une fois par semaine, il leur lisait aussi un extrait d’un livre contemporain, pour leur donner le goût de la lecture, et aiguiser leur curiosité. Apprendre par l’exemple…
Comme pour la classe de seconde, nous avons visionné tous ensemble la vidéo de conseils de lecture proposée par La Grande librairie, et nous leur avons remis la grille d’évaluation.

Nous avons procédé ensuite de façon similaire pour les deux classes. Nous avons décidé que le choix du représentant devait se faire par les pairs. Tout le monde tentait sa chance. Le vote se faisait individuellement, sur feuille et pour un autre que soi ! Nous avons établi des règles de respect indispensables au bon déroulement de la sélection : interdiction de se moquer, de faire du bruit pendant la lecture ou de perturber d’une quelconque façon le lecteur.
Deux heures ont été nécessaires pour entendre tout le monde, initialement une seule séance d’une heure avait été envisagée… La présentation du texte et de l’auteur, les applaudissements, les quelques rapides conseils de lecture que nous donnions, ont eu raison de notre timing ! Nous avons fait le choix de retenir pour une finale à venir, les 8 élèves ayant obtenu le plus de votes dans chaque classe.

S’exposer au regard et à l’écoute des autres n’est pas aisé et certains élèves pouvaient rencontrer des difficultés, une gêne compréhensible. C’est une prise de risque, où le jeune se dévoile. Nous nous devions de les rassurer et de les mettre en confiance afin que ce moment soit avant tout un moment de partage.
Les élèves ont donné le meilleur d’eux-mêmes en se prenant au jeu.
Les textes lus furent variés. Avec la classe de seconde nous avons pu écouter des extraits lus de L’Étranger d’Albert Camus, de Dom Juan de Molière, des Contemplations de Victor Hugo, de L’enfant qui ne pleurait pas de Torey L. Hayden et des poèmes de Baudelaire, à plusieurs reprises. En première, leurs choix se sont portés sur Petit Pays de Gaël Faye, Le mariage de Figaro de Beaumarchais, Le Chevalier inexistant de Italo Calvino, No et moi de Delphine de Vigan ou encore Jules Verne et son Voyage au centre de la terre.
Début décembre, une fois les 8 finalistes connus dans chaque classe, j’ai organisé une séance de travail de lecture des textes sélectionnés avec ces élèves sur la pause méridienne au CDI. Nous avons lu ensemble à partir de conseils généraux de lecture que j’avais répertoriés sous la forme d’une fiche, conseils que j’ai, à la suite de leur lecture, personnalisés. Chacun a annoté son texte. Ces exercices d’appropriation et d’interprétation ont été répétés à plusieurs reprises. Certains lecteurs sont revenus par la suite s’isoler dans une bulle de travail au CDI et répéter ou me faire écouter leurs progrès.
La sélection finale était pour nous l’occasion que les deux classes se mesurent à la manière d’une “battle” afin de créer une émulation. Les élèves attendaient ce moment comme un événement ! Ils ont voté pour un élève de chaque classe en cochant les cases d’une grille (voir encadré). Celui ou celle qui remportait le maximum de voix serait le représentant de sa classe au concours “Si on lisait à voix haute”. C’est ainsi que Philippine L. a séduit l’auditoire avec sa lecture de Enivrez-vous de Charles Baudelaire en seconde, et Hadrien en première, avec celle du poème du capitaine Clément Frison-Roche, Pour que vive France.
Chacun d’eux a retravaillé sa lecture sur nos conseils croisés, avant d’enregistrer la vidéo. Le dépôt sur la plateforme dédiée se terminait le 9 février 2020.
L’attente a été longue pour les deux jeunes, impatients de savoir s’ils seraient demi-finalistes parmi les 140 000 élèves participants (collégiens et lycéens confondus).
Verdict par mail (et à La Grande Librairie) le mercredi 4 mars : Hadrien est sélectionné ! C’est une immense joie pour lui, sa classe et nous aussi. Dorénavant, c’est tout le niveau première qui est derrière lui, par solidarité.
Philippine est un peu déçue, forcément. Mais elle en a retiré de la confiance en elle et la fierté d’avoir représenté ses camarades, en donnant le meilleur d’elle-même.

