Le dérèglement climatique et ses conséquences

Il ne fait désormais plus aucun doute que les changements climatiques sont bien réels et modifient peu à peu notre quotidien (changement des températures, disparitions d’espèces, apparition de nouvelles maladies…). À mesure que leurs effets s’intensifient, les jeunes prennent de plus en plus conscience que ce sont eux et leurs enfants qui en subiront les conséquences. De nouvelles angoisses apparaissent alors comme l’éco-anxiété, un mal qui touche particulièrement les jeunes générations. L’éco-anxiété est un sentiment d’impuissance face au changement climatique et à ses conséquences sur notre planète et plus particulièrement sur nos modes de vie. L’état du monde empire avec la hausse des températures, la montée des eaux, le déclin de la biodiversité, les ressources qui diminuent et l’augmentation des réfugiés climatiques… Si l’éco-anxiété peut provoquer le désespoir, la colère et la peur, elle peut également être source de mobilisation et donc d’action : il est encore temps, si on se dépêche, de changer le futur en permettant par exemple aux jeunes de s’informer sur ce qu’est véritablement le changement climatique et ses conséquences. Ainsi préparés et informés sur ces phénomènes et leurs implications, les jeunes pourront s’orienter vers des solutions, à leur échelle ou bien plus globales.
La littérature dédiée aux adolescents sur cette thématique et notamment les dystopies, les fictions d’anticipation connaissent un fort développement ces dernières années (voir Thèmalire « Dystopies et changements climatiques ») ; et la question du dérèglement climatique est souvent traitée par les médias. En revanche, les ouvrages documentaires récents qui portent sur cette question sont moins évidents à trouver.

Bien s’informer pour mieux comprendre le dérèglement climatique et ses conséquences. Introduction aux concepts

Pour comprendre ce que l’on vit aujourd’hui et ce qui nous arrivera demain, il est essentiel de revenir aux fondements en répondant à la question « Qu’est-ce que le changement climatique ? »
En effet, bien des jeunes ne savent pas véritablement de quoi l’on parle et ne font pas la différence entre le fait, par exemple, qu’il fasse plus chaud que d’habitude l’hiver (c’est-à-dire la météo) et un climat plus chaud qui entraîne des réactions en chaîne (le climat). Jean-Marc Jancovici, dans son ouvrage Le changement climatique expliqué à ma fille, reprend très clairement la différence entre ces deux éléments. Sous la forme d’une discussion entre un père et sa fille, il explique tout d’abord que le climat change, et revient sur des définitions importantes comme l’effet de serre. Il aborde également la thématique de la montée des eaux et des conséquences du réchauffement des océans, la fonte des glaciers et des banquises. Enfin, il rappelle que les ressources sont épuisables et bientôt épuisées, comme celles qui servent à produire notre énergie (pétrole, gaz, charbon, etc.). Il rappelle également que certaines énergies sont plus polluantes (et participent davantage au dérèglement) que d’autres.
Sur un autre support, la bande dessinée intitulée Le changement climatique en Bd ! réalisée par Yoram Bauman et Grady Klein met en scène deux scientifiques expliquant de manière simple et amusante ce qu’est le changement climatique. Dans une première partie, les auteurs reviennent sur le fonctionnement de notre planète pour mieux comprendre les cycles qu’elle a traversés et les différents phénomènes qui créent ce changement. La seconde partie dresse le portrait des conséquences de ce dérèglement depuis la révolution industrielle (l’augmentation des températures, ses conséquences sur l’eau et sur la vie sur Terre). La troisième partie porte sur les actions à mener pour limiter notre empreinte carbone. Le format bande dessinée est très intéressant, car il permet de toucher un public plus large et de faciliter la compréhension des termes employés grâce à de nombreux schémas, graphes et dessins.
Ancien et peut être difficile à trouver, le documentaire d’Al Gore Une vérité qui dérange, à la fois biographique et de photographie, invite à une prise de conscience générale sur les problèmes environnementaux. Nous sommes touchés par cet ancien vice-président des États-Unis qui nous raconte comment il a pris lui-même conscience du changement climatique à la suite du terrible accident de son fils. Le dérèglement climatique et ses conséquences (fonte des glaciers, augmentation des catastrophes naturelles, manque d’eau, élévation du niveau de la mer) sont autant de preuves que celui-ci est déjà présent et qu’il s’intensifie. Il apporte également des éléments de compréhension sur l’inaction des États (actions de lobbyistes et campagnes de pub discréditant les scientifiques). Enfin, Al Gore propose des moyens d’actions individuels pour limiter la consommation d’énergie et ainsi avoir moins d’impact sur le climat.

Un changement climatique qui implique des changements sociétaux

Pour faire suite à la critique d’Al Gore sur les raisons de l’inaction politique face à l’urgence climatique, plusieurs documentaires pointent du doigt le capitalisme, le rôle joué par les lobbys et la surconsommation.
Ainsi, la blogueuse Emma Clit, dans la bande dessinée intitulée Un autre regard sur le climat, met en évidence une approche sociale du problème. Elle dresse le portrait, appuyé de chiffres, des conséquences des changements climatiques sur les territoires et sur les populations. C’est un livre engagé et foncièrement anticapitaliste, le capitalisme étant jugé comme la première cause du dérèglement climatique et de l’inaction politique : le profit, le lobbying et l’illusion d’une économie verte sont autant de maux qui empêchent les véritables actions. La dernière partie de ce livre est dédiée aux solutions possibles que nous pouvons déjà mettre en place.
Sur le sujet du capitalisme et la critique de notre mode de consommation actuel, nous pouvons également recommander l’album de Cyril Dion et Pierre Rabhi, Demain entre tes mains. Cet album est facile d’accès pour les élèves car il contient peu de texte au profit d’images avec de nombreuses citations mises en avant comme des principes écologiques et de vie en société. Il explicite les problèmes liés au changement climatique comme la déforestation, l’extinction de nombreuses espèces et l’augmentation de la pollution. Cyril Dion et Pierre Rabhi critiquent notamment dans ce livre le fait que l’on utilise la nature et ses ressources, non plus seulement pour se nourrir ou pour vivre, mais au contraire pour s’enrichir et faire du capital. Ils prônent un changement de comportement basé, non plus sur la peur de manquer, mais sur d’autres types de valeurs comme la passion ou l’amour.

Des Bds documentaires pour toucher un public plus large

Trois bandes dessinées peuvent permettre d’aller plus loin dans la compréhension des enjeux climatiques actuels. Il s’agit de Saison brune de Philippe Squarzoni (2012), Le monde sans fin de Christophe Blain et Jean-Marc Jancovici (2021) et Urgence climatique : il est encore temps ! d’Ekeland Ivar et Lécroart Etienne (2021).
Saison brune (Prix de l’Académie française 2012) met en scène Philippe Squarzoni lui-même qui termine son album politique Dol. Toutefois, il lui reste un chapitre sur l’écologie à écrire et à dessiner. Manquant de connaissance sur le sujet pour réaliser correctement son album, il commence à chercher des informations, mais les problèmes du changement climatique lui apparaissent plus compliqués que ce qu’il pensait. Il mène alors une véritable enquête pour mieux comprendre ces enjeux. Nous sommes plongés à la fois dans une enquête pour comprendre les causes et les conséquences du dérèglement climatique, mais aussi dans les considérations et les craintes personnelles de Philippe Squarzoni telles qu’elles pourraient l’être pour chacun de nous.
Le monde sans fin est une bande dessinée d’une approche plus ludique, dans laquelle Christophe Blain, le dessinateur (dessinateur de la BD Quai d’Orsay, 2010), se met en scène, discutant avec Jean-Marc Jancovici. Cette BD est composée de trois grandes parties : l’énergie, le climat, la culpabilité. La première partie sur l’énergie nous fait réaliser que tout ce que nous utilisons dans notre quotidien, nos appareils électroniques, bien sûr, mais aussi tous nos objets, consomment ou ont consommé de l’énergie avant d’arriver jusqu’à nous. Nous apprenons ainsi ce qu’est l’énergie et la place centrale qu’elle occupe au sein de la société. La seconde partie concerne le climat et notamment les causes et conséquences du dérèglement climatique. Jean-Marc Jancovici explique que les humains agissent sur trois des gaz à effet de serre qui participent à ce dérèglement. Il revient ensuite sur les conséquences d’une augmentation de 2 à 5 degrés, non seulement pour la planète (les océans, la biodiversité, etc.), mais aussi pour les populations. Il fait également une comparaison très intéressante des différents moyens de fabriquer de l’énergie. La troisième partie n’est pas là pour culpabiliser le lecteur (contrairement à son titre ironique). Au contraire, Jean-Marc Jancovici nous rassure : il n’est pas question d’arrêter de manger de la viande, mais de changer nos manières de consommer : par exemple, consommer moins, mais de meilleure qualité et de manière locale, changer nos habitudes de transport, modifier notre manière de construire nos logements et enfin faire des achats raisonnés.
Urgence climatique : il est encore temps ! est issu de la rencontre d’Ekeland Ivar (mathématicien) et Lécroart Étienne (dessinateur). La BD a pour objectif de sensibiliser le lecteur à la question de l’urgence climatique, un sujet sérieux, certes, mais sans toutefois mettre de côté l’humour d’Étienne Lécroart. Grâce aux nombreuses interventions d’experts scientifiques, biologistes, historiens, économistes et climatologues, cette BD permet de faire l’état de la situation actuelle concernant le dérèglement climatique. Si le tableau du futur que dépeignent ces témoignages n’est pas très réjouissant, les auteurs parviennent à montrer qu’il est encore possible d’agir en vue de l’améliorer, si toutefois nous nous en donnons les moyens.

