L’entrée progressive du paradigme inclusif à l’École

L’entrée du paradigme inclusif à l’École s’inscrit dans une évolution à la fois terminologique et conceptuelle qui a eu lieu au tournant du XXIe siècle. Pour le comprendre, il paraît d’abord nécessaire de faire un détour socio-historique. En effet, « l’inclusion scolaire ne s’oppose pas seulement à l’exclusion, mais aussi à l’intégration ». (Armstrong, 2006, p. 73.) Si l’exclusion n’est aujourd’hui plus de mise, le principe d’éducabilité (Meirieu, 1991) étant désormais reconnu, la prise en compte de la diversité des élèves a évolué. Il s’agira ensuite de préciser les conditions nécessaires à la mise en place d’une École inclusive. En effet, le paradigme inclusif comporte une radicalité dans son principe mais aussi dans les pratiques pédagogiques qu’elle appelle.

1. Changement de paradigme : de l’intégration à l’inclusion

Cette première partie aborde les principaux enjeux liés à l’École inclusive qui ont évolué au cours du temps.

1.1 De l’intégration scolaire…

Le paradigme intégratif a débuté en France avec la promulgation de la loi du 30 juin 19751. Durant cette période, les élèves en situation de handicap ne bénéficiaient d’aucune adaptation scolaire, d’aucune mesure compensatoire pour suivre les enseignements dispensés. Leur réussite en milieu scolaire ordinaire était uniquement à leur charge (Göranson, 2012). S’ils n’étaient pas en mesure de suivre l’enseignement ordinaire, leur expérience scolaire se résumait à celle d’un simple « visiteur » (Plaisance, 2012 ; Ebersold & Mauguin, 2016 ; Bedoin, Despois & Givras, 2018). Ces élèves intégrés qui ne pouvaient pas suivre une scolarisation en milieu ordinaire ne bénéficiaient que d’un accès physique à l’école. Ils finissaient par être «  »exclus » d’une école ordinaire, non pensée pour des besoins éducatifs particuliers » (Pelletier, 2020, p. 18) et se retrouvaient orientés vers l’enseignement spécialisé.

1.2 … au principe d’inclusion

Le paradigme inclusif, alternatif à celui intégratif (Lansade, 2023), trouve sa source dans les textes des grands organismes internationaux des années 1990. La Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous (EPT), adoptée en Thaïlande en 1990, présente une vision de l’éducation reposant sur l’universalité et l’équité. La Déclaration de Salamanque, en 1994, reprend dans son article 2 le concept d’EPT en stipulant que l’école ordinaire doit accueillir tous les élèves en tenant compte de leurs besoins. La Charte de Luxembourg (1996) poursuit cette ligne directrice en déclarant que « l’école pour tous et pour chacun entend s’adapter à la personne et non l’inverse ». L’École a donc la responsabilité de mettre en place les conditions de réussite pour tous les élèves (Albrecht, Ravaud & Stiker, 2001). Cette réussite dans le milieu scolaire ordinaire ne dépend plus seulement des efforts fournis par l’élève en situation de handicap, mais aussi et surtout des ajustements pédagogiques mis en place (Rousseau & Prudhomme, 2010).
Le paradigme inclusif a suscité en France de nombreux débats dans les discours politiques et au sein de la communauté scientifique. L’acception du terme « inclusion » ne faisait pas consensus dans les années 2000. Éric Plaisance et ses collègues (2007) ont expliqué sur ce point que « le vocabulaire de l’inclusion n’est guère utilisé en français pour désigner des processus concernant des personnes. Il est au contraire courant en langue anglaise, souvent couplé à l’expression éducation inclusive, de plus en plus adoptée dans les organismes internationaux. » (p. 159.) C’est ainsi que Jean-François Chossy (2003), député de la Loire, a choisi le terme d’intégration dans son rapport sur « la situation des personnes autistes en France » plutôt que celui d’inclusion « […] qui veut dire clairement “renfermer dans…” ». (p. 35.) La même année, Yvan Lachaud (2003), député du Gard, s’indignait, quant à lui, dans son rapport sur « l’intégration des enfants handicapés », de l’usage du terme d’intégration scolaire : « […]  il n’est pas concevable qu’un individu ait besoin d’intégrer la communauté nationale, sauf à en être étranger ». (p. 106.)
Au cœur de cette dissonance terminologique et conceptuelle, les auteurs de la loi du 11 février 20052 ont fait le choix de ne pas mentionner le terme « inclusion ». Sans citer explicitement le terme inclusion, ce texte législatif a néanmoins permis d’ouvrir la voie au paradigme inclusif. Il a fait entrer le champ du handicap dans le droit commun (Bedoin & Janner-Raimondi, 2017), en dotant les personnes en situation de handicap de deux types de droits : un droit à la compensation quels que soient l’origine et la nature de la déficience, l’âge ou le mode de vie (article 11) ainsi qu’un droit à l’inscription, pour tous les enfants en situation de handicap, dans leur école de quartier (article 19).