Nous continuons l’aventure avec Hadrien, pour le faire progresser et essayer de l’emmener le plus loin possible. Nous souhaitons vraiment, le professeur de Lettres et moi-même que le prochain texte soit, à nouveau, un choix personnel. Cela ne donnera que plus de force à sa lecture. Nous lui demandons de nous en proposer trois dans un registre différent afin qu’on le conseille au mieux. Ses propositions sont les suivantes : Lettre d’Alphonse de Lamartine à Mary Anne Birch, l’Enfant de Victor Hugo (poème) et La Bonne Chanson de Verlaine (poème). Comme il avait déjà lu un poème pour sa première vidéo, nous lui avons conseillé de choisir la lettre d’amour.
Le travail sur le texte, s’est ensuite effectué à distance, en raison du confinement. Nous avons échangé par mail tous les trois. Hadrien réalisait des vidéos de sa lecture qu’il nous partageait et que nous renvoyions avec des annotations parfois secondes par secondes. La date de rendu de la vidéo était maintenue au 3 avril 2020 sur la même plateforme. En plus de la lecture de 2 minutes maximum, il fallait que le jeune se présente et justifie le choix de son texte. Notre collaboration a porté ses fruits et nous avons tenu les délais.

Le 14 avril, à 21 h, après une journée à guetter les mails assidûment, nous avions les noms des 12 finalistes (6 collégiens et 6 lycéens). Hadrien n’en faisait pas partie. Dommage ! L’aventure s’achève pour nous. Enfin, presque. L’élan inspiré par notre participation à cette aventure collective, nous pousse à suivre la fin du concours. Sur le site dédié, nous visionnons les vidéos des finalistes.

Et nous ne manquerons pas la finale retransmise à la télévision, comme Hadrien, Philippine, les autres élèves des deux classes, ainsi que beaucoup d’autres jeunes de l’ensemble scolaire Notre-Dame de Bury.

De l’intérêt de la lecture à voix haute au lycée

Participer à ce concours, c’est d’abord un projet de classe, qui permet au groupe de se constituer et d’expérimenter le partage (des textes, des avis), la bienveillance (séance de passation orale face à la classe entière), l’émulation aussi puisqu’ils vont voter pour la meilleure lecture. Autant de savoir-être qui forment les futurs adultes pour la vie en société.
La lecture à voix haute fait glisser la littérature du domaine des disciplines “intellectuelles” à celui de l’expérience, de la vie, du plaisir, du partage et de l’émotion. L’expérience d’un (petit) instant de grâce.
La possibilité, ensuite, de choisir son texte, ouvre le champ à l’ensemble du territoire des genres : de la littérature de l’imaginaire, au polar, en passant par la poésie… Au regard des textes choisis, cela confirme, par exemple que le supposé dédain des jeunes pour la poésie ne se vérifie pas dans les faits. Nombreux sont les choix qui se sont portés sur des poèmes ; cela invite donc à repenser les modalités d’approche de la poésie en classe.
Enfin, c’est aussi le moyen d’inscrire l’acte de lecture, de lui redonner de l’importance, en prenant le temps…

 

 

L’oralité en poupe

Le professeur documentaliste, un pluri-métier

Devenue professeure documentaliste par hasard et nécessité, j’ai toujours eu à cœur de transmettre aux élèves ce en quoi je crois, fondé sur le bon sens et la mise en œuvre d’outils pédagogiques simples et accessibles. Embauchée à Saint Michel de Picpus1 en 1992 pour mes compétences d’animation culturelle, je crée et développe des échanges linguistiques pour le collège et le lycée, bâtissant des échanges durables au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Australie, répondant ainsi au besoin d’immersion linguistique des élèves, dans un cadre privilégié de pratique quotidienne. Ralliant l’enthousiasme des élèves et des parents, ces échanges ont pour but de créer au-delà des frontières culturelles, géographiques et linguistiques, des relations amicales dont certaines durent toujours. En 2010 j’intègre le collège EIB2 davantage ouvert à l’international.
La communication est au cœur de mes préoccupations. Communiquer, en langue étrangère ou dans sa propre langue, est un atout fondamental pour prendre sa place dans la société et s’y mouvoir avec aisance. Savoir regarder les autres en face, ne pas avoir peur de soi-même, jouer avec ses émotions, apprivoiser ses failles, tout cela s’apprend. Acquérir ce savoir-faire stimule les facultés cognitives et ancre durablement les apprentissages scolaires. Savoir prendre la parole en public décuple la confiance en soi.
Si tout le monde n’est pas outillé de la même façon, chacun peut réussir, si tant est que les conditions d’apprentissage soient au rendez-vous. Déconstruire également les stéréotypes qui assimilent la compétence orale à une caractéristique intrinsèque de l’être humain, au même titre que la couleur des yeux, est nécessaire. Forte de ce credo, je propose depuis plus de dix ans aux professeurs volontaires de travailler avec eux sur la prise de parole en public en fonction de leurs programmes et de leurs besoins. Inventive et créative, je m’adapte aux situations et fais feu de tout bois !
Je tiens à préciser que mon expertise de l’oralité s’inscrit dans une pratique du slam débutée il y a six ans à laquelle s’ajoute une dynamique de formations successives contribuant à nourrir et à diversifier mes outils, à savoir des formations proposées par le PAF spécifiquement consacrées à la pratique théâtrale dans des lieux tels que le théâtre Monfort et la Comédie-Française où j’ai eu la chance de rencontrer des formatrices soucieuses de donner des exercices faciles à mettre en place en classe entière, une licence professionnelle d’Encadrement d’Ateliers de Pratiques Théâtrales3 obtenue il y a trois ans et un master Théâtre4 en cours, débuté l’année dernière dans le cadre d’un congé formation.