La mobilisation des jeunes

Face au constat de l’urgence climatique, ce sont les jeunes qui se mobilisent et qui montrent du doigt l’inaction générale. Ces jeunes ont pris conscience des problèmes climatiques et écologiques qui nous entourent et désirent un changement de politique, avec plus de justice sociale.
On peut le voir notamment à travers le roman Il est encore temps ! de Jean-Philippe Blondel qui met en scène une jeune lycéenne, Lou, qui entre en seconde et qui n’est pas aussi excitée que les autres par la rentrée. Lou est très sensible aux conséquences du changement climatique et ne voit pas comment elle pourrait se projeter dans un futur qui serait dégradé. Pourquoi étudier si nous ne savons pas si nous survivrons dans dix ans ? Lou va découvrir Greta Thunberg et partager sa lutte jusqu’à organiser elle-même un événement d’envergure avec l’aide de ses nouveaux amis. Ce roman fait écho à l’éco-anxiété des jeunes face aux problématiques environnementales et climatiques dont ils vont être victimes et démontre qu’ils peuvent aussi être les moteurs du changement. De plus, il est assez court et dynamique, il donne envie de se documenter davantage sur ces jeunes qui luttent et essaient d’agir pour le futur.
Pour aller plus loin, nous pouvons conseiller Polar vert. L’histoire se passe en Bretagne, Klervi, une jeune lycéenne, retrouve son frère et son cheval inertes sur une des plages proches de chez eux. Elle court les sauver, sachant pertinemment que la plage est recouverte d’algues vertes et que celles-ci peuvent tuer. Elle s’évanouit et est secourue in extremis. Toutefois, le monde de Klervi sera à jamais chamboulé : son frère est dans le coma, son cheval est mort, elle devient à la fois un témoin important dans l’enquête policière en cours au sujet de l’accident de son frère et aussi un suspect dans le trafic d’espèces protégées que mène la famille de son petit ami. Les deux jeunes gens et leurs amis deviennent des activistes critiquant l’implication des grandes industries dans la prolifération des algues vertes et l’inaction des politiques face à l’urgence climatique.
Un excellent documentaire peut également être révélateur de l’engagement des jeunes pour le climat et l’environnement. Il s’agit de Ces jeunes qui changent le monde. Cet ouvrage ne se limite pas à la question du climat, mais traite aussi de la thématique des déchets, du plastique, de la déforestation, de la biodiversité, de l’éducation, etc. Chaque thématique est un focus sur l’adolescent qui lutte pour faire changer les choses. Plusieurs pages sont donc consacrées au climat, à Greta Thunberg, mais aussi à Anuna De Wever et Kyra Gantois, et Xiuhtezcatl Martinez. Les auteurs nous décrivent leur combat, comment l’idée de cette lutte leur est venue et ce qu’ils ont fait pour montrer leur désaccord. Ils font également un portrait de ces jeunes. Enfin ils retracent les dates clefs du mouvement « Grève de l’école pour le climat ». Ce livre invite les jeunes à prendre conscience qu’ils ont un pouvoir politique, qu’ils peuvent entrer en action et faire entendre leur voix.
Pour finir, nous pouvons également faire référence à l’ouvrage de Mazza Viviana (journaliste italienne), Greta La voix d’une génération, dans lequel Viviana Mazza dresse le portrait de Greta Thunberg et raconte ses actions pour l’environnement et le climat. L’auteure fait également référence au fait que le mouvement lancé par Greta Thunberg est suivi par de nombreux jeunes et qu’il n’est pas un élément isolé. C’est un ouvrage court, facile à lire et peuplé d’illustrations. Un dossier pédagogique et un glossaire à la fin du livre reprennent les définitions les plus importantes.

Conclusion

L’impact de l’activité humaine sur le climat n’est plus à démontrer, et ses conséquences sur le futur de nos sociétés s’annoncent désastreuses : nous sommes en situation d’urgence climatique. Il apparaît clairement qu’il faut agir vite et dès maintenant. Or, c’est cet état d’urgence et cette prise de conscience qui sont source d’anxiété et de fatalisme : pourquoi continuer à étudier ? Le CDI (Centre de Documentation et d’Information) paraît être le lieu idéal pour permettre aux jeunes de s’informer, avec des ressources actuelles et fiables. Être informé et comprendre ce que signifie ce dérèglement permettra aux jeunes d’anticiper sur leur avenir, de réfléchir à leurs actions, de développer leurs compétences en fonction de la ou des causes pour lesquelles ils souhaiteraient s’investir personnellement et enfin de participer à trouver des solutions.

 

 

Infox et écologie : comment lutter contre le climato-scepticisme ?

Institutions / Centres de recherche

Au premier rang des sources institutionnelles, on peut citer bien sûr le site du ministère de la Transition Écologique ( https://www.ecologie.gouv.fr/) qui, dans l’onglet « Climat et biodiversité », propose une infographie claire sur les liens entre réchauffement climatique et impact sur la biodiversité.
On peut y retrouver également le suivi des propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat et les mesures proposées dans la loi Climat.
https://www.ecologie.gouv.fr/suivi-convention-citoyenne-climat/

Le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), créé en 1988 pour effectuer régulièrement un état des connaissances scientifiques, techniques et socio-économiques liées aux changements climatiques, met en ligne les rapports complets qui détaillent et évaluent les causes, les répercussions et les stratégies possibles pour prévenir ou réduire les effets du réchauffement climatique, ainsi que des données en open source sur le climat http://www.ipcc.ch/
Mémo : Le GIEC et l’ex-Vice-Président des États-Unis, Al Gore, ont reçu le prix Nobel de la paix en 2007 pour leur contribution dans le domaine des changements climatiques.

L’ONERC (Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique) met en ligne ses rapports d’activité, les données chiffrées des différents indicateurs de réchauffement ainsi qu’une base de données qui recense tous les travaux de recherche sur le sujet https://www.ecologie.gouv.fr/observatoire-national-sur-effets-du-rechauffement-climatique-onerc

Météo-France donne accès à un grand nombre de statistiques sur le climat en France, une mine d’or pour travailler avec des lycéens sur les changements climatiques à partir des données brutes (en mathématiques ou en géographie par exemple), notamment avec le jeu de données MéteoNet https://donneespubliques.meteofrance.fr/
On peut également exploiter Climat HD, un ensemble d’animations et d’infographies sur l’évolution du climat qui permettent de comparer en un seul coup d’œil les données météo actuelles avec les tendances des prévisions climatiques au cours du XXIe siècle http://www.meteofrance.fr/climat-passe-et-futur/climathd

L’Institut Pierre Simon Laplace est un institut de recherches en sciences de l’environnement qui regroupe plusieurs laboratoires scientifiques d’études et de modélisation du climat. Dans sa rubrique « Pour tous », on trouve des dossiers thématiques sur le climat, des exemples d’expériences pour étudier le cycle du carbone au collège et au lycée ( http://www.ipsl.fr/fr/Pour-tous/Espace-pedagogique), des références bibliographiques et des vidéos et animations documentaires sur les changements climatiques.

Temps forts

La Semaine du climat se déroule chaque année début octobre et est couplée avec la Fête de la Science. Les établissements scolaires sont invités à organiser des débats et des animations autour des enjeux scientifiques et sociétaux du changement climatique. Plus d’infos sur https://www.education.gouv.fr/la-semaine-du-climat-5390

Elle coïncide par ailleurs avec la Semaine Européenne du Développement Durable qui a lieu fin septembre. Retrouvez tout un catalogue d’actions réalisées à cette occasion sur le site de l’Agenda 2030, notamment en bibliothèques, ainsi que les visuels et les contenus des 17 objectifs du développement durable fixés par l’Unesco.
https://www.agenda-2030.fr/

Journée internationale de la Terre chaque année le 22 avril https://www.un.org/fr/observances/earth-day

Jour du dépassement de la Terre : estimée à début août en 2017 et 2018, au 29 juillet en 2019, au 22 août en 2020. Cette journée correspond à la durée annuelle (même si son mode de calcul est contesté par certains scientifiques) durant laquelle l’Humanité aurait consommé toutes les ressources que produit la planète par an, le surplus entamant les réserves sur le long terme. Un bon moyen d’éveiller les consciences en se faisant l’écho de cette date qui a tendance à arriver de plus en plus tôt dans l’année.

Expositions virtuelles et itinérantes

Cartooning for Peace : Dessine-moi l’écologie. Le dessin de presse mis au service de la prise de conscience écologique, une bonne manière d’allier EMI et Éducation au développement durable, grâce aux données chiffrées proposées par cette exposition qu’accompagnent des dessins de presse issus des quatre coins du monde. Prêt gratuit pour les établissements scolaires en partenariat avec chaque section départementale de la MGEN. https://www.cartooningforpeace.org/projetsfr/exposition-itinerante-dessine-moi-lecologie/

À acheter en complément de l’exposition : le livre qui regroupe tous les dessins de presse sur ce thème. Arthus-Bertrand, Yann, préfacier. Ça chauffe pour la planète ! : 60 dessins de presse. Gallimard Loisirs, 2018. Cartooning for Peace.