1.3 De l’inclusion scolaire…

Huit ans après la promulgation de la loi de 2005, les auteurs de la loi du 8 juillet 20133 ont explicitement mentionné le syntagme « inclusion scolaire » dans leur article 2 : « Il [le service public de l’éducation] veille à l’inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction. » La loi de 2013 reconnaît l’éducabilité de tout enfant (article 2) et concerne un public d’élèves à besoins éducatifs particuliers (BEP), plus large que les élèves en situation de handicap4.
Serge Thomazet, Corinne Mérini et Elvire Gaime (2014) proposent une synthèse sur le changement qui s’est opéré entre la loi de 2005 et de celle de 2013 : « l’école inclusive est avant tout un principe, contenu en tant que tel dans la loi du 11 février 2005 et dont les termes sont entrés dans la prescription avec la loi du 8 juillet 2013 ». (p. 69.) Serge Ebersold (2009) développe ce dernier point ainsi : « le terme [inclusion] désigne désormais l’exigence faite au système éducatif d’assurer la réussite scolaire et l’inscription sociale de tout élève indépendamment de ses caractéristiques individuelles ou sociales ». (p. 79.) La diversité des besoins éducatifs de chaque apprenant, au-delà d’une situation de handicap, doit donc être accueillie et prise en compte par les enseignants. L’École doit ainsi trouver dans la diversité des profils de ses élèves, la singularité de chacun pour offrir un enseignement accessible à tous. Pour atteindre cet objectif, Charles Gardou (2012) confie une mission délicate mais essentielle à l’École : celle de réussir à « conjuguer les singularités, sans les essentialiser ». (p. 43.) L’École inclusive apporte une plus-value, selon Émilie Chevallier-Rodrigues et ses consœurs (2019) : « une lecture en positif de la diversité en induisant un réel enrichissement des pratiques pour donner à tous les élèves les moyens de se saisir pleinement de leur scolarité ». (p. 142.) Pour que la diversité soit vectrice d’enrichissement, Diane Bedoin (2016) souligne qu’il est essentielle de maintenir une grande vigilance quant aux conditions d’accueil réservées aux enfants en situation de handicap. Martine Janner-Raimondi (2017) précise que cet accueil nécessite « la prise en compte d’une spécificité de besoin(s), articulée à une non-stigmatisation ainsi qu’à une considération égale entre les êtres humains ». (p. 79.) En replaçant ces propos dans un contexte scolaire, les concepts de non-discrimination et d’équité doivent être couplés à la prise en compte de ces besoins éducatifs particuliers. Il faut identifier la spécificité de ces besoins pour les élèves en situation de handicap, condition sans laquelle un statut d’élève ne peut être reconnu. Godefroy Lansade (2017) ajoute que, dans le paradigme inclusif, cet accueil doit être pensé selon trois dimensions : « physique, sociale et épistémique ». (p. 18.) Tout enfant a, en effet, un droit d’accès physique pour suivre un parcours scolaire dans son école de quartier. Il doit aussi pouvoir tirer parti d’une socialisation avec ses pairs et doit enfin pouvoir bénéficier d’une accessibilisation des savoirs pour progresser dans ses apprentissages (Thomazet, 2008).

1.4 … à la scolarité inclusive

Dans la loi du 26 juillet 20195, nous pouvons repérer un nouveau glissement terminologique et conceptuel qui s’opère entre « une inclusion scolaire » (loi de 2013) et « une scolarisation inclusive » (loi de 2019). À notre connaissance, les législateurs n’ont pas pris le soin d’expliciter ce qu’ils entendaient par scolarisation inclusive, pensée pour chaque enfant qu’il soit en situation de handicap ou non.
Au-delà des termes employés et des concepts qu’ils recouvrent, Serge Thomazet (2008) considère que la mise en place de l’École inclusive implique une « véritable rupture avec les pratiques traditionnelles ». (p. 129.) Nous allons, à présent, nous attacher à définir ces transformations structurelles et profondes permettant à l’École de devenir inclusive.

2. Changement de pratiques induit par l’École inclusive

Cette seconde partie traite des pratiques liées à l’École inclusive qui rompent avec la forme scolaire traditionnelle (Vincent, 1994) sur plusieurs points. Ces pratiques inclusives impliquent que l’École accueille la diversité dans toute sa richesse.