La communication orale, une compétence qui se travaille

Riche de toutes ces formations outils, je propose régulièrement à tout professeur motivé de travailler l’oralité en fonction des besoins des élèves et au regard de leurs programmes. Si le collège EIB, situé dans le 17e arrondissement, près du métro Courcelles, draine une population très privilégiée, aux origines ethniques variées5, il n’en demeure pas moins que tous les élèves ont besoin de s’entraîner à la pratique de l’oralité. Pour certains, il est compliqué, voire presque impossible de prendre la parole en public, car leur culture d’origine ne les y encourage pas. C’est pourquoi il est très important de faire travailler tous les élèves – pas seulement les volontaires -, et de varier les conditions d’entraînement en alternant petits groupes en autonomie, cercle collectif et accompagnement individuel.
Pratiquer l’oralité induit une exposition au regard de l’autre, une mise à nu qui peut être à la fois réjouissante et perturbante. Dans un groupe Il y a toujours des élèves partants pour prendre la parole, voire l’accaparer, d’autres qui, au contraire, soi-disant à l’aise, vont faire les guignols, et puis il y a toutes celles et ceux qui voudraient disparaître, comme neige au soleil. La mise en œuvre de ces activités d’oralité fondées sur un dévoilement de l’intime peut s’avérer parfois déroutante pour l’élève, le groupe ou le professeur. Des exercices qui fonctionnent avec tel groupe ne fonctionnent pas nécessairement avec tel autre. Il importe alors de conclure au mieux et d’essayer de comprendre ensemble avec les élèves pourquoi cela n’a pas fonctionné. Et, ce faisant, les professeurs partenaires poursuivent sous une autre forme l’apprentissage et l’exercice de l’oralité.

Création de tableaux vivants ; La mort marraine de Grimm, classe de 6e, 2018

Des projets aboutis, des élèves valorisés

-> Projet René de Obaldia

Se relier les uns aux autres, aller à la rencontre de personnes ressources, nouer des contacts est au cœur de notre métier. Grâce à mon libraire de quartier, j’ai pu rencontrer René de Obaldia et lui demander de venir soutenir nos élèves de 6e impliqués dans un travail d’interprétation à partir de son recueil de poésie Innocentines6. En collaboration avec leur professeur de français, j’ai demandé aux élèves de choisir une poésie et de l’apprendre par cœur. Certains se sont mis par groupe de deux ou trois. Le travail portait sur l’extériorisation du texte par le corps. Ensemble, par petits groupes, les uns au CDI, les autres en salle de classe, nous avons cherché quels gestes, quelles intonations pouvaient faire sens dans leur interprétation. Environ 4 séances ont été nécessaires. Une fois que tous les élèves sont parvenus à créer leur propre univers poétique, nous les avons regroupés en classe entière et nous leur avons demandé de réfléchir à l’articulation et au déroulement des poèmes dans l’espace. Ayant la chance de disposer d’un petit théâtre à proximité du collège, les élèves ont pu répéter deux fois avant la restitution finale. Le jour J, René de Obaldia a pu voir des élèves, confiants et heureux, capables de se mouvoir dans l’espace en tenant compte de leurs partenaires et du public. À la fin de la représentation, l’auteur nous a fait la très grande joie de nous dire des poèmes. Face à la réussite de ce projet, nous l’avons reconduit l’année suivante et René de Obaldia nous a fait de nouveau l’honneur de sa présence.