Deux expositions sont disponibles en versions PDF sur le site du ministère de la Transition Écologique et empruntables en expositions itinérantes (gratuit, frais de transport à la charge de l’emprunteur). Le climat change et Comprendre le changement climatique. https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/ONERC_plaquette_presentation_expositions.pdf

Plusieurs expositions téléchargeables en PDF sont proposées par l’Institut Pierre-Simon Laplace. Deux expositions pour les collégiens : Quel climat pour demain ? et Les glaces du Groenland : témoins et acteurs du changement climatique et une exposition pour les lycéens, Climat, eau, vie : la Terre, une exception dans l’Univers ?
https://www.ipsl.fr/Pour-tous/Les-expositions-telechargeables

L’ADEME en lien avec le Réseau Action Climat propose également des expositions itinérantes ou à télécharger en PDF.
https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/exposition-changement-climatique-2015-v2.pdf

Pistes pédagogiques

Dans le cadre de l’éducation aux médias et à l’information, on peut envisager une séquence pédagogique au CDI qui décrypte les différents discours sur le climat, notamment en comparant l’utilisation et le détournement des données statistiques dans les thèses climato-sceptiques. L’analyse de sites web et de discours de personnalités réfutant le réchauffement climatique peut donner lieu à une meilleure compréhension des notions de désinformation, de propagande et de manipulation médiatique. Un travail sur l’analyse critique des informations à faire en collaboration avec les enseignants de mathématiques, de SVT et d’histoire-géographie par exemple.

Utiliser les supports des Fresques du Climat (42 cartes) pour aborder sous la forme d’un atelier les liens de causes et de conséquences de l’impact humain sur le climat, et son aspect systémique. Ce travail peut être préparé en amont par des recherches factuelles sur l’un des aspects des changements climatiques et trouver comme finalisation la réalisation de la Fresque, ensuite exposée au CDI. https://fresqueduclimat.org/

La Semaine du climat début octobre peut être l’occasion de créer un temps fort dans l’établissement en faisant venir des expositions, des intervenants sur le thème du changement climatique, ainsi qu’en programmant des projections de films documentaires accompagnés de débats. On peut également penser à un forum associatif qui regrouperait des stands d’associations locales promouvant des initiatives d’engagement citoyen pour lutter contre le réchauffement climatique. La création d’un éco-club toute l’année et les réunions des éco-délégués peuvent permettre d’avoir un vivier d’ambassadeurs du climat dans l’établissement, qui relaient les informations et organisent des actions.

Il est possible de participer au Prix de l’Éducation pour le Climat qui récompense chaque année un projet pédagogique innovant en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique. Ce prix est organisé par le Forum International de la Météo et du Climat qui se tient chaque année à Paris début mai. Leur site propose par ailleurs des conférences en ligne sur ce thème.
https://forumeteoclimat.com/education/prix-education/

Autre possibilité : une participation au Concours Jeunes Reporters pour l’Environnement, ouvert aux jeunes de 11 à 25 ans. Il s’agit d’envoyer sur la plate-forme un reportage (article écrit, vidéo ou podcast au choix), qui traite d’un sujet lié aux objectifs du développement durable, et présente au moins deux acteurs de terrain apportant des solutions concrètes. Une façon de lier EMI et EDD. https://jeunesreporters.org/presentation/le-concours/

Dans les programmes

Synthèse sur l’éducation au développement durable dans les différentes disciplines du 2d degré https://www.education.gouv.fr/l-education-au-developpement-durable-7136

Texte de référence : Renforcement de l’éducation au développement durable – Agenda 2030. BO n° 36 du 24/09/2020. https://www.education.gouv.fr/bo/20/Hebdo36/MENE2025449C.htm

Collège

Les relations entre les humains et leur environnement sont traitées en :

Français et Arts : représentations de la Nature dans les domaines artistiques.

Histoire : les différentes phases des changements climatiques depuis l’industrialisation.

Technologie : les contraintes environnementales dans la conception d’un objet.

Géographie : la notion de développement durable abordée pour en mesurer l’impact sur l’organisation de la société.

SVT et EMC : la question de la responsabilité et de l’engagement pour défendre l’environnement.

Lycée

Seconde, SVT : impact des activités humaines sur leur milieu.

Seconde, Histoire-Géographie : thème « Sociétés et environnements : des équilibres fragiles ».

Première, Enseignement scientifique : rôle des activités humaines sur le climat.

Première, EMC : question des responsabilités individuelles et collectives dans les thématiques environnementales.

Terminale, Enseignement scientifique : les trois thèmes peuvent se rattacher aux enjeux climatiques thème 1 : «science, climat et société» ; thème 2 : «le futur des énergies» ; thème 3 : «une histoire du vivant».

Terminale, Spécialité Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques : thème consacré à « l’environnement, entre exploitation et protection : un enjeu planétaire. »

Terminale, Sciences économiques et sociales : chapitre « Quelle action publique pour l’environnement ? »

Terminale, Langues vivantes : l’enseignement commun et de spécialité de 1re et de Tle comprend un axe d’étude intitulé «Innovations scientifiques et responsabilité».

Galerie des personnalités et essayistes climato-sceptiques

Les deux géophysiciens Vincent Courtillot et Jean-Louis Le Mouël.
Jean-Marc Bonamy, avec Réchauffement climatique : le pavé dans la mare. 2018
Christian Gerondeau. Climat, j’accuse. 2017 et Le CO2 est bon pour la planète : Climat, la grande manipulation, 2015.
Le physicien François Gervais : L’Innocence du Carbone, 2013 et L’urgence climatique est un leurre, 2018.
Du côté des hommes politiques : Donald Trump, Jair Bolsonaro (président du Brésil), Scott Morrison et Michael McCormack, respectivement Premier Ministre et Vice-Premier Ministre australiens.

À noter : lorsque l’on tape sur Google les mots-clés « livre réchauffement climatique », on trouve dans les premiers résultats une sélection proposée par « Apprendre par les livres » qui mélange essais fiables et un grand nombre de livres climato-sceptiques, notés « incontournable », « excellent », etc.

Sur la même problématique, à lire absolument :
Sénécat, Adrien. Comment la désinformation sur le climat se diffuse et se finance sur Youtube ? Le Monde. 17/01/2020
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2020/01/17/comment-la-desinformation-sur-le-climat-se-diffuse-et-se-finance-sur-youtube_6026186_4355770.html

Ressources numériques

Enquête de l’ADEME (= Agence de la Transition Ecologique) : 20e baromètre sur les représentations sociales de l’effet de serre et des changements climatiques. Octobre 2019. Cette étude permet de voir que la préoccupation environnementale augmente globalement dans l’opinion des Français, mais que la place du scepticisme sur l’opinion publique, notamment en ce qui concerne les causes du réchauffement climatique, reste présente pour un tiers d’entre eux.
https://www.ademe.fr/representations-sociales-changement-climatique-20-eme-vague

Sur le site Climate Chance.org, un portail de ressources, la Bibliothèque du Climat, renvoie à des rapports, ressources en open data, sites et infographies.
https://www.climate-chance.org/portail-action/bibliotheque-climat/
Le site donne également accès aux actes de la COP24 qui s’est déroulée en Pologne en 2018 : https://www.climate-chance.org/agenda/cop24/

Le portail de ressources pédagogiques et éducatives Eduscol comprend une rubrique complète et intéressante sur le changement climatique (dans Éducation au Développement durable)
https://eduscol.education.fr/1132/changement-climatique

Canopé propose un dossier en ligne, Sciences et Climat, qui regroupe plusieurs vidéos de chercheurs climatologues, dans un but de vulgarisation scientifique sur ce thème. https://www.reseau-canope.fr/cop-21/sciences-et-climat.html

Le site Réseau Action Climat propose des informations présentées sous forme de contre-argumentaires, en réfutant point par point des affirmations climatosceptiques erronées. https://reseauactionclimat.org/reponses-climatosceptiques/

Séminaire en ligne #BiblioCovid19 de l’ENSSIB : épisode 6 consacré au changement climatique. «J’ai vu un sanglier dans la rue : les bibliothèques et la transition écologique et solidaire». Réflexion sur les actions, médiations et projets à mener en bibliothèques et en centres de documentation autour de la littératie climatique. https://enssib.libguides.com/c.php?g=679447&p=4842911&preview=382ca0457ce71eff37010a7bda8e89ca Accès à la synthèse de cet épisode 6, via le blog de Raphaëlle Bats http://raphaellebats.blogspot.com/2020/10/synthese-episode7.html

Un site très intéressant à consulter : « Le climat en questions » propose des réponses de scientifiques et de chercheurs aux questions que l’on peut se poser sur les changements climatiques, l’évolution actuelle et future du climat, le fonctionnement du système climatique, l’observation des phénomènes climatiques. Chaque réponse renvoie à d’autres questions sur le même thème ou sur des thèmes connexes. On peut également tester ses connaissances à l’aide de quiz.
http://www.climat-en-questions.fr/