2.1 École inclusive et partenariat

La mise en place de l’École inclusive est une œuvre commune nécessitant l’implication de tous les partenaires, membres de la communauté éducative.
Philippe Tremblay (2020) précise que, dans une École inclusive, tous les professionnels sont amenés à collaborer « à l’intérieur et à l’extérieur de ses murs ». (p. 104.) Deux types de partenariat sont nécessaires pour que l’École puisse fonctionner dans un paradigme inclusif : le co-enseignement (Tremblay, 2015) et l’intermétier (Thomazet & Mérini, 2014).
Le partenariat au sein de l’équipe pédagogique prend la forme du co-enseignement. Nous reprenons la définition que Philippe Tremblay (2015) a proposée : « Un travail pédagogique en commun, dans un même groupe, temps et espace, de deux enseignants partageant les responsabilités éducatives pour atteindre des objectifs spécifiques et partagés ». (p. 108.) Cette définition à spectre large du co-enseignement comprend tout travail réalisé conjointement par plusieurs enseignants, voire professionnels, sur un même espace-temps, nommé « chronotope d’apprentissage » (Colleoni & Spada, 2021, p. 68).
Le partenariat tourné vers les personnels extérieurs à l’École se développe, quant à lui, sous la forme d’intermétier. L’espace d’intermétier se définit, selon Serge Thomazet et Corinne Mérini (2014), comme une forme de travail collectif se mettant en place entre l’école, le secteur médico-social et la famille. L’éducation inclusive rassemble des professionnels de divers horizons œuvrant de concert à sa mise en place. Ces liens partenariaux s’entrecroisent et relient inextricablement l’École et la société.
Ces deux formes partenariales étayent un des principes fondateurs de l’éducation inclusive : il n’est pas concevable de « faire reposer la réussite du tournant inclusif sur les seules épaules des enseignants ». (Ployé, 2018, p. 144.) C’est ainsi que l’École doit se définir « en tant que projet, c’est donc un objet partagé ». (Thomazet, Mérini & Gaime, 2014, p. 70.) Ce projet commun nécessite un partenariat et un engagement de tous les membres de la communauté éducative : ils sont tous responsables.

2.2 École inclusive et conception universelle

L’École se doit d’accueillir tous les élèves (Déclaration de Salamanque, 1994) tout en s’adaptant à la singularité de chaque apprenant (Charte de Luxembourg, 1996). La conception universelle de l’apprentissage (CUA) permet un accueil sans discrimination à l’École. Elle prend, en effet, en compte la diversité des besoins de tous les élèves.
Ce sont les architectes en premier qui ont souligné l’intérêt d’adopter une conception universelle dans la construction des bâtiments en pensant leur accessibilité en amont et non en aval. Cette conception s’écarte d’une logique réparatrice, car elle est « proactive, [il faut agir] sans attendre que les obstacles se fassent ressentir » (Odier-Guedj et al., 2023, p. 134). Par exemple, la rampe d’accès permet, contrairement aux escaliers, un accès sans entrave physique ou physiologique que l’on soit en situation de handicap ou non (Gardou, 2011).
La conception universelle de l’apprentissage (CUA) rend accessible, quant à elle, les savoirs et les compétences. Elle est définie selon trois principes par le Center for Applied Special Technology (CAST, 2017). Il faut, tout d’abord, prévoir « une représentation des informations par le biais de divers moyens ; [ensuite, permettre] aux élèves d’avoir des choix dans leur manière de démontrer ce qui est appris [et enfin, laisser] la possibilité pour les personnes de s’engager dans les activités de diverses façons ». Dans ce cadre, Greta Pelgrims et Jean-Michel Perez (2016) invitent les membres de la communauté éducative à renoncer « au mythe de l’homogénéité [cognitive dans les classes d’élèves] » (p. 13) pour reconnaître « une hétérogénéité universelle ». (p. 13-14.) Cette CUA traite ainsi conjointement deux grands défis pour les enseignants : celui de proposer un enseignement accessible à tous, tout en restant ambitieux pour tous les élèves (Bergeron, Rousseau & Leclerc, 2011). Les adaptations pédagogiques (Rousseau & Prudhomme, 2010) proposées initialement aux élèves en situation de handicap ne constituent pas un travail supplémentaire pour l’enseignant, dans la mesure où elles conviennent à tous les élèves. Charles Gardou (2012) corrobore ce point de vue : « ce qui est facilitant pour les uns est bénéfique pour les autres ». (p. 38.) C’est pour cette raison que Mel Ainscow (2020) considère que l’éducation inclusive est bénéfique pour tous, c’est « comme une manière de parvenir à une amélioration générale du système éducatif » (p. 8, selon notre traduction).

