L’odyssée d’un clip vidéo contre le harcèlement scolaire

Et si on chantait ensemble contre le harcèlement scolaire ?
L’idée de ce clip vidéo contre le harcèlement durant moins de deux minutes, écrit et réalisé par les lycéens et lycéennes, pour les lycéens et lycéennes, n’est pas sortie de nulle part. Elle est le résultat d’une série d’actions qui a engagé depuis plusieurs années les élèves du lycée Jean Zay contre le harcèlement, et d’un projet que j’ai piloté avec Sylvie Paponnet, conseillère principale d’éducation.

Le harcèlement scolaire

Même si hélas l’actualité l’a mis sur le devant de la scène à la suite de suicides d’élèves, commençons par revenir sur le terme de « harcèlement », terme juridique qui désigne, en droit, un délit inscrit dans le Code pénal. De fait, selon Dan Olweus :

un élève est victime de harcèlement lorsqu’il est soumis de façon répétée et à long terme à des comportements agressifs induisant une relation d’asservissement psychologique qui se répète régulièrement, amenant des sentiments de peur ou de honte1.

Quand il y a à la fois répétitivité, mise à l’écart de la victime et rapport de force ou de nombre, on peut parler de cas de harcèlement. Étymologiquement, on songe à la herse qui creuse les sillons d’un champ pour le labourer, de la même manière que les auteurs de harcèlement traumatisent profondément les victimes, les mettant à nu et les laissant désarmées.

État des lieux dans notre lycée

Depuis 2017 a été mise en place au lycée l’action «ambassadeurs contre le harcèlement» (voir le dossier consacré au harcèlement coécrit avec mon ancien collègue CPE Yohan Haquin : InterCDI, novembre-décembre 2019, n° 282). Une formation des ambassadeurs est dispensée chaque année en novembre par le DAVL2. Ces ambassadeurs tiennent par exemple un stand d’information pendant les récréations et la pause méridienne lors de la journée internationale contre le harcèlement, qui a lieu souvent le premier jeudi de novembre. Ils sensibilisent une heure par an tous les délégués de classes des différents niveaux lors d’une plénière en amphi. Ils ont pu aussi avant 2020 sensibiliser certaines classes des collèges de notre secteur. Ils réalisent un sondage destiné à tous les élèves et personnels du lycée, sur le phénomène du harcèlement, pour adapter leurs actions en direction de classes à la demande des enseignants. Les années précédentes, ils avaient également participé au concours national avec trois vidéos successives, sans l’aide de professionnels, et toute une classe de seconde avait, en EMC, postulé au moyen d’une douzaine d’affiches.

Notre positionnement professionnel

Dès la mise en place des ambassadeurs au lycée, les deux conseillers principaux d’éducation successifs sont venus nous trouver pour nous proposer de travailler en étroite collaboration avec eux. Initialement un peu sceptique, quant à l’apport spécifique en information-documentation dans ce projet, j’ai vite écarté toute réticence en réalisant que nous étions, au-delà de ça, des enseignants à part entière, disponibles pour tous les élèves, et capables de travailler en équipe. Une fois n’est pas coutume, il s’agissait de travailler main dans la main avec nos collègues de la vie scolaire, pour oeuvrer à un climat scolaire plus serein, un mieux-vivre ensemble. Certes, souvent appelé en urgence, le CPE me laissait poursuivre l’atelier avec les ambassadeur.ices. Mais maintes fois aussi surgit une lecture possible, une recherche pour la mise en forme d’affiches de sensibilisation, un atelier d’écriture de scénario, qui nourrit la réflexion des élèves pour combattre ce fléau. Car tous les ateliers se sont toujours déroulés au CDI, et avec moi.

Fil conducteur

Notre objectif principal consistait à sensibiliser le plus d’élèves possible au phénomène de harcèlement et de libérer la parole. Cette année-là, ma collègue et moi avions remarqué que toutes les vidéos qui fonctionnaient particulièrement bien avec les élèves, avec un message efficace, consistaient en des vidéoclips. De là est né notre projet Chantons ensemble contre le harcèlement scolaire.

En mars, je pris l’initiative de déposer un dossier de demande de subvention régionale pour un projet 100 % citoyenneté, accompagné des CV des intervenants et de leurs devis de 3600 euros, incluant les 7 heures d’ateliers avec les élèves, les 12 heures de tournage avec deux professionnels, la location du matériel professionnel ainsi que la postproduction (montage son/image, mixage, étalonnage). La demande à la région s’élevait ainsi à 2590 €, le reste étant financé par l’établissement.
En avril, les ambassadeurs contre le harcèlement écrivaient, en deux séances de travail le mercredi, le texte d’une chanson avec un intervenant extérieur, Syrano (association Les doigts dans l’zen-19), sur le thème du harcèlement. Les élèves de 2de option musique, encadrés par leur professeur Alain Berthet, ont quant à eux composé la musique. Les élèves ambassadeurs ont été décisionnaires de l’écriture de la chanson, du message à faire passer à l’ensemble des élèves, et ont souhaité attirer l’attention sur les différents types de victimes et sur l’intolérance des auteurs.

Ma différence

Réveil matin, debout tremblant
Peut-être plus pour longtemps
Métro-boulot-fardeau.

8 h PD, 10 h taré,
16 h raté, 20 h brisé
Marco voulait s’affirmer,
Ce soir, il tait ses regrets.

Sortie des vestiaires, odeur de chlore,
Le regard des mecs jeté sur son corps,
D’un sifflement à un attouchement,
Que font-ils de ses sentiments ?

Inès a quelques kilos en trop,
Les gens pensent que c’est un défaut.
À cause d’eux, son corps la dégoûte ;
Elle veut le changer coûte que coûte.

Sur insta, Jo lit, lycée Jean Zay,
En face, bclt 12, anonyme.
Tu me dégoûtes, depuis juillet,
C’était rien mais je tombe dans les abîmes.

Lui, c’est Mouloud, Bougnoul, Voleur,
Demain, ce sera terroriste.
Son nom ignoré par la peur,
Il est pourtant pur comme une améthyste.

On passe notre temps à essayer d’affirmer notre singularité,
Mais on n’est pas prêt à accepter celle des autres.
Mais quand est-ce qu’on va accepter celle des autres.
(Tous ensemble) Mais quand est-ce qu’on va accepter
celle des autres ?

Clap du réalisateur sur une scène improvisée, ajoutée à la demande des élèves en fin de tournage – Photo Sandrine Leturcq

Mais pour être visible et entendue de tous les lycéens, la chanson méritait d’être tournée en vidéoclip. D’où le projet déposé à la région pour bénéficier de l’accompagnement d’un réalisateur professionnel. D’octobre à décembre, une poignée d’élèves, avec un noyau dur de trois élèves, a ainsi écrit en 5 heures au CDI. le scénario du vidéoclip avec l’aide de l’auteur-réalisateur, Senghte Vanh Bouapha de l’association Plan libre, et de moi-même. Pour chacun des couplets de la chanson, il s’agissait en effet de déterminer quel personnage, quelle interprétation, quelle situation mettre en scène et quels plans, soit 7 séquences.

Les élèves volontaires parmi les ambassadeurs ont ensuite préparé avec le réalisateur et moi, pendant une séance de 2 heures en décembre, la logistique du tournage : il s’agissait de bien indiquer pour chaque plan les acteurs et figurants présents, les décors et accessoires à prévoir. A été décidé également l’ordre de tournage des différentes séquences. Les différents rôles techniques (préparation des plans, des lumières, prises de son, script, etc.) furent distribués aux ambassadeur.ices contre le harcèlement.

La conseillère principale d’éducation et moi avons seules procédé à un casting ouvert à tous les lycéens de l’établissement. Force nous fut de constater que peu de garçons étaient volontaires, et il nous fallut faire preuve de persuasion pour trouver quelques éléments, même en figuration. C’est ainsi qu’une lycéenne endossa volontairement le rôle de Mouloud, un garçon.