Sur Le blob, le portail de ressources scientifiques de la Cité des sciences et du Palais de la découverte, on retrouve un grand nombre de vidéos de scientifiques consacrées à la thématique du changement climatique avec les mots clés « réchauffement climatique » https://leblob.fr/recherche?keys=r%C3%A9chauffement+climatique&type=All&thematic=All&genre=All&public=All&accessibility=All

Documents audios

Podcasts

Gardette, Hervé. Les climatosceptiques, de Steve Bannon à Naomi Seibt, La Transition, France Culture, 27/02/2020. https://www.franceculture.fr/emissions/la-transition/les-climato-sceptiques-de-steve-bannon-a-naomi-seibt

Lagarde, Yann, A-t-il vraiment fait 20 degrés en Antarctique ? Les idées Claires, France Culture, 26/02/2020. https://www.franceculture.fr/environnement/a-t-il-vraiment-fait-20-degres-en-antarctique

Martin, Nicolas. Le réchauffement climatique est-il lié à l’activité humaine ? France Culture, 2018. https://www.franceculture.fr/ecologie-et-environnement/le-rechauffement-climatique-est-il-lie-a-lactivite-humaine

Réchauffement climatique : est-il déjà trop tard ? France Culture, 2019. https://www.franceculture.fr/ecologie-et-environnement/rechauffement-climatique-est-il-deja-trop-tard

Pour les 7-12 ans
Vidard, Mathieu, Sarfaty, Lucie, Weber, Romain. Olma, épisode 19 : Le climat et le réchauffement climatique. France Inter, 17/02/21. Durée : 13 minutes.

Filmographie

Documentaires

Borrel, Philippe. L’Urgence de ralentir, Arte éditions, 2014, 52 minutes.

Cuvelier, Franck. Vasselin, Pascal. La Fabrique de l’ignorance, Arte, 2020, 97 minutes. Sur l’agnotologie, la science qui étudie la « production d’ignorance » sous couvert de sciences instrumentalisée. https://www.arte.tv/fr/videos/091148-000-A/la-fabrique-de-l-ignorance/

Dion, Cyril. Demain. 2015. 2 h

Dion, Cyril. Après demain. 2018. 1 h 12

Gameau, Damon. 2040. 2019. 1 h 32

Gore, Al. Une suite qui dérange : le temps de l’action. 2017. 1 h 39

Medigue Hélène. On a 20 ans pour changer le monde. 2017. 1 h 26.

Noualhat, Laure. Guérin, Franck. Climato-sceptiques : la guerre du climat, 2014, 52 minutes.

Fictions

Devlin, Dean. Geostorm. 2017. 1 h 49

Emmerich, Robert. Le jour d’après. 2004. 2 h 04.

Zeitlin, Benh. Les bêtes du Sud sauvage. 2012. 1 h 32.

Série
L’Effondrement. (Canal +). Saison 1 en 8 épisodes. 2020.

Web-séries et vidéos en ligne

Data Science vs Fake : Le réchauffement climatique n’existe pas. 3 minutes. 2019.
https://www.arte.tv/fr/videos/089156-003-A/data-science-vs-fake/
Et aussi, Internet ne pollue pas ; Mesurer la perte de la biodiversité ; La fonte des glaciers fait monter les océans etc. Data Science vs Fake est une série de films d’animation conçue pour lutter contre les idées reçues et les fausses informations, en donnant les chiffres à voir grâce aux data visualisations. Une collection réalisée par Pascal Goblot, avec leblob.fr et France TV Éducation.

Reconnexion est une série Arte qui explique le lien entre deux choses qui n’ont à priori rien à voir : un papillon et un panneau solaire, une algue et l’œil, l’or et le changement climatique… Le lien, c’est bien évidemment les découvertes scientifiques. Dans chaque épisode, les chercheurs expliquent leurs travaux de façon très simple : un bon moyen d’éveiller la curiosité des élèves pour les métiers de la recherche, ainsi que pour la science en général. https://www.arte.tv/fr/videos/RC-017844/reconnexion/

Hugo Décrypte. La Théorie de l’effondrement. 2018, 1 vidéo : 4 min 32 s. https://www.youtube.com/watch?v=8gUhAq7SpZI

Ledit, Guillaume. Lanceurs d’alerte ou survivalistes sectaires : qui sont vraiment les collapsologues ? Usbek & Rica, 2019 https://usbeketrica.com/article/lanceurs-d-alerte-ou-survivalistes-sectaires-qui-sont-vraiment-les-collapsologues

 

Les bibliothèques et le changement climatique

Si l’intérêt des bibliothèques est donc visible, peut-on aujourd’hui véritablement parler d’un engagement des bibliothèques en matière de changement global ? Comme le rappelle Johanna Ouazzani-Touhami2, la notion d’engagement peut être abordée d’un point de vue économique, sociologique ou philosophique, ce qui invite à penser l’engagement comme un processus en trois temps interconnectés. Il s’agit d’abord de définir un cadre d’action qui dresse les axes de la responsabilité assumée par la personne ou l’institution engagée, puis de mettre en œuvre cet engagement à travers des actions concrètes et enfin d’évaluer cet engagement avec des indicateurs permettant de voir aussi bien l’aspect éthique et intègre de l’engagement que ses effets et impacts.
Ce sont ces trois aspects que nous avons cherché à observer à travers une enquête menée entre septembre et décembre 2020 auprès de bibliothécaires français déjà engagés dans des actions liées au changement climatique et repérés par leur participation à la mobilisation du 25 septembre 2019. Nous leur avons adressé un questionnaire3 de 46 questions, avons reçu 96 réponses, dont 49 de bibliothèques territoriales. Cet article traite des réponses de ces dernières, à travers lesquelles nous allons observer que si les actions sont foisonnantes et emblématiques du rôle que la bibliothèque veut donner à l’information dans la transformation de la société, l’absence de mention de cet engagement envers le changement climatique dans les textes stratégiques des bibliothèques répondantes et le manque d’évaluation de ces actions limitent de fait la réflexion prospective des bibliothèques envers leur impact sur la société et par rebond la reconnaissance de ce rôle par les élus.