-> Projet concours de récitation BnF

Un autre de mes projets favoris est celui que je mène depuis plusieurs années avec la BnF et que j’espérais mener de nouveau au printemps dernier. La BnF organise pour les collégiens et les lycéens un concours de récitation qui se clôture par une masterclasse. En fonction des projets pédagogiques de l’établissement, je travaille soit avec une classe de 6e soit avec une classe de 5e. En collaboration avec leur professeur de français, nous sélectionnons des textes d’après le thème proposé par la BnF et nous préparons tous les élèves à l’interprétation du texte qu’ils ont retenu. Après 4 séances, en demi-groupe, nous nous mettons d’accord, élèves et professeurs, pour désigner les trois élèves volontaires pour défendre les couleurs de leur classe. Afin de mettre toutes les chances de leur côté, je continue à les faire travailler tous les trois au CDI, sur le temps du cours de français. Le jour du concours toutes les classes sont rassemblées dans l’amphithéâtre de la BnF pour soutenir leurs représentants. L’ambiance, croyez-moi, est tendue, et l’écoute d’excellente qualité ! Nos élèves ont gagné deux fois le troisième prix et une fois le premier prix.

-> Projet écriture et interprétation

Travailler l’oralité passe aussi par l’écriture et moi-même étant slameuse c’est tout naturellement que je propose aux professeurs de travailler sur le slam, concept qui, soit dit en passant, contrairement à ce que certains pensent, ne relève pas d’une forme d’écriture ni d’une manière de dire, mais tout simplement de conditions d’énonciation : un slam c’est trois minutes, a cappella devant un public, en général une communauté de poètes et de supporters rassemblés pour encourager et vivre un moment de partage sensible. Si, pour les jeunes collégiens, le slam ne pose pas de problème, pour les plus âgés, à savoir les élèves de 3e, cela peut être compliqué. Je me souviens en particulier d’une séance menée avec une professeure de français qui a failli tourner court. Nous avions monté un projet sur plusieurs séances dont un déplacement à Radio Clype7 pour l’enregistrement des textes et une restitution lors d’un spectacle de fin d’année au Théâtre de la Porte Saint-Martin. Lors de la première séance nous avons travaillé sur la définition du slam et les représentations que les élèves en avaient. J’ai montré des extraits d’un documentaire8 et nous leur avons fait écouter des slams écrits par des élèves issus d’autres établissements. Ensuite nous leur avons demandé d’écrire des slams sur le sujet de leur choix, avec la possibilité de faire des rimes. Un silence dubitatif, désemparé, s’est installé. Certains ont demandé des éclaircissements, tandis que d’autres ont manifesté leur désapprobation. Ils refusaient d’écrire arguant du manque de sérieux. Choqués par le niveau de langue, familier voire grossier, ils s’y opposaient catégoriquement. La professeure et moi-même, nous nous sommes regardées consternées. Jamais il ne nous serait venu à l’idée que les élèves pouvaient refuser d’écrire des slams. Finalement après une discussion approfondie et le soutien des élèves favorables au projet, les résistances sont tombées. De très beaux textes, issus de leur vécu, ont été écrits.
Avec les plus jeunes au contraire, le slam passe bien. C’est avec joie et même bravade qu’ils jouent avec les mots. Ils en profitent parfois pour passer des messages forts à leurs camarades. Une année j’ai fait participer une classe de 5e à un tournoi de slams interscolaire9 dans le 20e arrondissement. La compétition avait du retard alors, en attendant, j’ai improvisé une scène ouverte à l’extérieur dans le jardin du centre Paris’Anim. Nos élèves ont rencontré d’autres élèves issus de banlieue défavorisée et ce mélange était revigorant. Ensemble ils ont partagé leurs mots.
Écrire et interpréter ça peut être aussi « écrire à la manière de ». Une année, j’ai fait appel à Nino Judice, un poète portugais et le grand-père d’une de nos élèves de 5e. Avec sa professeure de français, nous avons proposé à la classe de choisir un poème dans son recueil Géométrie variable10 et d’en inventer un sur le même modèle. À l’instar du projet mené avec René de Obaldia, les élèves ont travaillé l’interprétation en vue d’une restitution sur scène, dans un petit théâtre de quartier en présence du poète. Sa petite-fille bien sûr faisait partie de cette classe. Et ce lien intergénérationnel et affectif n’a pas manqué de motiver toute la classe !
Mener des actions d’oralité personnalisée s’inscrit durablement dans la mémoire émotionnelle des élèves. Gagnant en confiance, ils sont à même de réinvestir ces savoir-faire d’une année sur l’autre. Certains, une fois lycéens, reviennent me voir et se remémorent, les yeux brillants, comment je les ai fait répéter inlassablement et comment, petit à petit, ils ont progressé jusqu’au déclic.