Douze heures de tournage, avec l’auteur-réalisateur et son assistant, étaient prévues sur une journée et demie. Une matinée fut nécessaire en amont pour que j’apporte sur le lieu du tournage les accessoires, et surtout que j’aide à la mise en place du décor et des lumières. Ma collègue CPE, malade, ne put assister au tournage ; une collègue AED se chargea d’accompagner et d’encadrer les élèves avec moi. Ce tournage permit de concrétiser un projet qui n’était encore que sur le papier, et ce fut un moment formidablement excitant pour tout le monde de le voir prendre vie sous nos yeux, grâce au travail et à l’implication de chacun.e sur chacun des postes dont il avait la responsabilité. Ce fut évidemment un temps très fort, avec néanmoins un long temps de préparation et de mise en place, des répétitions et l’attente des acteurs et figurants.

Essais d’éclairages à l’aide de filtres de l’assistant-réalisateur avec les élèves et le réalisateur – Photo Sandrine Leturcq

On ne peut que se féliciter d’un constat pour ce type de projet : originaires de tous les niveaux sauf post-bac, des filières générale, technologique et professionnelle, tous les élèves participant à l’action, sans être forcément ambassadeurs, ont donc été sensibilisés à la question du harcèlement. Enfin les élèves de tous les horizons, qui ne se côtoient jamais habituellement, se trouvaient réunis pour créer un outil à la fois éducatif et artistique.

Une fois le tournage terminé, nous n’avions pas choisi l’option de faire assurer aux élèves le montage. Le projet nous semblait déjà suffisamment chronophage, puisque pour chaque atelier prévu pour ces élèves issus de différentes classes, ces derniers s’absentaient de cours, leurs absences étaient bien entendu justifiées pour conduite de projets mais devaient être rattrapées. Le monteur professionnel devait faire en sorte que le tout s’adapte à la durée de la chanson et aux contraintes données par le ministère pour le concours : la vidéo devait durer au maximum 2 minutes, générique compris. Les paroles de la chanson ont également été intégrées en sous-titrage, afin que les contenus soient accessibles au plus grand nombre. Quel que soit le support choisi, le générique devait intégrer le bloc des numéros d’appel (3020 et 3018), ainsi que le logo du programme pHARe3, tous téléchargeables sur le site Éduscol.

Lauréats du concours national

Quelques jours avant le délai fatidique de fin janvier, je téléchargeai le vidéoclip sur la plateforme institutionnelle PeerTube, pour le faire participer au concours national contre le harcèlement scolaire. Un mois après, le vidéoclip était sélectionné par le jury académique, avec une cérémonie de remise des prix prévue début juin au rectorat. Et en mai, nous apprenions que nous étions conviés à la Cérémonie nationale de remise des prix à l’amphithéâtre de la Sorbonne pour recevoir le Prix national de la vidéo contre le harcèlement avec les lauréats des autres catégories, en présence du ministre de l’Éducation nationale d’alors, Pap NDaye, et de Brigitte Macron. Une dizaine d’élèves, accompagnés par Sylvie Paponnet, Senghte Vanh Bouapha et moi-même se sont ainsi rendus à la Sorbonne pour présenter le vidéoclip et recevoir le Prix national. Ce haut lieu symbolique et la présence de ces importantes personnalités politiques ont énormément impressionné les élèves. C’est dans ce cas bien davantage le déplacement à Paris et le faste de la Cérémonie qui récompensent symboliquement les élèves de leur participation que le prix, 2000 euros, que le lycée reçoit pour financer d’autres actions.

Lors de la cérémonie de remise des prix à La Sorbonne par Mme Macron et M. Ndiaye – Photo Sandrine Leturcq

Après la Sorbonne et la Préfecture, nous eûmes la surprise d’être le 27 septembre invités à l’hôtel de Matignon par Élisabeth Borne, Première ministre, pour participer à la présentation du Plan de lutte contre le harcèlement à l’école. Une petite délégation accompagnée de ma collègue CPE, de notre proviseur et de moi-même s’y rendit ce jour-là, une élève ayant préparé un discours en tant que victime. En effet, n’étaient réunis à cette occasion que les dirigeants de différentes associations de victimes, ainsi qu’une influenceuse de réseaux sociaux, lesquels prirent tour à tour la parole devant la Première ministre et le ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal.

Dans la salle des ministres, les associations de victimes attendent l’arrivée
de Mme la Première Ministre et M. Attal, venus les écouter avant d’annoncer le plan pHARe et les nouvelles mesures contre le harcèlement scolaire – Photo Sandrine Leturcq

Un outil de sensibilisation pérenne

Depuis lors, notre clip vidéo est utilisé par les référents harcèlement des lycées français à destination des élèves de toute la France pour les sensibiliser. Mais il est surtout concrètement pour nous, comme défini dans notre objectif principal, diffusé sur les écrans du lycée et dans les classes pour débuter les interventions des ambassadeur.ices contre le harcèlement. Car ce clip vidéo était destiné dès le départ à être un support de travail au sein du lycée pour être montré dans les classes lors de la journée internationale contre le harcèlement en novembre. En effet les ambassadeurs contre le harcèlement ne peuvent pas intervenir dans toutes les classes ce jour-là, et cette vidéo constitue désormais une excellente amorce pour libérer la parole en classe, pour inciter les élèves à parler en tant que témoins ou victimes après-coup.

Il est vrai que la vidéo constitue selon moi un formidable outil pédagogique : pour les élèves qui la créent, elle leur permet de faire passer à leurs pairs un message longuement réfléchi et mûri, tout en s’essayant à toutes les étapes artistiques de ce média, en mode professionnel. Et pour les spectateurs, ce parcours visible de leurs camarades rend bien plus puissante la portée de leur message.

Ainsi ce Prix national a clos un travail de quatre ans avec des élèves extrêmement motivés. Certes ce projet semble un peu écarté de la transmission d’apprentissages info-documentaires – encore que -, mais en aucun cas de notre mission d’ouverture culturelle et éducative. Comme tout professeur d’une discipline ou d’une autre, chargé d’un enseignement transversal, d’une option ou d’une spécialité, nous pouvons également élargir nos champs d’investigation suivant nos compétences et appétences. L’I.A. ainsi que la désaffection de la lecture sur papier va progressivement modifier notre enseignement et notre gestion. Cherchons des terrains transversaux, pluridisciplinaires, fédérateurs avec l’équipe éducative, qui nous permettent de transmettre aux élèves de la curiosité, un esprit critique et méthodologique, de leur faire assimiler valeurs et savoirs jusqu’à pouvoir en faire jaillir une oeuvre artistique – nouvelle, clip-vidéo, danse, chanson, ce qu’il reste quand on a tout oublié… Une collègue professeure documentaliste est ainsi devenue coordinatrice pédagogique dans un lycée privé. Mettons véritablement « le CDI au coeur de l’établissement » et les professeurs documentalistes au coeur des enseignements.

Chargée désormais de multiples missions en plus de celle de professeure documentaliste au lycée, j’ai vu une solide équipe pHARe se former, et j’ai décidé de passer la main. Et puis, enthousiasmé par cet outil de sensibilisation complet, le proviseur a demandé de reconduire le projet, cette fois en faveur de l’égalité filles-garçons. C’est donc avec les ambassadeur.ices égalité des genres et l’association Plan libre, qu’un court-métrage Friendzone contre le sexisme ordinaire et le masculinisme toxique a vu le jour cette année, et fera l’objet d’un prochain article…

Quelques élèves invités à nos côtés à l’hôtel Matignon – Photo Sandrine Leturcq

 

Harcèlement en littérature : dire l’indicible

À l’heure où cet article était en cours d’écriture, un adolescent de 15 ans, victime de harcèlement scolaire, se donnait la mort à Poissy. Son nom vient s’ajouter à une liste déjà trop longue pour la seule année 2023, faisant du harcèlement scolaire un problème de société majeur ainsi qu’un sujet médiatique de premier plan, comme l’attestent le large relais médiatique ainsi que les mesures institutionnelles récentes prises par Gabriel Attal : le décret du 16 août 2023, la journée de lutte contre le harcèlement, Safer internet day, le dispositif Sentinelles et Référents, Phare, Prix Non au harcèlement…
Pourtant, ce douloureux et complexe sujet n’est pas l’apanage de notre époque et de nombreux auteurs s’en étaient déjà emparés : Maupassant, dans sa nouvelle Le papa de Simon, Flaubert dans ses Mémoires d’un fou, Delacretelle, Jules Renard et d’autres avaient déjà écrit en leur temps sur le sujet.