Visibilité de l’engagement

L’engagement des bibliothèques envers le changement climatique n’apparaît pas comme une mission dans les documents cadres des bibliothèques, tels que le Manifeste de l’Unesco pour les bibliothèques publiques4 ou le code d’éthique de l’IFLA5, tous deux rédigés avant l’Agenda 2030. L’Agenda 21 de l’ONU, pourtant rédigé en 1992 et donc avant ces deux textes bibliothéconomiques, offrait une belle place à l’information, mais aucune des six occurrences ne faisait référence à la bibliothèque ou même à l’école. L’IFLA ne commencera à s’intéresser au développement durable qu’au milieu des années 2000, quand des bibliothécaires proposent de créer un groupe d’intérêt spécial, appelé ENSULIB (Environment, Sustainability and Libraries). En 2014, l’IFLA s’engage plus encore en publiant La Déclaration de Lyon6 qui vise à influencer l’ONU à l’heure de la rédaction d’un nouvel agenda de développement durable. Si l’Agenda 2030 mentionne effectivement à plusieurs reprises l’information, les bibliothèques n’y figurent toujours pas. En France, la mobilisation exceptionnelle du 25 septembre 2019 aura permis de faire bouger les lignes et les bibliothèques sont aujourd’hui mentionnées officiellement dans la feuille de route de la France comme des « relais mobilisables dans tous les territoires » pour la mise en œuvre du développement durable7. Ce rôle étant enfin posé, il reste à savoir s’il est tout autant reconnu au niveau municipal ou intercommunal par les élus et assumé par les bibliothécaires eux-mêmes dans leurs propres documents stratégiques.
Pour cela, nous avons posé deux séries de questions. La première série prend place dans la partie du questionnaire relative à l’engagement effectif des bibliothèques interrogées et la seconde dans la partie du questionnaire relative aux représentations sur le rôle des bibliothèques en général. Les résultats montrent que quand l’engagement de leur municipalité est notable pour les bibliothécaires, c’est en général sur des thématiques non culturelles, telles que l’habitat ou la mobilité. Ces réponses manifestent l’absence de la bibliothèque dans les documents stratégiques environnementaux des municipalités. Or ceci n’est pas chose nouvelle et un véritable plaidoyer est à mener pour que les bibliothèques soient considérées comme des actrices utiles sur le champ du développement durable local. Il conviendra peut-être de le commencer au niveau des associations et des défenseurs des bibliothèques, puisque le code de déontologie des bibliothèques françaises8 revu en 2020 comme la proposition de loi pour les bibliothèques9 déposée en 2021 ne mentionnent pas les questions d’écologie, d’environnement ou de climat. Si deux réponses font état d’une prise en compte directe de la bibliothèque dans ces politiques engagées pour le développement durable au niveau local, nous n’assistons pas à une vague d’injonction des municipalités10 à ce que les bibliothèques mettent en place des actions sur le climat. Au contraire, les bibliothèques sont souvent à l’initiative des actions menées et décrites dans le questionnaire (82 %), alors que la tutelle n’est à l’initiative que de 3 % des actions menées (Q.3.3.1). Cependant les dernières élections municipales, qui ont vu plusieurs municipalités être remportées par les écologistes, vont peut-être changer la donne. Il conviendra de suivre dans les années à venir l’évolution à la fois de l’engagement des municipalités et les injonctions faites aux bibliothèques.
Cette prise en compte de la bibliothèque ne peut certainement se développer qu’à condition que la bibliothèque soit en mesure de convaincre de son rôle dans ce champ d’action. Au-delà du travail de plaidoyer qui peut ou doit être mené, la question de l’affirmation de l’engagement de la bibliothèque par la bibliothèque elle-même se pose. À la question « L’engagement de votre bibliothèque envers le développement durable et/ou le changement climatique est-il rendu public ? Est-il écrit dans un document cadre (politique documentaire, projet culturel et scientifique, charte, etc.) ? Est-il manifesté par une action ou un événement d’ampleur ? Est-il manifesté par l’investissement dans un groupe de travail ? » (Q. 2.2), 45 % des bibliothèques confirment la publicisation de leur engagement. Cependant, cette mise en public se manifeste principalement à travers leur programme culturel et scientifique (59 %). En d’autres termes, les bibliothèques proposent des événements sur le climat, proposition qui fait l’objet d’une communication, mais dont on sait qu’elle a davantage pour fonction de trouver des publics pour ces événements, que de mettre en avant l’engagement de la bibliothèque sur le climat. La publicisation de l’engagement sur le climat se fait aussi à travers la participation officielle à un groupe de travail dédié (32 %) ou à travers l’inscription dans un document cadre diffusé publiquement (27 %), mais les statistiques montrent que cette publicisation reste faible. Par exemple, la Médiathèque entre Dore et Allier, précédemment citée, a créé un groupe de travail « Local Challenge » avec d’autres médiathèques et acteurs de la communauté de commune, groupe dont les ambitions participent de la publicisation de l’engagement de la bibliothèque. Ces exemples restent rares et pour un tiers des répondants, l’engagement, s’il existe, n’est pas rendu public et ne fait pas l’objet d’une exposition. Il faut mettre cette question en regard avec le faible taux de rédaction de documents stratégiques dans les bibliothèques, ce que les encouragements à rédiger des PCSES devraient faire évoluer dans les années à venir. L’Agenda 203011, qui fait une place à la valeur de l’information, et la Feuille de route de la France12, qui reconnaît le rôle des bibliothèques, sont deux outils utiles pour dresser les contours de l’engagement des bibliothèques.
Pour autant, ce défaut d’exposition n’est pas lié à une position attentiste des bibliothèques. Au contraire, celles-ci reconnaissent et assument la responsabilité qu’elles jouent en matière de lutte contre le changement climatique. À cette question de la responsabilité de l’institution : « Pensez-vous que la bibliothèque joue un rôle dans la lutte contre le changement climatique ? » (Q. 5.4), « Pour vous, peut-on parler de responsabilité de la bibliothèque ? » (Q. 5.5), quasi-unanimement, les répondants pensent que la bibliothèque joue un rôle dans la lutte contre le changement climatique. Les 4 % ayant répondu négativement à cette question précisent leur réponse en indiquant que l’impact de leur bibliothèque et de ses actions reste trop faible au regard de l’urgence de la situation. Il s’agit dès lors de voir dans quelle mesure ces engagements et ces intentions sont reflétés dans des ensembles d’action. C’est dans l’agir, dans la mise en acte, que la bibliothèque peut devenir véritablement actrice, au sens théâtral de la politique, comme le montrait Etienne Tassin13, et afficher sur la place publique son engagement.

Mise en œuvre de l’engagement

Étudier l’engagement des bibliothèques envers le changement climatique nécessite donc d’observer les actions elles-mêmes afin de voir ce qu’elles disent de cet engagement. La grande majorité des bibliothèques répondantes (73 %) ont mené des actions autour du développement durable et/ou du changement climatique en 2019 ou 2020. Pour faciliter l’étude des actions décrites, et comprendre ce qu’elles visent et permettent, nous nous sommes appuyés sur la description des actions des bibliothèques, telles que définies par David Lankes, un professeur de bibliothéconomie américain, qui a écrit l’Atlas de la nouvelle bibliothéconomie14. Pour Lankes, le rôle de la bibliothèque est d’améliorer la société par six axes de travail :

● En fournissant des connaissances, qui permettent aux individus de se construire une vision du monde.

● En invitant des conversations à se tenir au sein de la bibliothèque, soit entre les documents mis à disposition, soit entre les individus qui les empruntent, soit entre les invités de la bibliothèque et ses visiteurs dans les actions de programmation scientifique et culturelle ou dans les actions de médiation.

● En facilitant l’accès à ces connaissances du point de vue des compétences, en d’autres termes, la formation aux différentes littératies nécessaires pour entrer en conversation autour des connaissances mises à disposition.

● En incitant tout le monde à prendre part à la création/circulation de connaissances, via des mécanismes d’inclusion, via des animations participatives, via des actions hors les murs, etc.

● En affichant l’engagement actif de la bibliothèque, dans ses documents cadres, auprès des médias, auprès des publics, etc. Cet aspect a été vu dans la partie précédente.

● En développant des compétences adaptées pour l’équipe de la bibliothèque. Cette partie sera vue dans la partie 3 de cet article sur l’évaluation.

Ces six axes présentent une carte nous permettant d’identifier les types d’actions proposées et permettent ainsi de brosser le portrait d’une bibliothèque en train de participer à l’amélioration de la société par son action sur le changement climatique. Pour cela, nous avons d’abord cherché à identifier le type d’actions menées à travers une question sur l’objet de l’action (Q. 3.2). On voit dans le graphique ci-dessous que les actions relèvent principalement de la mise à disposition de ressources et de l’organisation d’événements.

Figure 1 : Répartition des actions menées par objet. Q3.3 et Q3.4 [réponse à une question à choix multiples]

Ces résultats ne sont pas étonnants, compte tenu de la spécificité de la bibliothèque : fournir de l’information et assurer une médiation de celle-ci. De même, les réponses à la question (Q. 3.3.3/3.4.3) sur l’objectif visé de l’action décrite, à savoir informer, susciter le partage ou montrer l’exemple, accentuent ces résultats en pointant l’importance de la transmission d’information (73 %) et du partage de solutions (72 %) au détriment de la transformation de la bibliothèque pouvant se présenter alors comme exemple ou modèle (36 %). Les actions de la bibliothèque de Morne à l’Eau illustrent parfaitement ce rôle de diffusion d’information : « La ville de Morne à L’Eau, meilleure petite ville pour la biodiversité 2018, poursuit ses actions en matière de partage et d’acquisition de connaissances sur la richesse de son environnement. L’action propose aux jeunes publics des activités de « vulgarisation scientifique », à travers des ateliers jeux/découvertes pour les sensibiliser à la connaissance et à la préservation de leur territoire. À long terme le projet est d’enrichir le fonds documentaire numérique de la bibliothèque par la mise à disposition de travaux de recherches universitaires soutenus par la ville et traitant de la biodiversité » (Réponse au questionnaire, Q. 3.3).
Cependant, à la question Q. 5.4, sur le rôle de la bibliothèque face au changement climatique, les bibliothécaires considèrent que l’information transmise vise d’abord à développer un esprit critique sur la question du changement climatique, plutôt qu’à transformer les pratiques directement (voir la figure 2). Semble se dégager de cela le dessin bien connu d’un engagement naturel de la bibliothèque envers l’émancipation, une bibliothèque qui fournit de l’information pour que chacun et chacune puisse comprendre et analyser l’évolution de la société. La question de la transformation des pratiques ne serait finalement que secondaire, la bibliothèque ne s’engageant pas pour une pratique ou une autre, mais s’engageant pour que les citoyens déterminent leurs meilleures conditions d’existence dans cette société. Cette position fait écho à la notion de littératie environnementale telle que proposée par Kathryn Miller. À ce sujet, Manon Leguennec écrit : « En convoquant le concept d’environmental literacy, qu’elle définit comme la « capacité à identifier un choix durable et à faire ce choix », [Kathryn Miller] affirme qu’aujourd’hui au XXIe siècle, les bibliothèques publiques ont le rôle d’enseigner la conscience environnementale à travers la programmation et les services de la bibliothèque. L’éducation à l’environnement est une autre manière pour la bibliothèque d’aider sa communauté à faire un pas de plus vers le progrès sociétal »15. Le développement d’une conscience environnementale peut alors se faire à travers ces actions de sensibilisation au développement durable, qui visent aussi bien à comprendre les enjeux qu’à développer son esprit critique sur cette notion.

Figure 2 : Répartition des rôles de la bibliothèque dans la lutte contre le changement climatique. Q 5.4 [réponse à une question à choix multiple]

Pourtant, l’étude des actions menées et décrites par les bibliothécaires dans le questionnaire montre qu’en parallèle de cet effort de conscientisation des publics, les bibliothécaires travaillent à une autre littératie, qui repose sur la pratique d’une éthique environnementale et qui appelle à un changement rapide de pratiques. De fait, si de la question des actions menées en général (voir figure 1), il ressort que les bibliothèques mènent davantage d’actions de sensibilisation que d’actions visant le changement de pratiques, l’appel à la description d’actions fait ressortir l’intérêt des bibliothèques pour cette deuxième catégorie d’actions. Ainsi, les actions décrites sont à 29 % des actions de sensibilisation (collections, conférences, projections, expositions) et à 60 % des actions de changement de pratique (atelier, bonne pratique). On ne prend pas ici en compte les événements, qui rassemblent plusieurs types d’actions, certaines de sensibilisation et d’autres de changement de pratiques.