2.3 École inclusive et société inclusive

La responsabilité de la mise en place de l’École inclusive repose sur la diversité de ses acteurs. L’École ne peut être inclusive que si la société est inclusive (Gardou, 2012). Pour ce faire, elle doit mobiliser tous ses membres pour qu’ils œuvrent activement et conjointement à sa mise en place. Cette mobilisation doit, in fine, « accueillir l’altérité pour co-construire du commun ». (Bedoin & Janner-Raimondi, 2017, p. 32.) Ce commun se rassemble dans une diversité sans discrimination. Cette diversité doit être considérée « non [comme] une difficulté pour la société, mais [comme] une source de bien-être social, de développement économique et un vecteur de matérialisation des droits de l’homme. » (Ebersold, Plaisance & Zander, 2016, p. 10.) Ainsi, « un consensus semble se profiler autour de cette idée que la diversité relève d’un besoin vital pour les hommes […] ». (Bedoin & Janner-Raimondi, 2017, p. 33.)
C’est de la construction d’un monde durable dont il est question. Sur ce point, la définition onusienne des dix-sept objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030 permet d’interconnecter cette construction avec la mise en place d’une éducation sans discrimination qui est le propre d’une éducation inclusive. En effet, « l’éducation occupe une place centrale dans le Programme de développement durable ». (Tawil et al., 2017, p. 7.) Elle se hisse à la quatrième place sur les dix-sept objectifs constitutifs de ce « plan d’action pour l’humanité, la planète et la prospérité » (ibid, p. 7). L’ODD4 « assure à tous une éducation de qualité inclusive et équitable et promeut des possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ». (Tawil et al., 2017, p. 11.) Luis Ma Naya et ses confrères (2022) considèrent ainsi que l’ODD4 ouvre la voie à « une nouvelle culture éducative dans et pour l’égalité et l’équité. » (p. 128.) Ainsi, une société inclusive dans sa dimension équitable est la condition sine qua non pour que le monde perdure et qu’il soit viable.

En guise de conclusion : l’École inclusive comme processus

Il s’agit de comprendre l’inclusion à travers des processus complexes, interactifs et dynamiques. C’est pourquoi, nous parlons de « parcours inclusifs » pour rendre compte des actions et des moyens mis en œuvre pour y parvenir ainsi que des expériences vécues par les sujets directement concernés (Bedoin & Janner-Raimondi, 2017 ; Bedoin, Lemoine et Zoïa, 2022). Nous entendons souligner que la mise en place de l’éducation inclusive s’inscrit dans la durée. Elle nécessite l’engagement de tous les acteurs concernés (élèves, parents, enseignants, accompagnants, etc.), soutenus et accompagnés dans la prise en compte de la diversité par des moyens suffisants, octroyés par une société aux ambitions inclusives. « Ainsi, dans peu de temps, ne nous parlerons plus d’écoles inclusives, mais simplement d’écoles. » (Tremblay, 2020, p. 105.)

 

 

Penser une école inclusive

Dans vos écrits, vous montrez que le projet d’une école inclusive se heurte à la fois à la « forme scolaire » et à une vision néolibérale de l’école. Si les enseignants sont globalement favorables à ce projet, ils sont pourtant face à des difficultés de mise en œuvre (enquête IFOP du 4 septembre 2023). Selon vous, le projet d’une école pleinement inclusive est-il vécu, par les enseignants, comme une injonction ?

J’aurais plutôt tendance à penser que la majorité d’entre eux le perçoivent comme un objectif à atteindre pour toute l’institution, au même titre que les programmes, le socle commun et la réussite aux examens de leurs élèves. Dans toute ma carrière, que ce soit comme enseignant ou comme inspecteur, je n’ai rencontré que très peu de professeurs résolument hostiles à la présence d’élèves en situation de handicap dans leur classe.
En revanche, si l’immense majorité des enseignants cherche à bien faire avec des élèves atypiques, ils souhaitent naturellement disposer des moyens nécessaires pour leur délivrer un enseignement efficace.
Or si l’institution réduit son action au seul fait d’affirmer que la scolarisation de ces élèves est une obligation et qu’elle n’octroie pas aux enseignants les outils professionnels et les conditions nécessaires pour le faire, alors il est évident qu’une situation de tension peut apparaître. Ces outils et ces conditions relèvent trop souvent de l’impensé pour les responsables politiques, que ce soit au parlement ou au gouvernement.
Pourtant, il s’agit là d’éléments éminemment constitutifs de l’enseignement scolaire. Ils touchent aux techniques didactiques, aux supports matériels, et à l’organisation matérielle de l’enseignement.
Par exemple, exiger une individualisation de l’enseignement auprès d’un professeur de collège ou de lycée qui n’a jamais appris à le faire en fonction des besoins particuliers réels de ses élèves, et alors que dans chaque classe il dénombre souvent plus d’une demi-douzaine d’élèves avec PAP1, PPS2, PPRE3 ou PAI4, et qu’il enseigne chaque jour et chaque semaine, selon sa discipline, à six ou dix-huit classes de plus de trente élèves chacune, c’est de fait créer une situation de tension humainement et professionnellement très difficile pour ce professeur. Dans ce registre, alors oui, on peut envisager que la scolarisation inclusive soit perçue comme une injonction formelle et hors-sol de l’institution auprès des enseignants. On ne peut pas faire croire aux parents que l’école est un service à la personne. L’école est une institution qui instruit des enfants et des jeunes pour en faire des citoyens, et cela dans une dimension collective qui est le ciment de notre république. Le professeur n’est pas un précepteur particulier. Il s’adresse à une classe. Il peut prendre en considération des adaptations particulières, mais ces aménagements doivent rester raisonnables par rapport à sa mission qui est d’enseigner à une classe.
On pourrait aussi développer cette réflexion dans le registre des élèves présentant des comportements très perturbateurs, élèves de plus en plus nombreux, bien au-delà du domaine du handicap. La récente enquête de l’Autonome de Solidarité Laïque conduite par Éric Debarbieux a mis en évidence que pratiquement tous les enseignants y sont désormais confrontés. Ce phénomène souvent spontanément associé à l’école inclusive ne concerne en fait qu’une frange des élèves en situation de handicap, alors qu’il touche beaucoup d’élèves « ordinaires » qui ne présentent pas de troubles du neurodéveloppement. Que dit l’institution pour permettre aux enseignants de faire face sérieusement et systématiquement à ce phénomène ? Il y a là un impensé qui compromet de plus en plus lourdement l’école, bien au-delà de sa dimension inclusive ou même du phénomène du harcèlement. Or des travaux sur ces phénomènes existent5, avec des pistes éducatives et institutionnelles qui ont montré çà et là leur efficacité. Il serait utile de les enrichir et d’assurer leur diffusion.