 

Aujourd’hui, l’offre éditoriale est plurielle et se décline en différents formats et types de textes : certains ont une approche éducative, parfois trop appuyée, d’autres s’inscrivent dans une démarche davantage littéraire avec des textes complexes tant dans l’exploration de la psychologie des personnages que dans leur construction ou la variété des thématiques abordées. Mais l’essence est toujours la même, parler à l’intime et permettre au jeune lecteur de cheminer dans ses émotions et sa réflexion : « La littérature reste une des meilleures garanties pour espérer une sorte de progrès dans nos sociétés hypertechniques », nous dit Mario Vargas Llosa. Saisissons-nous de cette citation pour offrir à nos élèves des textes variés sur le sujet, pour les sensibiliser mais aussi parce que ce thème familier, effrayant et bouleversant peut les amener sur le chemin de la littérature.

Des formats courts pour des fictions à visée éducative

Il importe de toucher le plus grand nombre possible d’ados et pré-ados et pas uniquement les lecteurs confirmés qui tentent la folle aventure du roman de plus de cent pages. Les fictions pouvant constituer une sorte de « produit d’appel » sont nombreuses, dont quelques bandes dessinées.

Du côté de la BD et du roman

Dès 2012, Dominique Saint Mars et Serge Bloch imaginent dans une BD ludique et éducative au dessin humoristique, une Lili harcelée à l’école après s’être laissé séduire par une bande de filles populaires mais loin d’être bienveillantes. On y comprend que le harcèlement existe aussi dans le monde des adultes, puisque le père de Lili est contrarié à cause des moqueries répétées de ses collègues au sujet de la forme de son menton. On s’interroge aussi sur les motivations de la camarade qui harcèle Lili : elle manque totalement de confiance en elle et veut se donner avec sa position de bourreau l’illusion d’être forte. Autre bande dessinée qui choisit la distance de l’humour, Seule à la récré propose des planches aux dessins et couleurs tendres qui atténuent la gravité du propos ; elle nous livre l’histoire d’Emma, progressivement isolée et harcelée par ses camarades de classe, qui choisit au départ de ne rien dire, puis expliquera ce qui se passe à ses parents. La situation mettra néanmoins du temps à évoluer. On s’intéresse ici aussi à l’instigatrice de ce harcèlement, victime de la pression que ses parents exercent sur elle pour qu’elle soit la meilleure en tout, quitte à écraser les autres. Camelia, autre héroïne de bande dessinée, trouvera dans le soutien de ses parents et amis, mais aussi dans la pratique théâtrale, la force de surmonter l’épreuve et de faire face à la meute. On retrouve ici le thème de l’art libérateur.

Plus étoffé, utilisant lui aussi le ressort comique sans rien perdre de sa subtilité d’analyse et ponctué d’illustrations, le roman La Team collège interroge les liens amicaux, les stéréotypes sociétaux et la construction du phénomène de harcèlement.
Le recueil Malaise au collège propose quatre courts récits mettant en scène différentes formes de harcèlement (cyberharcèlement, racket, ostracisation, harcèlement physique) ; ils permettent une sensibilisation rapide, mais le texte devient parfois trop informatif.

Des pages documentaires et informatives viennent enrichir ces textes de fiction et proposent des descriptifs des mécanismes du harcèlement, des numéros d’écoute et des réseaux associatifs dédiés. Ils ont également en commun des « happy ends » grâce à la libération de la parole et l’écoute de proches, d’amis, de professeurs (c’est plus rare) ou de pratiques artistiques. Le bouc émissaire sort alors du cercle vicieux grâce à ses adjuvants. Mais la vie n’est pas un conte de fées et pour d’autres, le chemin sera plus laborieux, plus difficile encore.

Des fictions plus denses aux thématiques multiples pour une entrée en littérature

Des textes qui vont à l’essentiel

Il y a des textes qui cognent. Dans son court roman, Six contre un, Cécile Alix adopte un point de vue interne qui permet dès l’incipit une identification avec Ludo, bouc émissaire en raison de son surpoids. Le vocabulaire est cru, percutant, incisif et sans concession, pour un effet coup de poing propice à la prise de conscience ; c’est en permettant à ce corps moqué de s’exprimer par la danse, que Ludo retrouvera l’estime de lui-même et la confiance en la vie. Encore une fois, l’autrice propose l’art comme remède à la souffrance.
Même crescendo de violences et d’humiliations, même sensation de panique et d’impasse chez Arthur Tenor qui décrit un Enfer au collège à la construction habile. Il alterne le point de vue du bourreau et celui de sa victime, situe l’incipit après les faits, laissant pressentir au lecteur que quelque chose de grave s’est produit, sur lequel le récit nous éclairera. On retrouvera ce procédé dans le roman Blacklistée dont nous parlerons plus loin.
Les deux auteurs ont décidé de s’exprimer dans une postface, Cécile Alix par un plaidoyer aussi bref que percutant ; Arthur Tenor en expliquant comment le témoignage de la mère d’un jeune harcelé qui s’est suicidé l’a plongé dans l’urgence d’écrire.

Des romans plus étoffés : exploration psychologique, découverte d’autres univers…

D’autres romans abordent la question du harcèlement sans que ce soit le thème central et plongent le lecteur dans de nouveaux univers.
Ainsi, Sherman Alexie dans son roman autobiographique Le premier qui pleure a perdu raconte avec un humour féroce ses difficultés et péripéties d’adolescent harcelé : Junior, un jeune Indien Spokane souffrant de différents handicaps, vit dans une réserve indienne où dominent misère sociale et humaine. Il sait qu’un déplorable avenir l’attend s’il ne quitte pas la Réserve. Brillant, il est admis à Reardan, une école prestigieuse surtout fréquentée par les Blancs. Son amour du dessin, son travail, son talent et sa puissante autodérision lui permettront de s’en sortir.

Troublante similitude avec Max, jeune garçon handicapé, qui rase les murs pour éviter les moqueries et vexations répétées dont il fait l’objet depuis sa sixième, faisant de sa vie un calvaire. Là encore, la rencontre artistique avec une mystérieuse BD, Dragon boy, va s’avérer salvatrice : le héros et la comédie musicale vont l’inspirer au point de transformer sa vie. Le récit est entrecoupé des planches BD des jubilatoires aventures de Dragon Boy, véritable exutoire pour Max mais aussi pour le lecteur.
Ces deux romans semblent se faire écho tant par leur humour corrosif que par leur forme très illustrée, leurs thèmes et leur profonde humanité.