Figure 3 : Répartition des actions décrites par type

Les actions décrites par les répondants, si elles prennent encore souvent la forme d’une sensibilisation documentaire à travers la mise à disposition de tables documentaires thématiques ou de fonds documentaires thématiques, s’ouvrent aussi à des réflexions sur les pratiques et à des encouragements au changement de pratique avec la mise à disposition d’un autocollant Zéro Déchet pour les commerçants, l’organisation d’ateliers zéro déchet ou fabrique de lessive, l’installation d’une grainothèque ou encore la participation à l’opération Le Jour de la Nuit sur la pollution lumineuse. Certains projets sont clairement des exhortations au changement des comportements quotidiens. Ainsi, la bibliothèque de Gilly sur Isère « accompagne un groupe d’habitat partagé pour le démarrage de leur projet : temps de rencontre, projections destinées à tous les publics hors le groupe, sur des thématiques comme : la gouvernance partagée, l’autonomie alimentaire, etc. » (Réponse au questionnaire, Question 3.3). Ou encore le réseau des bibliothèques de Rouen qui propose à son public des « fiches « défis zéro déchet « . Chacun pourra « emprunter » une fiche pour environ 1 mois, et tenter de réussir le défi proposé. Chaque fiche renvoie à un ouvrage présent dans les collections et empruntable pour approfondir la question abordée. À la fin du défi, un baromètre des réussites est présenté. Les gens peuvent ainsi voir quels gestes semblent les plus faciles pour se lancer. » (Réponse au questionnaire, Question 3.3). Quant aux actions proposées uniquement pour la jeunesse (7 %), elles sont bien plus délibérément tournées vers les pratiques : ateliers jeux/découvertes pour sensibiliser à la connaissance et à la préservation de son territoire, nettoyage de la nature, plantation d’arbres dans le jardin de la bibliothèque, ateliers et jeu autour du tri, etc.
En cela, la bibliothèque s’inscrit résolument dans la définition de l’éducation au développement durable telle que proposée par l’Unesco : « L’éducation est un élément essentiel de la réponse mondiale au changement climatique. Elle aide les gens à comprendre et à faire face aux effets du réchauffement climatique, augmente les connaissances sur le climat parmi les jeunes, encourage des changements dans leurs attitudes et leurs comportements, et les aide à s’adapter aux tendances liées aux changements climatiques »16. On retrouve là également trois des modes de médiation au changement climatique, tels que décrits par Marine Soichot dans son étude des actions des musées17 : le mode informatif (« Donner des informations claires et objectives sur toutes les dimensions du problème »), le mode interventionniste pour un changement de comportements (« Favoriser l’adoption de comportement écologiquement vertueux ») et le mode critique (« Interroger la définition dominante du problème climatique et la notion de développement durable »). Ce sont donc à deux types de littératies environnementales que les bibliothécaires se livrent en parallèle : éveiller les consciences sur la situation et faire amorcer des changements de pratiques, dessinant ainsi une bibliothèque dont l’engagement reflète la capacité à se saisir de l’urgence à agir. Reste à savoir si ces actions sont porteuses et ont un effet réel sur les consciences et les pratiques.

L’évaluation de l’engagement

Car si agir permet que l’engagement ne soit pas juste un effet d’annonce, il convient de s’assurer également que l’engagement ait un effet pour qu’il ne soit pas action vaine. Les bibliothèques se sont emparées de la question de l’évaluation de l’impact depuis une dizaine d’années. Après les enquêtes menées en Espagne par exemple18, les recherches d’Aabo19 ou encore le rapport The Weight They Worth20, les bibliothèques françaises ont lancé au milieu des années 2010 un groupe d’advocacy au sein de l’ABF, qui avait pour mission de mener une grande enquête d’impact. Ce projet, mené avec la Bpi et le ministère de la Culture, a pour l’instant fait l’objet d’un rapport sur la mesure des effets des bibliothèques21 (Le Quéau et Zerbib) et les résultats de l’enquête elle-même devraient être rendus publics en 2021. S’il a fallu autant de temps, et c’est tout à fait clair dans le rapport de Le Quéau et Zerbib, c’est que la tâche est ardue à mener. Et si elle l’est au niveau national, on peut imaginer qu’elle le soit encore plus au niveau local, quand les moyens et les expertises en enquêtes sociologiques ne sont pas aussi disponibles. Il convient donc d’approcher la question de l’évaluation de l’action et de l’engagement avec des indicateurs qui seraient les plus accessibles aux bibliothèques.
Dans le cas de l’engagement pour le développement durable, nous pouvons définir trois manières d’aborder la question de l’évaluation. La première reviendrait à réussir à traduire les indicateurs de l’Agenda 2030 en indicateurs bibliothéconomiques. Il s’agirait alors de pouvoir montrer que les bibliothèques participent de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). Malheureusement, ces indicateurs sont trop spécifiques pour être traduits convenablement pour le secteur bibliothéconomique. Ce travail de traduction des indicateurs n’a donc pas encore abouti, mais reste toutefois un objet en cours de réflexion pour des associations telles que EBLIDA et son groupe de travail ELSIA-EG22.
Une autre approche serait tout simplement d’évaluer chaque action liée au changement climatique ou au développement durable de la même manière que leurs autres actions. Il s’agirait alors d’utiliser des indicateurs permettant de s’assurer que l’action a atteint ses objectifs et qui permettent, le cas échéant, de repenser et rectifier l’action menée. Il convient pour cela d’avoir à la fois des indicateurs de résultats et des indicateurs d’un impact direct sur les bénéficiaires. Pour voir si de tels indicateurs sont utilisés, nous avons demandé aux participants : « Quels indicateurs avez-vous choisi pour évaluer cette action ? » (Q. 3.3.6). Aucun indicateur n’est utilisé dans 8 % des cas. Quand un indicateur est utilisé, il s’agit d’indicateurs qui ne sont pas spécifiques au développement durable, comme le taux de fréquentation (54 %) et le taux de rotation des documents ou des ressources (22 %). Des indicateurs relatifs à l’impact sont également utilisés : indicateurs liés aux retours d’expériences (19 %), à l’impact de l’action à court, moyen et long terme (17 %) et à la satisfaction des participants (15 %). À titre d’exemple d’impacts, on peut citer « la création d’un réseau de citoyens actifs » à la Médiathèque municipale Vélizy-Villacoublay, le « nombre d’observations d’oiseaux » suite à l’installation de nichoirs à la Médiathèque Antoine de Saint-Exupéry, ou la pesée systématique de chaque objet réparé « afin qu’à la fin de chaque saison, on connaisse le poids de l’ensemble des objets qui ne sont pas partis à la poubelle » à la Médiathèque Philéas Fogg de St-Aubin du Pavail23. Enfin, une série d’indicateurs relatifs à la réception des actions sont utilisés, tels que la diversité des publics (4 %), l’implication des participants (7 %), l’implication des partenaires (4 %), l’intérêt suscité (8 %), le relais de l’événement par les médias, les partenaires, les réseaux sociaux (7 %). Les indicateurs relatifs au fonctionnement interne sont étonnamment peut-être les moins utilisés : coût financier (1 %), respect des délais (1 %), temps d’investissement des équipes (3 %), pérennité de l’action (4 %), et implication de la tutelle (3 %). L’existence de ces indicateurs et leur connaissance par les bibliothèques, laissent voir la possibilité pour les bibliothèques de mener à bien une politique d’évaluation de leurs actions en matière de développement durable, à la condition qu’elles développent une politique interne d’évaluation de leurs actions en général, ce qui n’est peut-être pas encore assez le cas.
Enfin, une dernière approche de l’évaluation consisterait à identifier des indicateurs afin de s’assurer que la bibliothèque a bien mis en œuvre tout ce qui lui était possible pour agir. Il convient pour cela d’avoir des indicateurs de fonctionnement (personnels mobilisés, coût, délais, etc.) et des indicateurs d’intention (formation du personnel, budget prévisionnel). Les indicateurs de fonctionnement sont particulièrement sous-utilisés (voir ci-dessus) et les indicateurs d’intention n’ont pas été mentionnés dans les réponses à la question précédente, ou à la question suivante : « Quels indicateurs avez-vous prévu de mesurer pour évaluer la mise en œuvre de votre engagement ? » (Q. 2.3). D’une manière générale, les bibliothèques reconnaissent ne pas être en mesure d’évaluer la mise en œuvre de leur engagement (94 % des réponses). Cependant quelques rares bibliothèques font état d’une volonté de mise en place d’un dispositif ayant pour objectif de définir de tels indicateurs ou d’utiliser des indicateurs de l’Agenda 2030, ce qui est d’ailleurs un des usages de cet outil comme 23 % des 81 % de répondants qui l’utilisent l’ont confirmé. Peut-être faut-il travailler aujourd’hui à développer des outils qui permettraient aux bibliothèques de faire des auto-diagnostics de leur engagement ODD par ODD24. Sur le modèle de l’audit d’inclusion sociale du CULC25, il s’agirait de définir des niveaux attendus d’engagement, mesurables par des indicateurs de fonctionnement, d’intention, d’impact et de réceptivité. Ce travail, qui reste à faire, est en germe dans nos recherches et nous espérons pouvoir établir un tel outil qui faciliterait à la fois la définition de l’engagement des bibliothèques, les modalités des actions à mener et la promotion de leur rôle vis-à-vis des tutelles.