Dans vos écrits, vous montrez que les décisions politiques récentes (notamment la loi de finances de 2024 qui prévoit le passage des PIAL au PAS, le « choc des savoirs » annoncé par le gouvernement) ne vont pas dans le sens d’une école inclusive. Pourriez-vous préciser en quoi ? Et comment les enseignants peuvent-ils alors conforter leur adhésion au projet d’une école inclusive dans ce contexte ?

Répondre de manière précise à ces questions demanderait la rédaction d’un rapport de plusieurs dizaines de pages dans lequel on développerait soigneusement les éléments constitutifs de la problématique, mais aussi les mécanismes systémiques en jeu par rapport aux objectifs et aux choix tels qu’ils sont envisagés. Dans un entretien comme le nôtre, on ne peut que se limiter à un développement succinct. Je vais essayer d’être clair en le faisant.
Ce qui relativise la portée et l’efficacité des choix de politique éducative récents que nous évoquons ici, c’est le fait qu’ils semblent avoir été conçus dans l’ignorance par rapport à deux corpus pourtant indispensables à intégrer si l’on veut agir utilement : d’une part, les études scientifiques et les enquêtes institutionnelles nationales et internationales sur les systèmes scolaires, d’autre part l’appréhension systémique du processus d’élaboration des réformes éducatives. Ainsi, les réformes éducatives, pour être efficaces, doivent recevoir l’adhésion de la majorité des acteurs concernés dans toute leur diversité. Il ne s’agit pas de se soumettre à la démagogie. Il s’agit de concevoir des évolutions qui prennent en considération tous les aspects de la problématique, notamment quand cela remet en cause des us et coutumes que l’on pensait intangibles. Ce qui est notoirement le cas quand il s’agit de transformer un système scolaire classique fondé sur la compétition comme source principale d’émulation, avec orientation par élimination progressive, en système scolaire inclusif universel. Et comme les enjeux sont importants pour les acteurs directs et pour la société entière, on doit prendre le temps d’impliquer les acteurs opérationnels dans la réflexion tant pour la conception que pour la stratégie de mise en œuvre. Toucher à l’école, c’est toucher à la société. Promouvoir une école inclusive, c’est viser à l’instauration d’une société inclusive, ce que n’est pas notre société actuellement.
Bref, on ne réforme pas l’école pour qu’elle devienne pleinement inclusive avec des communiqués de presse démagogiques et hors-sol ou des articles cachés dans une loi de finances elle-même adoptée par le biais d’une procédure constitutionnelle sans débats.
Les enseignants sont des citoyens qui ont la particularité de faire partie de la part de la population la plus éclairée et la plus performante pour appréhender et gérer les difficultés dialectiques de la société. C’est un fait. On ne les manipule pas facilement. Leur esprit critique fait partie des compétences intellectuelles indispensables à leur mission. Il en va de même pour leur adhésion aux valeurs civiques fondamentales qui irriguent le contrat social de notre société. Dès lors, leur capacité de résilience par rapport aux errements des réformes des politiques éducatives est impressionnante quand on regarde avec du recul l’histoire de notre système scolaire. Cela soulève le respect. Chaque jour, ils enseignent à des millions d’élèves dans les classes. Où seraient ces enfants sans eux ?
Sur le plan philosophique, les principes d’une école inclusive entrent en harmonie avec leur crédo en une école qui émancipe et qui construit l’avenir de notre société démocratique. C’est là qu’ils puisent leur force pour résister aux nombreuses adversités auxquelles ils sont confrontés.
Mais ce sont des êtres humains comme tout un chacun. Il y a des limites. Personne n’a intérêt à ce qu’elles soient franchies. La récente augmentation des démissions, notamment par rupture conventionnelle, et la désaffection de plus en plus patente des candidatures aux concours de recrutement nous montrent que les grands équilibres ont été rompus. Tout le monde doit s’en inquiéter.