Le CDI : lieu alternatif pour un accompagnement personnalisé

Si je devais retenir un point particulier dans ma façon de travailler je dirais que c’est le temps que je consacre à chaque élève. Quel que soit le type d’exercice, à un moment donné, je prends trois ou quatre élèves à part et je les fais retravailler patiemment, en demandant à leurs camarades d’exercer un regard critique : je demande à chacun de formuler un point positif et un point à améliorer en indiquant si possible comment y parvenir. Bannir le jugement et encourager ! J’insiste également sur l’autonomie des élèves en leur proposant de réfléchir eux-mêmes à la mise en scène. Pour évaluer leur progression, nous organisons des temps de répétitions collectives et certaines sont filmées. Ce travail permet au groupe de s’auto-analyser dans une perspective de discernement critique et constructif. Il va sans dire que tout travail d’interprétation exige l’apprentissage impeccable des textes à jouer. Car si plaisir et inventivité il faut, rigueur et persévérance il se doit !
Le CDI, lieu alternatif d’expérimentation à l’oralité, ouvre les portes à la différence de chacun, sans dispositif d’évaluation sommative, privilégie le travail sur le corps, les sensations, les émotions et permet à l’élève d’ajuster son altérité dans une temporalité propre à son rythme. Plus que jamais le CDI se prête à accueillir ce type de travail et le professeur documentaliste, au carrefour de l’enseignement disciplinaire peut légitimement s’en emparer. Je rêve de pouvoir mettre en place un atelier spécial « exposés », un atelier qui serait consacré à l’entraînement oral des élèves ayant des difficultés à présenter leurs exposés. Accorder du temps supplémentaire à ces élèves avant qu’ils ne passent devant toute la classe ; prendre, ensemble, le temps d’examiner comment l’exposé a été construit ; leur faire prendre conscience qu’un exposé bien fait selon les méthodes préconisées facilite la prise de parole, tels sont mes objectifs. Bien maîtriser son sujet aide à s’exprimer devant les autres sans avoir recours à ses feuilles. Quand l’élève parvient à comprendre que le fond et la forme sont complémentaires, alors on a bien avancé et on peut continuer à poser les jalons techniques pour une prise de parole efficace. Prendre conscience de sa respiration les mains sur le ventre, projeter sa voix, poser son regard en fixant un point déterminé ensemble, ancrer son corps, poser les pieds bien à plat, déverrouiller les genoux, détendre son corps, prendre son temps avant de parler sont des actions simples qui demandent juste à être répétées sous le regard de celui qui les accompagne. À quel moment le professeur de discipline peut-il consacrer du temps à cet apprentissage ?

Des projets d’oralité transversaux

L’oralité n’est pas l’apanage du français et dans chaque discipline il est possible de travailler l’oralité. Cette année, outre mes projets avec les professeurs de français, j’ai eu le plaisir d’être sollicitée par des professeurs de SVT, d’anglais et d’espagnol.

-> Projet Ver de terre11

La professeure de SVT connaissant mes compétences de slameuse a souhaité les mettre à profit pour un projet que nous avons construit ensemble pour ses trois classes de 6e. Après avoir été enthousiasmée l’été dernier par un spectacle12 sur le ver de terre, la professeure de SVT a souhaité en faire le socle de notre projet. Celle-ci m’a donné carte blanche pour préparer des séances de sensibilisation au vocabulaire scientifique utilisé par la comédienne durant son spectacle. La difficulté pour mener à bien ce projet a été de trouver des heures. Il me fallait au moins quatre heures par classe. J’ai récupéré quelques créneaux libérés par des professeurs pour cause de voyage ou de sorties scolaires, complétés par des heures ajoutées dans l’emploi du temps par le directeur. Ce projet a permis aux élèves de jouer avec des mots complexes et de s’en approprier les sonorités, souvent avec délectation, avant d’en découvrir le sens en cours de SVT. Les élèves ont créé des slams dont certains devaient être déclamés le 16 mars devant la comédienne, juste après son spectacle. Bien que cette dernière phase n’ait pas eu lieu, nous avons pu constater le plaisir que les élèves ont eu à s’emparer de cette activité et comment ils ont réussi à mémoriser et prononcer des noms scientifiques très pointus. J’aurais souhaité vous transmettre quelques slams écrits par les élèves, malheureusement, les textes, stockés au CDI, ont été également confinés !