« 
L’engagement pour la lutte contre le changement climatique ne coûte pas plus que les autres actions menées par les bibliothèques.
»

Conclusion

À la question relative aux freins rencontrés pour mettre en œuvre des actions liées au changement climatique, 81 % des répondants déclarent rencontrer des difficultés en termes de compétences, de motivation, de budget ou d’intérêt de la tutelle et des publics. En revanche, pour 19 % d’entre eux, et c’est la réponse la plus représentée, aucune difficulté n’a fait obstacle à la mise en œuvre de l’action. Peut-être faut-il arrêter cet article sur cette donnée et rappeler que l’engagement pour la lutte contre le changement climatique ne coûte pas plus que les autres actions menées par les bibliothèques. Certes, il faudrait l’accompagner d’une stratégie officielle et d’une évaluation solide, mais cela est vrai de toutes les politiques publiques. Il ne reste donc plus qu’à se lancer et participer à notre niveau à ces transformations sociales nécessaires aujourd’hui.

 

 

Dystopies et changements climatiques

Sécheresse1, Déluge2, Mers mortes3, Le dernier hiver4… sont autant de titres évocateurs d’une littérature manifestant un intérêt pour les problèmes liés aux dérèglements climatiques. En effet, les fictions d’anticipation reflétant nos angoisses à ce sujet se sont développées de façon exponentielle ces cinq dernières années, notamment aux États-Unis en réaction à Donald Trump et aux climato-sceptiques. La « fiction climatique », également appelée Cli-fi (pour climate fiction), un terme dont l’écrivain et blogueur Dan Bloom est à l’origine (2008), dénonce les dérives de notre société qui mettent à mal notre planète en causant pollution, disparition des abeilles, pénurie d’eau… Cette sous-branche de la science-fiction apocalyptique dans laquelle la destruction du monde est provoquée par des dérèglements climatiques croît en France alors que la littérature de notre pays, contrairement à la littérature américaine, s’est longtemps passionnée pour la ville. Et même l’armée française s’y intéresse et prend très au sérieux les auteurs de SF en constituant sa Red Team. La ministre des armées, Florence Parly, avait dévoilé en décembre dernier les noms des 10 écrivains retenus pour cette mission : anticiper les menaces futures (dont le réchauffement climatique) à travers l’écriture de scénarios à venir.
Il est à noter aussi que depuis 2018, le Prix du roman d’écologie récompense chaque année un roman francophone dont l’intrigue consacre une part importante aux questions liées au climat.

La littérature dédiée aux adolescents n’est pas en reste dans ce domaine. Les dangers liés à une surexploitation de la nature se retrouvent en effet souvent au cœur de nombreux romans d’anticipation. Et afin de préparer le lecteur au pire et pour le motiver à des changements de comportement dans le présent, la dystopie est un moyen auquel les auteurs ont fréquemment recours. Contre-utopie, elle présente l’idée d’un futur peu encourageant, dont les causes sont souvent à chercher dans les dérives de notre société. Critiques de notre système de vie contemporain, ces ouvrages présentent les luttes de protagonistes contre l’oppresseur que nous aurons peut-être nous-mêmes à mener si nos efforts ne suffisent pas ces prochaines années pour endiguer le réchauffement climatique et contrôler la gestion de nos ressources. Ils dénoncent ainsi des sociétés grisées par les progrès technologiques et scientifiques, par le contrôle de la nature. Et certaines histoires virent parfois au cauchemar…

Une planète Terre mise à mal…

Hélène Montardre, dans sa série Océania, et Jean-Michel Payet, dans le premier volet de sa série 2065 : La ville engloutie, emmènent le lecteur dans un futur proche, dans un monde où la montée des mers et des océans a bien eu lieu, jusqu’à la disparition de certaines parties du globe. Dans Océania : la Prophétie des oiseaux, nous accompagnons Flavia, qui vit avec son grand-père, guetteur. Ce dernier, avec ses collègues et certains chercheurs scientifiques, avait bien alerté sur des changements climatiques annoncés par le comportement des oiseaux. Mais ignorée des pouvoirs publics, la fonte des glaces a inéluctablement eu lieu et les habitants des côtes se retrouvent à devoir se déplacer. Pour sauver sa petite-fille, le grand-père va confier Flavia à un navigateur qui s’apprête à rejoindre l’Amérique et tenter de passer la gigantesque digue qui protège la ville de New York du déferlement des vagues et de l’arrivée massive de milliers de personnes du monde entier qui cherchent refuge. Le lecteur se retrouve alors plongé dans une société sous haute surveillance, privée de liberté et de tout contact avec les autres pays.
C’est dans un style différent que, dans le roman de Jean-Michel Payet, nous suivons les aventures d’Émile, récemment piqué par la remarque d’une camarade qui le traite de gros naze. En visite chez son grand-père, il découvre alors que ce dernier, via un trou dans la maison, se rend régulièrement dans le passé. Il décide d’emprunter lui aussi ce passage temporel, mais pour se projeter dans le futur, afin de vérifier s’il deviendra bien ce que la fille qu’il admire lui a dit. Mais difficile pour lui de retrouver sa ville, engloutie par les eaux, en proie à de fréquents tsunamis.
Si nous sommes captivés par les aventures de ces deux protagonistes, c’est que la montée des mers et des océans est un processus déjà bien enclenché et que nous ne pouvons que nous identifier à un monde où les images d’ours polaires à la dérive sur une banquise émiettée ou d’îles qui disparaissent sous les eaux sont montrées depuis déjà quelques temps par les médias.
C’est aussi contre les forces d’une nature détraquée que Reda, dans Terre de tempêtes (Johan Heliot), également chez son grand-père, va devoir se battre face à un cyclone d’une puissance inouïe. Là encore, dans un futur proche (2060), le climat en Europe a bien changé : le Nord est devenu une zone marécageuse, tandis que le Sud subit la sécheresse. Une erreur dans une exploitation expérimentale a provoqué un rot de méthane, consécutif à un accident sismique, qui a libéré dans l’Atlantique nord une poche de gaz, vingt fois plus nocif que le dioxyde de carbone. L’effet de serre atteint alors le seuil de 27°C, température idéale pour la formation de cyclones. Si le sujet paraît complexe, c’est en toute simplicité que l’auteur dénonce dans ce livre la course à l’exploitation d’énergies de substitution due à l’accroissement de la consommation, souvent au détriment de la population.

Une des autres conséquences dramatiques des changements climatiques est la disparition d’espèces animales et végétales. C’est ce thème de l’effondrement qu’a choisi Maja Lunde dans son magnifique roman Une histoire des abeilles qui, par sa structure originale, nous plonge dans trois époques et univers différents. D’un chapitre à l’autre, le lecteur suit William en Angleterre en 1851, George en Ohio en 2007 et Tao en Chine en 2098. À travers ces personnages, le lecteur est amené à comprendre, via une histoire des abeilles et de l’apiculture, les prémices et les conséquences effroyables de la disparition de ces insectes, on le sait, indispensables à la pollinisation.
Comme un cri d’alerte là encore, les auteurs du recueil Nouvelles vertes nous mettent face à nos responsabilités en nous faisant prendre conscience (ou un peu plus conscience) de la fragilité de la Terre. La faune marine en danger ou la surexploitation des forêts tropicales sont deux exemples des conséquences désastreuses des actes des habitants de notre planète parfois loin de penser qu’un sac plastique lâché dans la nature peut être mangé par un dauphin (qui le prend pour un calamar), cette ingestion pouvant conduire à la mort de l’animal.

Enfin, les particules en suspension, le dioxyde de soufre, les composés organiques volatiles et autres gaz modifient la qualité de l’air que l’on respire et ont des effets significatifs sur la santé et l’environnement. Dans des scénarios poussés à l’extrême, Carina Rozenfeld (dans Les clefs de Babel) et Thimotée de Fombelle (dans Céleste, ma planète, Prix du Festival du livre jeunesse d’Annemasse), plongent le lecteur dans des mondes futurs où l’air est devenu irrespirable. Dans le premier ouvrage, récompensé par le Prix des Incorruptibles niveau 5e-4e en 2011, le Grand Nuage (immense nuage toxique qui détruit toute vie sur Terre) a empoisonné la planète à la suite des explosions massives d’usines chimiques et de centrales nucléaires. Les hommes se sont réfugiés dans une immense tour nommée Babel.
Cette image de tour, cette fois-ci à la façade de verre ou de briques, se retrouve dans Céleste, ma planète, planète de fumée sur laquelle les hommes ont dû, là encore, construire des immeubles toujours plus hauts, à la recherche d’un air plus respirable, au-dessus des nuages de pollution. Avec, dans les deux ouvrages, une répartition inégalitaire des habitants en classes dans une société qui protège les plus aisés de la pollution atmosphérique. Ces derniers occupent les étages les plus élevés de la tour dans Les clefs de Babel tandis que les plus faibles vivent en bas, rejetés, là où l’air est le plus pollué et où les conditions de vie s’avèrent sordides : humidité, logements sombres et exigus.