Dans Chère Fubuki Katana, Anne Lise Heurtier fait le choix de placer son récit au Japon. Sûrement pas par hasard, puisqu’on y excelle dans l’art de réparer les vases brisés : on met en valeur les brisures plutôt que de les camoufler et l’image est d’autant plus forte dans une culture où l’intime semble devoir rester muet. La jeune Emi et sa mère sont adeptes de cette activité. Emi est harcelée et tente vainement de faire bonne figure en taisant les humiliations dont elle fait l’objet quotidiennement. La construction du récit est singulière et très bien maîtrisée, le dénouement final est une surprise pour ne pas dire un choc. Ce roman vient interroger notre société contemporaine sur les thèmes de l’image, l’amitié, l’amour et le mensonge. La poésie, l’émerveillement et l’art sont néanmoins très présents, notes d’espoir et de beauté dans un texte d’une grande finesse.
On ne saurait évoquer le Japon sans proposer quelques mangas. Deux d’entre eux ont retenu mon attention par leur similitude : Kasane et Rouge Eclipse. Ils ont en commun deux héroïnes persécutées dans leur lycée à cause de leur physique jugé ingrat. Toutes les deux ont des relations compliquées avec leur mère pour des raisons différentes. Elles vont avoir recours à un procédé surnaturel pour se glisser dans le corps d’une jolie jeune fille populaire, qui s’avère être le bourreau dans l’un des deux cas. À peine sont-elles libérées de leur laideur qu’elles se laissent gagner toutes les deux peu à peu par la cruauté et la méchanceté, intéressante métaphore qui rappelle que les postures dans l’infernal triangle du harcèlement ne sont que postures et que chacun peut passer de l’une à l’autre… nombre de harceleurs sont ou ont été victimes de harcèlement. Ces deux mangas offrent une vraie réflexion sur la quête d’identité, l’estime de soi, le respect de l’autre, le bien-être psychique, autant de problématiques étroitement liées à celle du harcèlement.
Claire Mazard a choisi de parler du harcèlement dans un de ses romans noirs pour aborder ce thème. La commissaire Razinsky enquête sur le meurtre d’un jeune harceleur dont Anton, frappé de la malédiction d’être roux, était la victime. Ils se sont justement rencontrés le soir du meurtre. Mais le jeune harcelé ne sera finalement pas inquiété, il retrouvera une vie plus sereine. Au-delà de la problématique du harcèlement, bien d’autres thèmes sont abordés : liens familiaux, blessures, perte, deuil, exclusions… Le format enquête amène tout le suspense et les rebondissements propres au genre et rappelle que certains actes peuvent conduire à l’irrémédiable.

Les romans du passage à l’acte

Allure de roman noir également pour la couverture du best-seller Blacklistée à ranger du côté des romans addictifs. Il nous entraîne dans un lycée américain où l’image est un diktat, où la popularité se mesure à la marque de ses vêtements ou de son make-up et à sa capacité à être craint par les autres. D’un milieu social très favorisé, Regan, légèrement peste, voit son destin radicalement basculer à la suite de la diffusion publique de ses messages privés. Son statut d’icône populaire lui est instantanément ôté, ses « amies » lui tournent le dos, le harcèlement commence et sa vie devient un enfer. Dès lors, il lui faut trouver des stratégies de réhabilitation. Des secrets et un rapprochement avec le jeune Nolan vont bouleverser ses plans et lui permettre d’aller à la découverte d’elle-même. Cependant, une des élèves du lycée va payer le prix fort et aller jusqu’à une tentative de suicide dont elle sera sauvée in extremis.
Passage à l’acte aussi dans le roman déjà évoqué d’Athur Tenor, L’enfer au collège ou encore dans Silent Boy. Dans ce roman court et percutant, Gaël Aymon, qui avait déjà écrit sur le sujet (ndlr Ma réputation) fait vivre l’expérience d’une plongée immersive dans le monde des ados, leurs codes et leur vocabulaire. Anton, alias Silent boy sur les réseaux, est le témoin muet du harcèlement de Nathan, un jeune homme qui ne correspond pas aux stéréotypes de genre. Particularité, les réseaux sociaux jouent ici un rôle positif même si un personnage dira qu’il en a assez des relations virtuelles et préfère désormais se consacrer à sa vie réelle. Sur un tchat, Anton va échanger et devenir « ami » avec une jeune fille. Peu à peu, il va se dévoiler et puiser dans cette relation la force de sortir du silence. Mais il aura fallu la défenestration de Nathan pour qu’Anton soit gagné par la rage et la soif de laisser éclater la vérité. Loin de tout manichéisme, ce roman offre une lecture nuancée des postures et enjeux à l’œuvre dans le harcèlement, des émotions qui traversent les protagonistes et en particulier les témoins. Et il soulève la question de l’identité.
Suicide encore mais réussi cette fois dans 13 reasons why de Jay Asher dont a été tirée la célèbre série éponyme. Hannah Baker a pris le temps avant son suicide de s’enregistrer sur de vieilles cassettes audio pour expliquer les 13 raisons qui l’ont poussée à cette dernière extrémité. Clay est le premier garçon à recevoir les cassettes, lui qui pensait n’avoir rien à voir avec la mort d’Hannah. Le lecteur découvre le contenu des cassettes avec lui, ponctué d’incessants flash-back pour comprendre l’enchaînement macabre. Nul n’est épargné : camarades ayant nui directement ou indirectement à la jeune fille, profs ou parents quasi aveugles ou maladroits. Le lecteur sent se resserrer l’étau de la solitude extrême dans laquelle Hannah s’est trouvée plongée.

Dans Johnny de Martine Pouchain, c’est Alice, dont il était amoureux, qui démêle l’écheveau de l’histoire de Johnny, puisque lui n’est plus là pour raconter le calvaire qu’il a subi. Calvaire auquel Alice a d’ailleurs participé, sans penser bien sûr que les choses pouvaient aussi mal tourner. Cette histoire aussi crue et dépouillée qu’elle est brève, ne laisse pas le lecteur indemne.
Enfin, parce que les histoires vraies touchent les lecteurs et constituent une tendance éditoriale forte, on peut proposer sur nos étagères le témoignage de Nora Fraisse, maman de la jeune Marion qui s’est suicidée à l’âge de 13 ans : Marion, 13 ans pour toujours. Nora Fraisse, qui a contribué au scénario de la BD Camélia, fondé une association, et lancé des campagnes de sensibilisation. L’institution scolaire n’est pas épargnée dans son récit mais c’est une parole qui mérite d’être écoutée non pour se flageller mais peut-être pour interroger notre posture et notre vigilance.
D’ailleurs, dans nombre de textes évoqués dans cet article, les adultes, parents, professeurs, pris dans leurs rôles et préoccupations, au mieux jouent les aveugles et les indifférents, au pire aggravent les faits en s’en tenant aux apparences ou se disant que si l’on est rejeté par les autres, c’est qu’on ne fait peut-être pas d’efforts ! Quant aux parents, les enfants hésitent à leur parler pour les protéger puis finissent par leur en vouloir de ne pas comprendre où est le problème. C’est également la honte qui les pousse au silence.
Ainsi l’offre éditoriale sur la problématique du harcèlement est large tant par la diversité des genres que par la diversité des niveaux de lecture. Le professeur documentaliste dans sa double mission de veille informationnelle en lien avec l’actualité et de promotion de la lecture peut puiser là une matière sérieuse, propice à libérer la parole des élèves et à étayer leur réflexion. 
Ces ouvrages nous incitent surtout en tant qu’éducateurs à nous garder nous-mêmes des stéréotypes et des interprétations, à accroître notre vigilance, à ouvrir le dialogue. Et pourquoi pas à nous inscrire dans un dispositif existant, puisque le CDI est l’un des espaces phares de la vie des élèves dans les établissements.