-> Projet Macbeth

Un autre projet en cours concerne la mise en bouche d’une pièce de Shakespeare, Macbeth en version adaptée, niveau B2 pour une classe de 4e. Cette fois-ci l’intervention se fait en anglais. Bien que je sache m’exprimer en anglais ce fut un challenge, mais soutenue et encouragée par la professeure d’anglais, j’ai réussi à mener une séance de deux heures. Si parfois les mots me manquent, le professeur ou les élèves viennent à la rescousse. Montrer aux élèves l’exemple de ses failles et comment les dépasser avec leur aide est également formateur pour tous. À l’occasion de cette séance, j’ai pratiqué un de mes exercices favoris, la lecture adressée13, qui met en jeu toute la classe dans une dynamique d’écoute participative et de projection de voix, à laquelle peuvent se combiner des effets d’émotion et d’intention (colère, joie, tristesse, chuchotement, cri…). La disposition en cercle inclut chaque élève qui, tour à tour, se fait « adresseur » ou « adressé ». Cette activité fonctionne avec n’importe quel type de support écrit et ne nécessite pas d’apprendre un texte par cœur. L’adresse qui se fait d’abord visuellement engage une vraie relation avec l’autre et suscite souvent au départ des malaises. Dans certaines cultures, c’est compliqué d’être regardé. Or, comment établir une relation sincère et propice à la communication sans se laisser regarder ? En s’ouvrant à l’autre pour mieux s’ouvrir à soi-même. Et vice versa ! Plus ces types d’exercices seront répétés plus l’élève prendra confiance et aura du plaisir, le plaisir étant l’une des clés pour réussir à communiquer.
J’ai également pratiqué un autre de mes exercices favoris qui au début surprend mais ensuite en le pratiquant ravit l’ensemble des élèves. Il s’agit de la lecture chorale, exercice qui peut se pratiquer dans n’importe quelle discipline et qui ne nécessite pas d’installation particulière. Le professeur désigne un chef de chœur qui changera après avoir lu trois ou quatre lignes. Le chœur va oraliser la ponctuation des phrases lues par le chef de chœur. Cet exercice a pour résultat d’engager activement l’ensemble des élèves : le chœur écoute et oralise le moment venu, tandis que le chef de chœur veille à laisser le silence pour le groupe. La lecture se fait plus fluide, moins précipitée laissant émerger le sens et le rythme du texte. Au départ, il faut compter un temps d’adaptation mais ensuite le résultat est très intéressant. Une harmonie collective se met en place où chacun est acteur et solidaire.

-> Projet Culture méditerranéenne

Quant à mon troisième projet, celui-ci était prévu avec la professeure d’espagnol qui m’avait sollicitée pour accompagner ses élèves de 5e en Andalousie en mars dernier. En lien avec l’une des thématiques du séjour, celle-ci m’a demandé de préparer une séance d’oralité à réaliser sur place, en espagnol. Je lui ai proposé de travailler sur les spécialités culinaires et la nourriture andalouse. Utiliser différents outils – écrire des slams, faire marcher les élèves sur le thème de la faim (être affamé, être repu, avoir mal au ventre, se brûler la langue…), faire bouger le corps, sortir les émotions – permet de fixer durablement des notions scolaires. Faire appel aux sensations et les extérioriser donne du plaisir, même si c’est difficile pour certains.

Le CDI partenaire d’un parcours oralité

Ne pas s’arrêter aux difficultés. J’en ai moi-même fait l’expérience dans ma démarche de slameuse novice. En fréquentant assidument les scènes ouvertes de slam, j’ai découvert un univers empreint de bienveillance et de non-jugement qui m’a permis de progresser. Tout ce que j’ai appris au cours de ces dernières années, je le réinvestis régulièrement dans ma pratique professionnelle, informant quelques-uns de mes collègues de cette double vie, voire triple lorsque je reprends des études. Le regard porté sur moi, au sein de mon établissement, reste quelquefois étonnant : à quoi ça te sert de faire des études ? Pourquoi tu continues ? Je répondrai que cette triple démarche me permet d’enrichir mon expertise pédagogique et d’affirmer une place particulière dans laquelle je me sens bien et totalement légitime. La conscience de la nécessité d’apprendre à communiquer pour un bien-être réciproque, je l’ai en moi depuis très longtemps. Lors de mes accompagnements scolaires à l’étranger, j’ai été émerveillée de voir l’aisance de la plupart des élèves anglo-saxons, entraînés à la prise de parole en public grâce à des temps de rassemblement14 collectif hebdomadaire permettant de prendre la parole d’une façon informelle.
Être sincère, être convaincue du bien-fondé de sa démarche, maîtriser son sujet, forcément, cela donne de la force et renforce votre confiance : vous savez que vous avez une place et que celle-ci est unique. Longtemps, mes activités pédagogiques de prise de parole en public ont été considérées au sein de mon établissement avec condescendance, jugées peu sérieuses par certains. Heureusement, il y a toujours eu autour de moi des collègues partageant mon point de vue et prêts à travailler en ce sens avec leurs élèves. Et maintenant, l’Éducation nationale se met aussi à promouvoir l’oralité en instituant des examens oraux pour le DNB15 et le baccalauréat16. La roue tourne et le nouveau directeur du collège dans lequel j’exerce, arrivé il y a trois ans, se fait fort d’inscrire l’oralité dans le cursus de chaque élève, pour chaque niveau, malgré les réticences de certains professeurs. Dans cette perspective, le directeur m’a sollicitée ainsi que deux collègues de français, pour réfléchir à la mise en place d’un parcours oralité de la 6e à la 3e. Nous avons donc travaillé à une progression thématique sur des points pivots tels que : extérioriser ses émotions, lire et raconter des histoires, écrire et interpréter ses textes, s’engager dans un jeu théâtral, improviser, riposter, argumenter et construire une grille d’évaluation orale. Si le projet ne s’est pas encore concrétisé, faute de disponibilité horaire, il n’en demeure pas moins qu’une dynamique de réflexion est à l’œuvre, engageant toutes les disciplines pour chaque niveau. Et j’ai confiance dans l’avenir, pour qu’un parcours d’oralité en partenariat avec les professeurs documentalistes voie le jour. En attendant, la tendance est à convoquer des spécialistes de la prise de parole en public et à les faire intervenir sur des heures hors enseignement. Si faire appel à des intervenants permet d’apporter un autre regard – moi-même, les années passées, j’ai fait venir l’association des Hauts Parleurs17 pour toutes les classes de 4e -, n’est-ce pas dans nos missions de veiller à accompagner l’élève au plus près des réformes proposées par l’Éducation nationale et de mettre en place des activités en collaboration avec les professeurs ? N’est-ce pas à la direction de veiller à tenir compte des compétences de la communauté éducative et à les laisser émerger dans un souci de partage et de transmission transversale ?