… Sur laquelle les hommes doivent survivre

Dans la plupart des ouvrages d’anticipation illustrant les conséquences des changements climatiques, c’est donc à un contexte bien souvent postapocalyptique que les protagonistes doivent s’adapter tant bien que mal, à un monde où les populations encore épargnées tentent de survivre.

Dans le fascinant roman réaliste de Jean Hegland, Dans la forêt, les habitants ont quitté la ville, fuyant des virus et le manque de ressources, une crise économique… (impossible de ne pas établir de parallèle avec la période de pandémie que nous traversons). Une famille isolée au milieu de la forêt décide de rester dans cet écrin de verdure et se retrouve à vivre en autarcie. La relation des deux sœurs, leurs passions (la danse pour l’une, la littérature pour l’autre) et leur force de vivre contre la rudesse du quotidien ramènent le lecteur à une certaine humilité et à une réflexion croissante sur le rapport entre l’homme et la nature.
La forêt, Samaa, elle, ne sait pas ce que c’est. Les arbres, elle ne les voit que sous forme de troncs quand un groupe de chasseurs en rapporte pour vendre le bois. Car dans Et le désert disparaîtra, de Marie Pavlenko, la vie a presque disparu. Plus d’animaux ; partout, le désert. Et c’est toujours plus loin que la tribu nomade doit partir traquer ce matériau devenu si rare et si convoité tandis que les femmes et les enfants attendent le retour des hommes, se nourrissant de barres protéinées et d’eau gélifiée.
C’est ce thème de la sécheresse et de la pénurie d’eau qui sera au cœur du roman à suspens Dry (Lauréat du prix Young Adult 2018 du Salon du Livre de Marseille et dans la sélection du Prix des Incorruptibles 2020-2021, niveau 3e-lycée), de Neal et Jarrod Shusterman. Le manque d’eau en Californie va vite mener les habitants à une guerre du chacun pour soi jusqu’à transformer certains d’entre eux en zombies assoiffés prêts à tout pour une gorgée du précieux liquide. Les auteurs y dépeignent également, parmi les héros, une famille survivaliste qui s’était préparée à une éventuelle catastrophe, mais qui ne sera pas épargnée pour autant par les difficultés dans cette course effrénée contre le temps où chaque heure passée sans boire peut coûter la vie.
On retrouve l’évocation de ce mode de vie dans la palpitante série Ciel, de Johan Heliot, via le personnage du grand-père qui a pour volonté de rassembler sa famille pour les fêtes de Noël chez lui, dans les Vosges. Mais cette réunion familiale ne pourra pas avoir lieu. CIEL, intelligence artificielle toute puissante qui a remplacé Internet, a pris possession de toutes les machines afin de maîtriser les humains et ainsi sauvegarder la planète en stoppant toute pollution et autres gestes mettant la Terre en péril. Cette famille, éclatée aux quatre coins de l’Europe, se retrouve alors sous l’emprise dictatoriale des robots. Chacun des membres tente tant bien que mal de survivre, isolés à Berlin, Paris, en Italie ou encore dans le Vercors.

Dans les deux bandes dessinées The End, de Zep et Après le monde, de Timothée Leman, la nature a repris le dessus et seuls quelques survivants sur Terre ont été épargnés par l’apocalypse. Dans le premier ouvrage, l’auteur pose la question d’une nouvelle chance pour l’espèce humaine. Une équipe de chercheurs, en Suède, travaille sur la communication des arbres entre eux et avec les hommes. Ils tentent de démontrer que ces végétaux détiennent les secrets de la Terre à travers leur ADN, leur codex. C’est en recoupant leurs génomes avec la mort mystérieuse de promeneurs en forêt espagnole, le comportement inhabituel des animaux sauvages et la présence de champignons toxiques que le professeur comprendra que ces événements sonnent l’alerte d’un drame planétaire immédiat qui n’épargnera que Théodore, le stagiaire du groupe, et quelques autres. Le lecteur en conclut alors qu’ils devront, ensemble, se réorganiser pour construire une nouvelle société.
Dans Après le monde, Héli et Selen sont les deux derniers survivants. Tous les autres ont été aspirés, pensent-ils, par une tour de lumière blanche. Ensemble, ils vont partir et tenter de découvrir l’origine de cette catastrophe. Contenant très peu de texte, cette BD est servie par un graphisme original et onirique. Dans un autre style, les pages de l’œuvre de Zep sont également très belles et surprenantes, en couleurs monochromes.

Et pour terminer cette série de livres dans lesquels les hommes ne peuvent plus habiter la Terre comme avant, on en arrive aux sous-genres planet et space opera.
Dans sa série en cinq cycles, Les mondes d’Aldébaran, Léo fait évoluer ses personnages sur des planètes étrangères et mystérieuses, des exoplanètes. Nous sommes au XXIIe siècle. Au siècle précédent, les conditions sur Terre se sont dégradées à la suite du réchauffement de la planète, avec une pollution toujours croissante et des guerres religieuses dévastatrices. Grâce à la technologie avancée et aux progrès dans la conquête de l’espace, de nouvelles planètes habitables sont découvertes. Les protagonistes de ces bandes dessinées sont donc les premiers colons d’Aldébaran. Privés de communication avec la Terre, ils explorent cet univers peuplé d’animaux fascinants et d’une flore étonnante. Cent ans après leur arrivée, d’étranges phénomènes surviennent.
Si le graphisme des personnages est parfois désuet, l’univers créé par l’auteur et l’intrigue tiennent le lecteur en haleine. Ces ouvrages restent destinés à un public de lycéens, certaines scènes se présentant comme sensuelles ou violentes.
L’étonnante novella de Liu Cixin, Terre errante, traduite du chinois et adaptée au cinéma en 2019, appartient quant à elle à la branche du space opera. L’intrigue se déroule dans l’espace. La Terre se meurt, le soleil se transforme progressivement en géante rouge. Pour éviter l’extinction de notre planète, les Nations imaginent un projet fou : transformer la Terre en un vaisseau spatial. En construisant d’immenses propulseurs plasma, ils arracheront cette dernière de son orbite et la mèneront vers le système de Proxima de Centaure.
Cette œuvre de qualité, qui laisse au lecteur des images fortes, entre tout à fait résonance dans le contexte actuel de la course à la conquête spatiale notamment avec l’exploration de Mars pour laquelle la Chine est devenue une superpuissance.

De nouveaux modèles d’éco-citoyenneté

Mais l’accès à d’autres planètes n’est pas le seul recours imaginé par les auteurs s’intéressant aux problèmes d’environnement.
Tout le récit de Christian Grenier, par exemple, repose sur la quête d’un monde utopique, d’un pays mystérieux : Écoland. À la recherche de cet idéal : Vitalin, souhaitant retrouver sa compagne, et Clovisse, en mission secrète pour le gouvernement. Leurs routes vont se croiser. Mais que vont-ils trouver ? Ce roman, édité en 2003, mais dont l’écriture aurait débuté bien auparavant, se voulait au départ une fiction d’anticipation. Mais aujourd’hui, l’ouvrage semble réaliste, offrant une réflexion sur l’écologie, la décroissance, la mutualisation de nos connaissances, les alternatives possibles à notre mode de vie, afin de sortir de la surconsommation responsable d’une pollution massive.
Jean-Luc Mercastel nous emmène quant à lui dans un monde beaucoup plus radical, Un monde pour Clara. Si les mouvements des jeunes citoyens pour un respect de l’environnement après divers accidents nucléaires représentaient au départ une lutte juste, la construction d’un nouveau modèle a plongé les habitants dans la terreur d’une dictature avec, à sa tête, Les enfants de Gaïa, une secte ultra puissante prête à tout au nom de l’écologie. L’auteur présente à travers cet ouvrage de science-fiction les dérives possibles d’un idéal vert et l’aveuglement des hommes dès leur accession au pouvoir.
Pour finir sur un ton plus léger, empreint d’humour, l’éditeur Thierry Magnier, dans Nouvelles re-vertes, toujours sur le principe du recueil de nouvelles, propose cette fois-ci des récits plus optimistes sur la Terre de demain.

Cette littérature de science-fiction ou d’anticipation axée sur les dérèglements climatiques trouve une place toute naturelle dans nos CDI. Le large éventail de titres édités (seule une petite sélection est mentionnée dans cet article) permet d’accompagner les élèves et d’enrichir leur réflexion, puisque l’on sait que l’éducation au développement durable se retrouve aujourd’hui dans les programmes de nombreuses disciplines et que des éco-délégués sont élus depuis quelques années dans les collèges et les lycées. Plaisantes à lire, ces fictions ne peuvent qu’aider les élèves à prendre conscience des enjeux de nos actes pour la planète et peut-être, les inciter à s’engager au quotidien en tant que citoyens. Les notes en fin d’ouvrages que les auteurs ou éditeurs proposent parfois sur le sujet sont un plus et confirment que le combat contre le réchauffement climatique est une préoccupation sociétale croissante.