 

 

La prise en charge du harcèlement scolaire par l’équipe éducative de l’établissement

Le harcèlement scolaire, ou school bullying selon l’expression anglo-saxonne, est un phénomène bien connu des membres de la communauté éducative, et pour cause, il ne s’agit pas d’un fait nouveau : le harcèlement scolaire a toujours existé à des degrés divers, même si celui-ci prend aujourd’hui des formes nouvelles du fait de l’incidence des nouvelles technologies, et en particulier de l’engouement des jeunes pour les réseaux sociaux. En effet, les élèves du XXIe siècle, dits de la « génération Z », vivent dans un monde hyperconnecté où le moindre événement du quotidien est susceptible d’être médiatisé et propagé en quelques secondes seulement sur la toile et les réseaux sociaux. Non seulement tous les adolescents ou presque sont équipés d’un smartphone dès leur entrée au collège, mais toutes les classes disposent également d’un compte créé sur l’un des nombreux réseaux sociaux existants. Il n’est pas rare non plus que l’établissement scolaire lui-même possède à son insu un compte sur un réseau social créé à l’initiative d’un élève ou d’un groupe d’élèves. Partage de photos, de vidéos, mise en ligne de commentaires, rythment ainsi le quotidien de nos élèves. Ces échanges virtuels parfois éphémères – sur certains réseaux sociaux, les publications s’effacent au bout de quelques secondes – peuvent être source de conflits, de malentendus et de rumeurs, qui finissent par ressurgir à un moment ou à un autre dans la vie de la classe ou de l’établissement. Le phénomène de harcèlement se trouve donc amplifié et devient plus difficilement contrôlable. Alors qu’autrefois le harcèlement se cantonnait le plus souvent à un lieu unique – l’établissement scolaire et ses abords – celui-ci tend désormais de plus en plus à se prolonger au-delà de ces frontières physiques : le harcèlement, en quelque sorte, « se désanctuarise », ne laissant aucun répit à l’élève qui le subit et envahissant peu à peu tout son psychisme. Il est donc essentiel, au regard de ce nouveau contexte, de continuer à sensibiliser les élèves, leurs parents, mais aussi les équipes éducatives, à un usage responsable des réseaux sociaux et des nouvelles technologies en général.
Nous assistons depuis quelques années à une prise de conscience des responsables politiques et de l’opinion publique sur la question du harcèlement scolaire et des dangers liés aux nouvelles technologies, qui ont profondément transformé notre rapport à l’information et à la communication humaine. Dans ce sens, les politiques éducatives impulsées par les établissements scolaires et le Ministère de l’Éducation nationale sont encourageantes, et ont souvent plusieurs entrées possibles : les Comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC), des partenariats avec certains organismes tels que le Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information (CLEMI), la formation des délégués de classe, le déploiement du dispositif des ambassadeurs lycéens contre le harcèlement… Tous les personnels peuvent et doivent se saisir de cette question, y compris les enseignants dans le cadre de leurs programmes d’enseignement (Éducation aux médias et à l’information, Éducation morale et civique, Accompagnement personnalisé…).
L’objectif de cet article n’est pas de présenter une nouvelle théorie sur le harcèlement, mais de donner des pistes de réflexion et même des conseils pratiques issus de mon expérience de CPE en lycée pour prendre en charge les situations de harcèlement qui peuvent se présenter à nous dans le quotidien de notre établissement et de notre mission éducative auprès des élèves. Avant cela, nous reviendrons néanmoins en amont, mais brièvement, sur la définition du harcèlement scolaire, ses formes et ses acteurs. Nous mentionnerons également quelques idées d’actions concrètes qui peuvent facilement être mises en place au sein d’un collège ou d’un lycée pour sensibiliser les élèves au harcèlement.

 

Qu’est-ce que le harcèlement scolaire ? Comment se manifeste-t-il ? Quels sont ses acteurs, ses formes et ses conséquences ?

Avant de parler plus avant de « harcèlement scolaire », une remarque s’impose quant à l’emploi du terme « harcèlement ». En effet, combien d’élèves ou même d’adultes se disent « harcelés » par leur professeur, leur supérieur hiérarchique, un voisin ou leurs parents ? La plupart du temps, ce terme est employé à mauvais escient pour désigner des situations qui peuvent certes être ressenties comme désagréables, mais qui ne relèvent pas à proprement parler ou juridiquement parlant de « harcèlement ». Il faut savoir en effet que ce terme juridique désigne, en droit, un délit inscrit dans le Code pénal, passible d’une amende et d’une peine d’emprisonnement. Il en résulte, dans les faits, que seul un juge est habilité à qualifier des faits de « harcèlement ». Il convient donc d’employer ce terme avec la plus grande précaution et donc de distinguer ce qui relève d’une « embrouille » entre élèves (chamailleries, altercation verbale ou physique isolée, bousculade), de ce qui relève du « harcèlement » propre.

Pour éviter tout abus de langage ou erreur d’appréciation, il est donc essentiel de disposer d’une définition claire et précise de ce qu’est le harcèlement. Ainsi, selon Dan Olweus*, « un élève est victime de harcèlement lorsqu’il est soumis de façon répétée et à long terme à des comportements agressifs induisant une relation d’asservissement psychologique qui se répète régulièrement, amenant des sentiments de peur et/ou de honte ». Les situations de harcèlement scolaire sont toutes différentes, et souvent complexes, mais elles comportent toutes cependant quelques caractéristiques communes : répétitivité, mise à l’écart de la victime, rapport de force. Il n’est pas nécessaire en outre que ces trois caractéristiques soient réunies pour que le harcèlement soit néanmoins constitué. Même s’il est statistiquement plus fréquent au collège et dans les écoles primaires qu’au lycée*, tous les enfants, quels que soient leur âge, leur sexe, leur origine sociale ou ethnique ou autre, peuvent, à un moment ou à un autre de leur scolarité, être confrontés au harcèlement. Selon les enquêtes de l’Unicef et de l’Observatoire international de la violence à l’école, la prévalence estimée du harcèlement à l’école est de l’ordre de 10 %, soit un enfant sur dix, et s’étalonne de la façon suivante : 12 % des écoliers de cycle 3, 10 % des collégiens et 3 à 4 % des lycéens. Ces données n’ont qu’une valeur indicative. En effet, d’une part les faits de harcèlement scolaire ne sont pas tous connus ou déclarés, et, d’autre part, il peut exister un écart important entre le pourcentage d’élèves qui se disent victimes de harcèlement (perception) et le pourcentage de victimation réelle*.
Le harcèlement, qui est de nature multiforme (moral, physique et social), implique l’intervention de trois acteurs différents : le ou les auteurs, la victime, et les témoins. Dans cette relation triangulaire, le rôle des témoins ne saurait être négligé ou sous-estimé au motif qu’il n’y a pas de harcèlement sans témoins : en effet, le harcèlement se passe rarement dans l’intimité d’une relation duelle. Au contraire, il y a toujours une sorte de « mise en scène » au cours de laquelle l’élève harceleur se donne « en spectacle » devant ses pairs en humiliant une victime. Le rôle de témoin possède souvent un spectre assez large, allant du témoin-suiveur qui encourage par son attitude le harcèlement (applaudissements…), au témoin-défenseur qui tente d’apporter son soutien à la victime, en passant par le témoin-outsider qui, lui, reste dans une posture de spectateur passif. Souvent, les témoins, quel que soit leur rôle, n’osent pas intervenir de peur d’être à leur tour harcelés ou exclus du groupe auquel ils pensent appartenir et dont le leader n’est autre, souvent, que l’élève harceleur. Parfois, les rôles de victime et de bourreau, auxquels on peut ajouter celui de sauveur, ont déjà été distribués et sont pleinement assumés. Ces jeux psychologiques auxquels s’adonnent ces trois types de participants ont d’ailleurs été formalisés par Stephen Karpman au travers du concept de « triangle dramatique1 ». En fonction de son rôle dans l’échange ou la relation, chaque participant adopte une série de comportements et de réactions bien codifiés : le bourreau ou persécuteur domine autrui dans le but de canaliser ses peurs et souffrances ; la victime, impuissante, cherche à dominer en apitoyant les autres ; le sauveur vole au secours de la victime et assoit sa domination en se rendant indispensable. Selon cette théorie, si un individu endosse un des rôles du triangle dramatique, alors les réactions en chaîne se déclenchent automatiquement. Il est donc important, dans le contexte d’un harcèlement, de casser cette spirale infernale dans laquelle les élèves sont enfermés. Chacun doit en effet reprendre son rôle d’élève, et la relation d’égalité doit être restaurée.
Il faut rappeler d’autre part qu’il n’y a pas en soi de profils-types de victimes ou d’auteurs de harcèlement. Cependant, il existe des facteurs de risque et des constantes au niveau de la personnalité et dans les histoires de vie des enfants harcelés et harceleurs. Ainsi, les élèves harcelés sont souvent des enfants solitaires, introvertis et pacifiques. Ces enfants, qui sont à la fois en manque de confiance et porteurs d’une différence visible, manquent souvent d’estime de soi. Ils sont inquiets à l’idée de déplaire ou de décevoir, et sont donc plus volontiers soumis. Les parents des enfants harcelés sont des parents généralement anxieux et protecteurs. D’autre part, les élèves harcelés le sont souvent lorsqu’ils traversent des épreuves de vie (divorce des parents, deuil, maladie, déménagement, rupture, changement d’établissement). Ces événements extérieurs peuvent fragiliser l’adolescent et le rendre ainsi plus vulnérable.
De même, il existe des constantes ou des facteurs de risque chez les élèves harceleurs. Ces enfants sont souvent dénués d’empathie et ont un rapport à l’autre fondé sur la domination et le conflit. Ils ont souvent besoin d’être au centre de l’attention et d’être admirés, c’est pourquoi ils essaient par tous les moyens d’accéder au statut de meneur. Sur le plan familial, les parents des enfants harceleurs sont des parents généralement débordés et peu cadrants. L’enfant a pris le pouvoir sur ses parents et impose ses propres règles à la maison, schéma qu’il transpose à l’école par pur mimétisme. Les élèves harceleurs font souvent face à des carences affectives ou éducatives, et ont des difficultés à gérer un conflit intérieur ou familial (divorce, recherche d’identité, blessure narcissique…). Qu’ils soient harcelés ou harceleurs, il faut garder à l’esprit que ce sont des enfants en grande souffrance humaine et psychologique, qui ont besoin d’une prise en charge rapide et globale.
Dans les situations de harcèlement avéré, auteur et victime entretiennent une relation extrêmement polarisée, qui s’articule autour d’un rapport de domination et de soumission poussé à l’extrême. Aussi, la notion de harcèlement est très liée à celle de discrimination : très souvent, le harcèlement naît de la perception d’une différence chez l’autre qui est intériorisée comme négative, dérangeante ou menaçante pour sa propre identité ou celle du groupe. De fait, l’élève harcelé est souvent porteur d’une différence (cheveux roux, couleur de peau, oreilles décollées, obésité, orientation sexuelle, milieu social…) perçue négativement par le ou les auteur(s) de harcèlement car susceptible de remettre en cause l’image et les valeurs du groupe, et donc sa stabilité. Cette différence polarise alors toute l’attention de l’élève harceleur et des témoins, et c’est dans ce contexte que se met en place le processus de harcèlement. Celui-ci peut prendre des formes multiples : moqueries, brimades, insultes, bousculades, violences physiques, racket, chantage, menaces, intimidations… Dans ma pratique de CPE, j’ai cependant souvent observé que le harcèlement était surtout présent sur le plan psychologique, même si les autres formes de violences, notamment physiques, ne peuvent être exclues. Force est de constater d’ailleurs que le harcèlement survient généralement dans un contexte de fragilité personnelle chez la victime (problématique familiale, événement extérieur, rupture amoureuse…).
Certains spécialistes, comme Nicole Catheline* , ont tenté d’identifier les causes pouvant expliquer l’augmentation ressentie des harcèlements scolaires. Cette pédopsychiatre auprès d’élèves en difficulté et formatrice pour les enseignants, avance deux hypothèses : la pression scolaire de plus en plus croissante avec l’emprise des diplômes d’une part, et d’autre part le renoncement de beaucoup d’adultes, qu’ils soient parents ou enseignants, à apprendre aux enfants à vivre en groupe avec leurs différences. Les actions de prévention, pour être efficaces, doivent donc agir également sur ces deux facteurs.