En guise de conclusion je pourrai dire que ce n’est pas parce qu’on est professeur qu’on sait prendre la parole en public, devant des adultes. On pourrait pointer du doigt le manque de formation à l’oralité dans le cursus menant au professorat. À ce sujet d’ailleurs, de jeunes professeurs de mon établissement ont réclamé une formation à l’oralité au moment même où je proposais au directeur, début mars, d’en faire une à l’intention des professeurs le désirant, avec l’idée d’utiliser les mêmes exercices que ceux réalisés par les élèves. La suggestion validée, il est prévu d’animer, avec deux autres collègues, un atelier oralité en fin d’année scolaire. Plus que jamais les élèves ont besoin de faire des liens entre le travail de chacun et de chacune. Rassembler toutes les compétences et les faire valoir les unes les autres est nécessaire. Reste la question de comment valoriser ce travail d’oralité auprès des élèves et des professeurs de discipline ? Quel retour en avons-nous ? Quelles stratégies mettre en place pour évaluer et mesurer la progression des élèves ? Un autre chantier en perspective à mettre en œuvre collectivement !

 

Virginie Séba & Edgar Sekloka – Dame chique tache [CLIP]
https://www.youtube.com/watch?v=E_NZa1jmwlw

 

 

Atelier Ver de terre – exercices d’oralité

A/ Se familiariser au vocabulaire scientifique

 

LECTURE ADRESSÉE

Installer les élèves en cercle. Un élève pioche dans un chapeau un des mots ci-dessous ; il en prend connaissance, mémorise le mot, choisit du regard un élève et adresse ce mot en le regardant attentivement. L’élève adressé répète le mot en regardant dans les yeux l’adresseur qui s’assure de la bonne prononciation du mot. Ne pas hésiter à faire répéter si besoin puis montrer le mot à l’assemblée. Ensuite c’est au tour de l’élève adressé de piocher un mot, de le mémoriser et de choisir du regard un élève à qui il adresse son mot. Quand il n’y a plus de mots dans le chapeau, remettre les mots et continuer l’exercice jusqu’à ce que tous les élèves aient joué le rôle d’adressé et d’adresseur.

lombricien – géodrilologie – épigé, endogé, anécique – INRA – clitellum – paradiapause – humus – argile – complexe argilo-humique – segment – métamère – sol – hermaphrodisme – Darwin.

 

VIRE-LANGUE

Répéter plusieurs fois le texte suivant en respectant les coupes qui signalent une pause pour reprendre sa respiration

Le clitellum en épigé / métamère le lombricien. /Argile complexe le segment s’hermaphrodisme / et s’anécique pour former la / géodrilologie. / L’INRA  a frappé d’endogé / les sols argilo-humiques / leur préférant les sols paradiapauses, / propices à meilleur humus / pour la prolifération des vers de terre.  