Dans vos écrits, vous mettez en relief les contradictions, les impensés, voire les « insensés » de ces décisions politiques. Que faudrait-il changer concrètement pour que les enseignants soient en capacité de mettre en œuvre le projet d’une école pleinement inclusive ?

Je pourrais développer un catalogue profus de mesures susceptibles d’engager une évolution efficace pour que l’école française devienne véritablement inclusive. J’avais par ailleurs consacré un article à cette question dans la revue associative en ligne du Café pédagogique.
Mais pour répondre sans prendre trop de place ici, je me limiterai à quelques orientations qui pourraient constituer la charpente de l’édifice.
En premier lieu, il faudrait absolument réduire le nombre d’élèves par division au collège où désormais la jauge de plus de trente élèves constitue une moyenne dans l’immense majorité des établissements. Dans un collège inclusif, une jauge moyenne entre vingt et vingt-cinq élèves par division permettrait aux professeurs de prendre en compte de manière effective les besoins éducatifs particuliers de leurs élèves dans toutes les classes auxquelles ils enseignent dans la semaine.
Ensuite, il faudrait que dans l’école primaire comme au collège, l’institution instaure le principe dit du « plus de maîtres que de classes », en y incluant des professeurs titulaires du CAPPEI (certificat d’aptitude professionnelle aux pratiques de l’éducation inclusive) à même d’apporter une réponse pédagogique aux cas les plus particuliers. Cela permettrait toutes les formes d’aide et de soutien pédagogiques en direct et en continu : groupes de besoins, remédiation, co-enseignement.
Par parenthèse, on retrouve ces deux éléments dans les systèmes scolaires des pays les plus inclusifs. Cela n’a rien de révolutionnaire en soi. En revanche, cela a un coût budgétaire. Mais c’est à la Nation de l’assumer en conscience ou de réfuter son intérêt, sachant qu’il s’agit d’un investissement sur l’avenir et non d’une charge improductive.
Fondamentalement, toute la formation professionnelle des professeurs, initiale ou continue, devrait être imprégnée de la scolarisation inclusive, c’est-à-dire de l’accessibilité universelle des enseignements délivrés à tous les niveaux. Cela ne devrait pas faire comme aujourd’hui l’objet d’un module « à part » de quelques heures. Toutes les dimensions de la formation devraient en être imprégnées : que ce soit la formation didactique dans chaque discipline ou la formation au fonctionnement du système scolaire.
Pour terminer ce rapide catalogue, il apparaît indispensable de penser la dimension partenariale inhérente à l’école inclusive, et cela dans ses deux dimensions : intermétiers et intercatégorielle. D’une part, il conviendrait que l’école dispose en nombre suffisant de médecins, de personnels infirmiers et sociaux scolaires, alors que leurs effectifs sont actuellement en pleine déliquescence. L’école devrait aussi, comme la PJJ (protection judiciaire de la jeunesse, partenaire dans les dispositifs relais pour décrocheurs), disposer dans ses effectifs d’éducateurs spécialisés membres à part entière de l’Éducation nationale. De même, elle devrait disposer de professeurs de LSF (langue des signes française) à tous les niveaux, mais aussi d’interprètes en LSF et de codeurs en LfPC (langue française parlée complétée). D’autre part, formation au partenariat et temps de concertation indispensable au partenariat devraient évidemment être pris en charge par l’institution et reconnus comme faisant partie du temps de service usuel.
Il y aurait encore bien des éléments à prendre en compte, notamment sur le rôle, le statut, la formation et la rémunération des AESH, sur les programmes scolaires pas toujours cohérents entre eux ni avec l’accessibilisation des savoirs, l’évaluation des acquis scolaires réels et progressifs des élèves au-delà de la seule gymnastique numérologique des notes et moyennes, ou encore la profusion décourageante des dispositifs et sigles incompréhensibles accompagnés de formulaires numérisés ou non qui exigent de remplir des dizaines d’indicateurs par élève jusqu’à l’absurde, tout cela pour satisfaire la soif de statistiques de quelques-uns.

Le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés ne cesse d’augmenter. Il est passé de 134 000 en 2004 à plus de 436 000 en 2022 (selon Le Monde, du 06 février 2024). Pensez-vous que cette augmentation croissante puisse devenir un facteur de dégradation des conditions de travail des enseignants ?