Les conséquences du harcèlement peuvent être très graves, au premier chef pour la victime, mais aussi pour les auteurs. Ces conséquences sont autant de signes qui doivent alerter la communauté éducative et les parents. Parmi les conséquences les plus fréquentes : souffrance psychologique, décrochage scolaire, problèmes de santé, conduites à risques, troubles alimentaires, échec scolaire, problèmes relationnels, dépression, suicide… Une prise de poids brutale et inexpliquée, des absences perlées, un désinvestissement de l’élève dans sa scolarité, un comportement et des idées suicidaires, des somatisations multiples et répétées sont des signes qui n’indiquent pas obligatoirement qu’un élève est harcelé, cependant ils doivent attirer notre attention car ils révèlent un mal-être important dont la cause doit être recherchée. Le harcèlement, parce qu’il s’inscrit dans la durée, peut laisser des traces plus ou moins durables chez la victime, ou avoir des conséquences qui peuvent se déclarer des années plus tard et même parfois se poursuivre dans la vie adulte. Souvent, un élève qui a été harcelé reste fragile psychologiquement. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le mot « harcèlement » renvoie étymologiquement à la « herse », cet outil agricole qui fouille la terre pour la travailler avant de semer. L’origine du mot exprime donc bien à la fois cette idée de répétition et de traces profondes.

 

Quelles actions peuvent être mises en place en interne pour prévenir et lutter contre le harcèlement à l’école ?

Que ce soit à l’école, au collège, ou au lycée, les actions de sensibilisation en direction des élèves sont indispensables pour lutter contre ce phénomène. Le potentiel d’actions est très large : organisation de la Journée nationale de lutte contre le harcèlement à l’école (premier jeudi du mois de novembre), formation des délégués de classe, intervention de partenaires extérieurs (ambassadeurs lycéens contre le harcèlement, référent police, juriste…). Il est également possible de faire réfléchir les élèves sur la question du harcèlement dans le cadre d’un enseignement, d’une séance au CDI, d’une heure de vie de classe, d’un débat en EMC ou d’un enseignement pratique interdisciplinaire (EPI) au collège. Les possibilités sont nombreuses. Les élèves et les personnels volontaires pour s’engager dans une action peuvent s’appuyer sur le site « Non au harcèlement » où de nombreuses ressources adaptées à un public de collégiens ou de lycéens sont proposées (affiches, vidéos, guides, cahiers d’activités…). Il peut s’agir de demander aux élèves d’élaborer une affiche, de créer une bande dessinée, d’écrire un article pour le journal du lycée ou, comme l’ont fait les élèves de 2de professionnelle Gestion-administration du lycée Jean Zay l’année dernière, de réaliser une vidéo dans le cadre du prix « Non au harcèlement2 ». Avec des collégiens ou des lycéens, il est fortement conseillé d’aborder la problématique du cyberharcèlement. En effet, la plupart des situations de harcèlement en collège ou en lycée naissent ou se développent sur les réseaux sociaux. Il est donc important de former les élèves au bon usage des réseaux sociaux et à la protection de leurs données. Du point de vue des actions, deux options sont donc possibles : soit rendre les élèves acteurs d’un projet de prévention en direction de leurs pairs, soit les mettre en situation de formation en invitant des partenaires extérieurs.

Il est également important de sensibiliser les parents d’élèves pour qu’ils sachent repérer le plus tôt possible les signes d’alerte chez leur enfant. Il s’agit bien sûr de leur expliquer ce qu’est le harcèlement scolaire et de souligner l’importance d’être à l’écoute des modifications brutales de comportement de leur enfant : refus d’aller à l’école, difficulté à se lever le matin, isolement, maux de ventre à répétition, problèmes de comportement, absences, troubles de l’attention et de la concentration. Il convient aussi de leur expliquer que s’ils pensent que leur enfant est harcelé, ils ne doivent pas intervenir directement auprès des enfants ou des parents concernés. Le premier réflexe qu’il faut leur enseigner est de contacter l’établissement scolaire et de demander à rencontrer rapidement la Direction ou le CPE. Il faut enfin attirer leur attention sur l’usage du web et des réseaux sociaux, et leur rappeler quelques principes de précaution : protéger ses données personnelles en paramétrant ses comptes, ne pas envoyer de photos ou de vidéos de soi, réaliser des captures d’écran en cas de problème… Si l’on veut que les messages de prévention soient entendus et suivis d’effet, il est essentiel que les adolescents entendent le même discours à l’école et à la maison, d’où la nécessité d’impliquer et de sensibiliser également les parents.