Exercice à pratiquer en groupe puis deux par deux

Se présenter deux par deux au public en disant chacun son tour le texte

 

B/ Exercices d’écriture en vue de prendre la parole

 

Moi, je 

A partir des lettres de son prénom, recouper avec celles du début des mots scientifiques. A partir de cette banque de mots faire un court poème en commençant par : Moi, prénom, je :

 

V   Ver de terre

I     INRA

R

G    Géodrilologie 

I

N

I

E     Endogé 

Moi, Virginie, géodrilologue passionnée

Je travaille à l’INRA

Sur les vers de terre à caractère endogé

 

J’aime / j’aime pas

A partir des mots suivants, composer 2 quatrains en utilisant au minimum 4 mots de la liste, 2 mots par quatrain et faire rimer les quatrains (utilisation du dictionnaire des rimes)

(lombricien – géodrilologie – épigé, endogé, anécique – INRA – clitellum – paradiapause – humus – argile – complexe argilo-humique – segment – métamère – sol – hermaphrodisme – Darwin..)

J’aime la géodrilologie

Depuis 4 bonnes années

Avec mon bâton de berger

Je trace à tâtons les endogés

J’aime pas les clitellums

Ca s’infiltre dans l’humus

profond jusqu’au thymus

Et sifflent tout leur calcium

 

Ma définition

A partir des mots suivants imaginer une définition : choisir un mot et intégrer 2 autres mots de la liste dans la définition

(lombricien – géodrilologie – épigé, endogé, anécique – INRA – clitellum – paradiapause – humus – argile – complexe argilo-humique – segment – métamère – sol – hermaphrodisme – Darwin..)

Exemple :

Géodrilologie : (nom commun féminin) C’est l’étude des segments anéciques présents dans les sols argilo-humiques permettant de dater avec précision l’origine des métamères.

 

C/ Exercice d’oralité

 

Détente, concentration, respiration

Se mettre en cercle ; debout les yeux fermés ; poser les mains sur son ventre et sentir sa respiration naturelle.

Faire 10 soupirs en inspirant par le nez puis en expirant par la bouche tout doucement, le plus longtemps possible.

Recommencer 10 fois en bloquant sa respiration juste à la fin de l’inspiration pendant 1 à 2 secondes puis expirer tranquillement le plus longtemps possible.

Revenir à la respiration normale, toujours les mains posées sur son ventre et les yeux fermés.

 

Echauffement

Réveiller les différentes parties de son corps (sauf tête) ; imaginer que sa main est un gant et se frotter les différentes parties du corps, bras, jambes, pieds, mains, cou, épaules …

Auto masser sa tête

Grimacer : étirer les muscles du visage dans tous les sens, ouvrir la bouche, bouger sa langue dans tous les sens puis tirer la langue

 

Cercle d’attention

Se passer un objet imaginaire :

 – Lentement car c’est fragile

 – Vite car ça brûle

Se passer un ver de terre (quelles sensations cela procure)

De sa place dans le cercle :

 – Dire son prénom et faire un geste ; le cercle répète le prénom et reproduit le geste

 – Exprimer un son et un mouvement dynamique, bouger de sa place vers le centre du cercle ; le cercle reproduit le son et le mouvement dynamique

 

Exercice de marche

Marcher en groupe tranquillement sur le plateau sans se toucher, faire attention aux autres. Quelqu’un décide de s’arrêter, tout le monde s’arrête ; pause puis le groupe repart ; Recommencer plusieurs fois jusqu’à établissement d’un rythme harmonieux, comme une respiration naturelle

Marcher tranquillement sur le plateau sans se toucher puis aux consignes marcher selon les indications :

 – Dans la boue

 – Sous la pluie

 – Dans le sable

 – Dans une forêt

 – Par grand vent

 – Comme un vieillard

 – Comme un petit garçon

 – Comme un ver de terre

Au clac, s’arrêter et garder la pause

 

Improvisation pour exprimer émotions

Trois élèves face au groupe classe : chaque élève, chacun son tour, dit une phrase simple (la même phrase pour les trois élèves) avec une intention piochée dans une enveloppe ; inventer une phrase à partir du ver de terre.

Exemple :

Le ver de terre aime la pluie

Intentions tirées : joyeux, en colère, timide

 

Lecture adressée

A partir des textes produits par les élèves, faire une lecture adressée :

en cercle, un élève avec le texte de son prénom, mémorise un segment du texte facile à retenir, choisit du regard un élève et adresse ce segment en le regardant attentivement. L’élève adressé répète ce segment en regardant l’adresseur. Ensuite c’est celui qui a parlé en dernier qui opère de la même façon en utilisant un segment de son texte.

 

Improvisation mimée

Par groupe de deux élèves : un élève mime un verre de terre et le second fait les bruitages.

Les spectateurs doivent deviner dans quelle situation est le ver de terre.

Exemple de situations :

 – Sols asséchés

 – Sols dégoulinants de pluie