Sur le principe, cette augmentation engage de facto une modification des conditions d’enseignement dans les classes et dans les établissements scolaires. Si on ne donne pas aux enseignants les outils et les moyens pour y répondre, alors oui, on pourrait redouter que cela se traduise par une dégradation des conditions de travail.
Dans cet esprit, on ne peut que s’inquiéter de constater depuis plusieurs années une hausse des saisines des comités compétents en matière d’hygiène et de sécurité sur la thématique de l’évolution de l’institution vers plus d’inclusivité. C’est un signal d’alerte que l’institution a le devoir de prendre en considération pour l’analyser, le comprendre dans toutes ses dimensions et apporter les réponses nécessaires sans renoncer aux objectifs inclusifs.
La scolarisation inclusive ne peut être effective qu’avec les enseignants, et surtout pas malgré ou contre eux. S’il y a un malaise, l’institution a le devoir d’en prendre sa part de responsabilité et l’obligation d’y remédier. Une politique publique efficace, c’est aussi une politique susceptible d’être adaptée par le législateur et l’exécutif en fonction des obstacles qu’elle génère et des angles morts dans sa conception. Il ne suffit pas de conjuguer à l’envi la notion de société apprenante dans certains cénacles à la pointe de la réflexion. Il faut que cette notion concerne concrètement toute politique éducative qui se veut progressiste.

Sans accompagnement ni présence d’enseignants spécialisés à leurs côtés, les enseignants font comme ils peuvent pour mettre en œuvre au quotidien, le projet d’une école inclusive. Parmi eux, les professeurs documentalistes accueillent tous les élèves au CDI (Centre de documentation et d’information) et déploient beaucoup d’énergie pour rendre ce lieu plus inclusif. Selon vous, quel est l’apport du CDI dans la mise en œuvre d’une école pleinement inclusive ?

Je répondrai avec beaucoup d’humilité à cette question. Je ne suis pas un spécialiste des CDI ni du métier de professeur documentaliste. Je n’en ai qu’une vision théorique, enrichie de quelques entretiens avec les principaux intéressés.
De mon point de vue, une chose m’apparaît primordiale : les établissements du second degré ont la chance de disposer d’un CDI avec un professeur documentaliste qui est un vrai professionnel dans son domaine. C’est un atout considérable pour donner de la vie, de l’intelligence et du dynamisme aux actions d’enseignement.
J’ai pu constater que de nombreux professeurs documentalistes ont souhaité acquérir le CAPPEI. Ce n’est pas anodin. Rien ne les y a contraints sur le plan institutionnel. En revanche, comme tous les professeurs de leur établissement, ils sont conduits à exercer leur mission avec des élèves qui sortent du schéma moyen en raison de besoins éducatifs particuliers à plus ou moins long terme : élèves en situation de handicap avec toute la variété des troubles, élèves présentant des troubles spécifiques des apprentissages et du langage avec des PAP, élèves allophones, élèves de Segpa, élèves des dispositifs relais. Ces élèves peuvent venir au CDI avec leur classe ou individuellement, dans le cadre d’un projet temporaire ou de manière régulière, seuls ou accompagnés.
Le professeur documentaliste est d’emblée confronté à une problématique pédagogique primordiale de la scolarisation inclusive : l’accessibilité des situations. En raison des besoins particuliers de l’élève, considérés du point de vue éducatif, des adaptations peuvent s’avérer nécessaires, soit sur les supports documentaires, soit sur les modalités d’accès aux supports documentaires, ou encore sur les modalités de traitement de la documentation.
Cela suppose pour le professeur documentaliste l’appropriation de deux corpus de références à partir desquels il pourra engager son action pédagogique : d’une part, une bonne identification du profil particulier de l’élève sur les plans moteur, sensoriel, langagier, cognitif ou psychique ; d’autre part une bonne connaissance des possibilités techniques matérielles ou virtuelles d’adaptation en vue de permettre l’accessibilité la plus opérationnelle possible pour l’élève. Cela concerne aussi bien les supports documentaires dans toute leur variété que les espaces du CDI ou même la gestion du temps. Enfin, le professeur documentaliste aura tout intérêt à pouvoir encadrer son action par un partenariat éclairé avec ses collègues qui connaissent bien l’élève ou les élèves présentant des profils atypiques, qu’ils soient professeurs de la classe, coordonnateur d’Ulis, professeurs spécialisés de référence, professeurs de français langue seconde, etc. Parfois, il faudra étendre ce partenariat à des professionnels non-enseignants qui accompagnent l’élève : AESH, évidemment, mais aussi PsyEN, rééducateurs des services médico-sociaux partenaires, éducateurs spécialisés, interprètes LSF et codeurs LfPC.
Pour terminer, j’évoquerai aussi une action professionnelle qui ne peut qu’être appréciée par l’équipe pédagogique de l’établissement : la mise à disposition d’un corpus documentaire relatif aux besoins éducatifs particuliers des élèves de l’établissement, qu’il s’agisse des outils pédagogiques adaptés ou des références documentaires à l’attention des enseignants et accompagnants. À cet égard, le professeur documentaliste a tout intérêt à s’abonner à la lettre de l’INSEI, l’Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation inclusive.
En considération de ces quelques éléments, on comprend aisément pourquoi des professeurs documentalistes souhaitent bénéficier de la formation préparatoire au CAPPEI.