D’autre part, si l’on souhaite lutter efficacement contre le harcèlement scolaire, il faut certes mettre en place des actions de prévention en direction des élèves et des parents, mais il faut également apprendre aux élèves à vivre ensemble au sein de la même classe, souvent très hétérogène, et leur apprendre à accepter leurs différences. L’école, en tant que lieu de socialisation et d’apprentissage des relations humaines, doit accompagner les élèves dans la construction de cette compétence sociale qui est loin d’être innée. L’acceptation des différences reste effectivement problématique chez certains élèves. Il est donc nécessaire dans ce contexte de travailler avec les élèves sur la gestion des conflits et des tensions en trouvant d’autres solutions que la violence, de leur apprendre à travailler ensemble et à accueillir l’autre dans sa différence, sans jugement. Il faut ainsi aider les élèves à développer leur sens de l’empathie et à prendre conscience de leurs propres différences pour être en capacité ensuite d’accepter celles des autres (« l’autre est différent mais je le suis tout autant que lui »).
Il y a donc toute une réflexion et une stratégie qui doivent se mettre en place autour de la notion du « vivre ensemble ». Les travaux de groupe, les débats, les projets de classe, les exercices de communication non violente (conseils coopératifs), les heures de vie de classe, les temps de vie collectifs (activités sportives, séances collectives de relaxation) offrent dans ce cadre des perspectives intéressantes.

 

Quelle prise en charge face à un cas de harcèlement scolaire ?

Les situations de harcèlement, lorsqu’elles sont connues, nécessitent une prise en charge rapide et des réponses adaptées. Face à un cas supposé de harcèlement, l’équipe éducative ne doit pas hésiter à mobiliser toutes les ressources institutionnelles à disposition. Il faut se rappeler, par exemple, que tous les établissements scolaires peuvent prendre l’attache du référent académique ou départemental harcèlement pour obtenir un avis ou des conseils. De même, il existe un « Protocole de traitement des situations de harcèlement dans les collèges et les lycées* » élaboré par le Ministère de l’Éducation nationale. Ce guide, très complet et accessible en ligne, donne des outils et des conseils pour aider à la prise en charge des situations de harcèlement entre élèves.
En nous appuyant sur ce protocole et notre expérience, nous pouvons déterminer les principales étapes à suivre dans la prise en charge d’une situation de harcèlement.

• Recevoir l’élève victime
La toute première étape consiste à recueillir la parole de l’élève victime au cours d’un entretien individuel durant lequel l’adulte doit se montrer disponible. Cet entretien est essentiel car il doit permettre à l’adulte de comprendre la situation et de reconnaître à l’élève son statut de victime. L’adulte prendra soin de conserver une trace écrite de cet entretien pour rendre compte des faits à sa hiérarchie et assurer ainsi le suivi de la situation en cours de traitement. L’entretien doit favoriser la verbalisation et la reformulation : l’élève victime doit mettre des mots sur ce qu’il vit et ressent, et l’adulte doit s’attacher à reformuler les propos de l’élève pour s’assurer d’avoir bien compris et de ne pas basculer dans l’interprétation de faits. La posture de l’adulte et sa méthode d’entretien sont dans ce contexte déterminantes. Il s’agit avant tout d’un entretien d’aide et d’écoute. L’adulte prendra soin de ne pas enfermer l’entretien dans un jeu de questions-réponses ou de multiplier les questions fermées. Cette technique d’entretien, comparable à un interrogatoire, serait en effet synonyme d’insécurité pour l’élève et contraire à l’objectif recherché : l’entretien doit au contraire contribuer à libérer la parole de l’élève et à le mettre en confiance. Il est donc souhaitable de privilégier les questions ouvertes. L’entretien doit permettre à l’adulte de recueillir les éléments suivants : le nom du ou des auteurs et des témoins, la nature des faits (moqueries, chantage, menaces…), leur durée (date à laquelle ont commencé les faits), les lieux où les faits se sont produits (salle de classe, cour, vestiaires, couloirs, cantine…) et les conséquences de ce harcèlement sur l’élève victime. En cas de cyberharcèlement, il convient de demander à l’élève s’il possède des preuves, en particulier des captures d’écran.

Aussi, l’adulte doit être dans une posture d’écoute active et non jugeante : il ne faut sous aucun prétexte faire culpabiliser l’élève, même si l’on estime à certains égards qu’il a eu à un moment ou à un autre une part de responsabilité dans la situation. Avant de mettre un terme à l’entretien, il est important d’apporter son soutien à l’élève et de le rassurer. Il convient de lui expliquer les actions qui vont être mises en place à la suite de l’entretien et lui assurer que l’institution va prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin au harcèlement et le protéger. En fonction de l’état psychologique de l’élève, il peut lui être demandé de rédiger un écrit à la suite de l’entretien. Cet écrit, dont le contenu devra être le plus factuel possible (qui ?, depuis quand ?, où ?, faits ?), n’est pas indispensable en soi, cependant il peut aider l’élève à objectiver la situation et à prendre du recul. Après l’entretien, l’adulte rendra compte des faits au chef d’établissement qui doit être informé régulièrement du suivi de la situation. Suivant la gravité des faits, d’autres acteurs pourront également être sollicités dans la prise en charge de la situation et de l’élève (infirmière scolaire, assistante sociale, psychologue de l’Éducation nationale). Aussi, en cas de danger ou de risque de danger pour les élèves victimes ou auteurs de faits de harcèlement, le chef d’établissement est dans l’obligation soit de transmettre une information préoccupante (IP) au Conseil Départemental, soit d’adresser un signalement au Procureur de la République en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale.

• Recevoir les élèves témoins
Il convient dans un second temps de recevoir les témoins, séparément, quel que soit leur niveau d’intervention ou leur degré de responsabilité dans le harcèlement. Une fois de plus, l’adulte doit conserver une posture éducative : le but de ces entretiens n’est pas de porter un jugement sur l’attitude des élèves, sur leur réaction ou non-réaction face aux faits de harcèlement dont ils ont été témoins, mais bien de progresser dans l’analyse et la compréhension de la situation. L’adulte demandera aux élèves de faire le récit de ce qu’ils ont fait ou observé. Ces entretiens auront également une dimension éducative marquée : il s’agira de rappeler aux élèves l’importance de signaler à l’avenir toute situation anormale au sein de la classe ou de l’établissement et de les rassurer quant aux conséquences pouvant découler d’une telle initiative. Si les élèves ne se confient pas aux adultes, c’est parce qu’ils craignent le plus souvent des représailles, ou parce qu’ils subissent des pressions extérieures. Il est donc pertinent de les rassurer.

• Recevoir l’élève auteur
Après avoir mené les entretiens avec la victime et les témoins, il convient à présent de recevoir l’élève auteur de harcèlement. Il faut, en début d’entretien, informer l’élève que l’un de ses pairs s’est plaint de violences répétées sans donner davantage de précisions. En effet, l’élève doit être en mesure de s’exprimer librement selon le principe du contradictoire. Dans ce sens, l’adulte veillera à ne pas suggérer de réponses à l’élève ou à le contredire constamment. Il est possible que l’élève nie tout en bloc ou minimise les faits. Quel que soit le degré de reconnaissance des faits, il est important de reposer fermement le cadre éducatif et de demander à l’élève de mettre fin immédiatement au harcèlement. La demande de l’adulte doit être claire et ferme et s’appuyer sur le règlement intérieur. L’élève doit ensuite être informé des mesures éducatives et disciplinaires qui pourront être mises en œuvre à l’issue de l’entretien (convocation de la famille, sanctions). Si l’élève ne semble pas prendre conscience de la gravité des faits qui lui sont reprochés, il importe alors de lui rappeler que le harcèlement est un délit et que, dans ce contexte, les parents de l’élève victime sont en mesure de porter plainte. Il ne s’agit pas en soi de judiciariser l’affaire, ce qui n’est pas notre rôle, mais de donner des arguments à l’élève pour parvenir à une prise de conscience réelle, sans quoi il recommencera. À l’issue de l’entretien, il s’agira donc de vérifier que l’élève a bien compris le changement d’attitude qui est attendu de lui.
Si plusieurs élèves sont auteurs, ces derniers seront reçus séparément selon le même protocole.