Je vais revenir sur la notion de partenariat nécessaire à l’école inclusive que vous évoquiez précédemment. Lorsque j’étais professeure documentaliste en lycée, j’accueillais des classes pour développer les apprentissages informationnels des élèves, en partenariat avec les enseignants de disciplines. Je me suis retrouvée, plus d’une fois, face à des élèves à besoins particuliers, sans jamais avoir été prévenue de leurs situations. Tous les enseignants, nous y compris, sommes de plus en plus sollicités, « noyés » sous diverses tâches notamment administratives. Nous ne prenons pas toujours le temps nécessaire à la transmission des informations. Comment favoriser un partenariat visant l’inclusion des élèves alors que cette logique de cumulation des tâches ne cesse de s’accentuer ?

Ce que vous évoquez ici est une réalité qui s’impose à nous : la capacité inclusive de l’institution scolaire implique que ses acteurs – quelles que soient leurs fonctions et leur place – soient en mesure de se concerter et d’échanger rapidement des informations diverses pour adapter leur action et rendre accessible l’enseignement en fonction des besoins des élèves. Or notre civilisation ne cesse de soumettre ces mêmes acteurs à une avalanche d’informations tous azimuts, avec l’obsession systématique de vouloir tout embrasser et de rendre compte de tout, à tout moment, et cela dans une logique qui associe les exigences économiques, le meilleur rendement et une efficacité absolue au regard des attentes supposées de l’usager et de la hiérarchie administrative et politique.
Deux facteurs historiques ont accentué ce phénomène. Évidemment, l’irruption au début de ce siècle de la numérisation totale de l’information et de ses canaux d’échanges avec cette sorte de dictature cognitive des tableaux et feuilles de calcul qui transforment la vie humaine en données quantifiées analysables à l’infini. Et à la même période, en France, est arrivée l’adoption de la loi organique sur la loi de finances, celle du budget de l’État, qui soumet le service public à des indicateurs chiffrés, des cibles annuelles, et des objectifs de performance.
L’école inclusive n’échappe pas à cette obsession : la dictature du chiffre pour rendre compte en permanence des budgets dépensés s’impose aux établissements scolaires, aux directions académiques, aux rectorats comme à la Dgesco. Au mieux, cela se traduit par de belles infographies flatteuses sur le nombre d’élèves handicapés scolarisés, d’AESH, d’Ulis, etc. Mais la réalité pédagogique dans la classe et dans l’établissement n’est pas représentée dans ce travail de production de données chiffrées qui est pourtant censé rendre compte de la vie à l’école.
Ainsi, pour notre école inclusive et la nécessité d’échange de l’information entre les acteurs, le gouvernement a mobilisé la CNSA6 (tutelle des MDPH) et l’Éducation nationale pour développer le LPI (livret de parcours inclusif), une application en ligne censée faciliter la mise en place rapide et effective des aménagements et adaptation. Concrètement, la mise à disposition de cette application s’est heurtée à une multitude de difficultés techniques dans le cadre de l’interopérabilité avec les systèmes d’information qui existaient déjà, tant du côté de l’école que du côté des MDPH, mais aussi des obligations liées à la protection nécessaire des données personnelles et médicales. Cela a pris plusieurs années pour obtenir une application à peu près stabilisée. Et au final, on a un produit qui veut compiler tant d’informations qu’il y a là une véritable usine à gaz aussi chronophage pour ceux qui doivent entrer les innombrables données requises qu’inopérante pour le travail quotidien dans l’établissement et dans la classe.
Prenons encore l’exemple des PAP qui sont réduits à des listes de cases à cocher sans âme. Le concepteur a voulu être tellement complet dans la recension du champ des possibles adaptations qu’il a construit un formulaire roboratif dénué d’appel à l’intelligence pédagogique et éducative : c’est désormais une liste de courses avec des produits à cocher machinalement. Pour être sûr de ne pas se tromper, on aura naturellement tendance à en cocher le plus possible, quitte parfois à cocher des choses complètement inutiles, voire parfaitement inadaptées aux besoins réels de l’élève. Comment s’étonner alors que certains professeurs n’y prêtent pas attention ? « Qui trop embrasse, mal étreint », nous rappelle le dicton.
Concrètement, je pense que le partenariat doit être assumé par l’institution en incluant dans le temps de service de ses agents un volume horaire hebdomadaire annualisable et consistant pour toutes les concertations indispensables à la capacité inclusive de l’école : entre collègues, avec les parents, avec les partenaires internes et externes, pour les réunions institutionnelles afférentes, etc. Et puisque que notre civilisation est celle du chiffre, il faut que ce temps soit effectivement comptabilisé et valorisé. C’est du temps entre être humains indispensable pour donner de la vie à l’école inclusive.
En conclusion, pour répondre de manière pragmatique à votre question, prenez le temps de discuter avec vos partenaires dès que l’occasion se présente. Ce temps est rare. Il faut le préserver et le soigner. C’est souvent gratifiant sur le plan humain. Ce n’est pas du temps perdu. C’est du temps pour la vie.