• Recevoir les familles
Dès lors que les élèves ont été reçus en entretiens individuels, il importe de recevoir les familles, en priorité les parents de l’élève victime et ceux de l’élève ou des élèves auteur(s). Le dialogue qui se met en place entre l’établissement et les familles est essentiel, et permet de les associer pleinement au traitement de la situation dans une logique de co-éducation.
Les parents de l’élève victime doivent être informés de la situation, ainsi que des mesures qui ont été prises par l’établissement. Il est important également de les informer de leurs droits. Les parents ont effectivement la possibilité de déposer une main courante ou d’effectuer un dépôt de plainte. Le rôle du chef d’établissement (ou de son représentant) dans le contexte de ce rendez-vous est de rassurer les parents en leur garantissant la protection de leur enfant. Ce rendez-vous peut être également l’occasion de leur proposer de rencontrer l’assistante sociale pour être accompagnés dans leurs démarches. De même, l’aide de l’infirmière scolaire ou de la psychologue de l’Éducation nationale peut également s’avérer précieuse dans un contexte de souffrances psychologiques.
Quant aux parents de l’élève auteur, ils devront également être informés de la situation. Il conviendra de leur expliquer les conséquences des actes de leur enfant sur l’élève victime. Les parents devront être informés des sanctions encourues par leur enfant au regard du degré de gravité du harcèlement (blâme, mesure de responsabilisation, conseil de discipline…).

• Et après… ?
Lorsque l’on estime que la situation est stabilisée, il s’agira de mettre en œuvre des mesures d’accompagnement adaptées en direction de l’élève victime, mais aussi de l’élève ou des élèves auteur(s). Les équipes éducatives devront être informées de la situation afin de rester en état de veille et de vigilance.
Les élèves pourront être orientés, après accord de leurs parents, en fonction de la situation, vers l’infirmière scolaire, le CPE, l’assistante sociale ou la psychologue de l’Éducation nationale. Il est également possible d’orienter les élèves vers un lieu d’accueil et d’écoute extérieur à l’établissement, comme la Maison des adolescents (MDA) ou un Centre médico psychologique (CMP). Quelle que soit l’option choisie, un suivi régulier de ces élèves doit impérativement se mettre en place et se prolonger autant que nécessaire. Parallèlement à ces mesures de suivi, il peut être pertinent de mener des actions de prévention dans la classe où le harcèlement a eu lieu en faisant appel à des partenaires extérieurs (référent police ou gendarmerie, BPDJ, ambassadeurs lycéens contre le harcèlement, référent harcèlement, magistrat, formateurs CLEMI en cas de cyberharcèlement, équipes mobiles de sécurité…) ou en mobilisant à l’interne des personnels ressources au sein de l’établissement (CPE, infirmière, assistante sociale).

 

Face au harcèlement scolaire, tous les acteurs du système éducatif doivent se mobiliser pour lutter contre ce phénomène. Chacun à son niveau doit se sentir concerné et pouvoir s’impliquer dans la lutte contre le harcèlement. Les actions de prévention menées dans les établissements scolaires sont indispensables, cependant il convient également de mener une réflexion sur les stratégies à mettre en place pour apprendre aux élèves à mieux vivre ensemble en les aidant à accepter leurs différences et à trouver d’autres réponses que la violence dans les situations de tensions et de conflits. La prévention du harcèlement scolaire passe en effet par des actions de sensibilisation en direction des élèves et des familles, mais aussi en agissant sur le climat de classe.

 

 

Lutter contre le harcèlement scolaire entre pairs

Les ambassadeurs contre le harcèlement

Sensibiliser et prévenir contre le harcèlement scolaire les autres lycéens et même les collégiens de leur bassin, telle est la mission dont s’acquittent désormais nos ambassadeurs.

«  Tu as vu Jean, il ressemble à un ballon de foot » ; « Ouais, Corinne est une fille facile, elle traîne avec tous les gars de la classe. D’ailleurs elle a une sale réputation sur Facebook » ; « Quant à Marianne, il faut plus lui parler, c’est une intello bourge…  »

Ces moqueries, insultes, injures répétées et amplifiées par la caisse de résonance des réseaux sociaux, accompagnées d’une mise à l’écart systématique et de diverses représailles physiques, ont des conséquences scolaires graves. Anxiété, dépression gagnent peu à peu l’élève, décrochage scolaire et absentéisme s’ensuivent, pouvant mener jusqu’au suicide. On assiste à des « micro-violences répétées », selon l’expression de l’universitaire Éric Debarbieux2. Pour Nicole Catheline3, pédopsychiatre, ces « micro-violences » trouvent le plus souvent leur origine dans la perception d’une différence chez l’autre, différence qui suscite un sentiment de peur chez l’auteur de harcèlement et contribue à la mise à l’écart de la victime et à sa stigmatisation au sein du groupe.
Selon un article du quotidien Le Monde daté du 9 novembre 2017, on dénombre en France 700 000 élèves victimes de harcèlement scolaire. Des chercheurs, Éric Debarbieux notamment, emploient le concept anglo-saxon de « school bullying ».
Avec le développement des réseaux sociaux, le cyberharcèlement ou cyberbullying est la version moderne et électronique du harcèlement, aux effets toujours aussi dévastateurs. En prolongeant au domicile de l’élève le harcèlement subi au sein de l’établissement, le cyberharcèlement ne laisse aucun répit à la victime. Désormais, aucun espace de vie n’est protégé. Exposée 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, la victime connaît un état d’insécurité permanent, et se sent encore plus isolée, traquée et fragilisée. On estime qu’un enfant sur dix en moyenne est victime de harcèlement au cours de sa scolarité.
Un travail d’équipe
À la rentrée 2017, Yohan Haquin, conseiller principal d’éducation alors chargé du suivi des classes de 2de générale, technologique et professionnelle au lycée Jean Zay d’Orléans, et référent vie lycéenne, souhaite mettre en place le dispositif « ambassadeurs lycéens contre le harcèlement » dans son établissement4. Ce dispositif a pour objectif d’impliquer davantage les élèves dans la lutte contre le harcèlement scolaire, car celle-ci ne peut être efficace sans une mobilisation de tous les acteurs du lycée, adultes comme élèves. Outre son action en faveur de la lutte contre le harcèlement, ce dispositif entend également valoriser le rôle des élèves en leur confiant plus de responsabilités dans la vie et le fonctionnement de leur établissement. Grâce à ce dispositif, des élèves qui n’étaient pas délégués de classe ou membres de certaines instances comme le Conseil de vie lycéenne (CVL) ou le Conseil d’administration (CA), ont ainsi eu l’opportunité de jouer un rôle important – et apprécié – dans la vie de leur lycée.
Le projet s’appuie sur le guide « Non au harcèlement5 » réalisé conjointement par les élus du Conseil national de la vie lycéenne (CNVL), réunis le 7 octobre 2015, et par la mission ministérielle pour la prévention et la lutte contre les violences en milieu scolaire. Le dispositif des ambassadeurs lycéens contre le harcèlement se met en place à la rentrée 2017 avec neuf élèves volontaires de 2de et de Terminale, grâce à une campagne de sensibilisation et d’inscription et avec le concours d’Amandine Ratignier, professeure documentaliste stagiaire.
Ils étaient huit à la rentrée 2018 : d’abord cinq volontaires début octobre, auxquels trois autres élèves s’ajoutent à l’occasion d’une journée de recrutement ; lors de celle-ci, les ambassadeurs assurent des permanences dans le hall de la Maison des lycéens avec, en toile de fond, des affiches de communication qu’ils ont pu réaliser en amont. Ils seront onze lors de cette rentrée, dont trois anciens
En choisissant de devenir ambassadeurs, ces lycéens s’engagent à suivre une formation départementale d’une journée et à préparer leurs interventions auprès des délégués de classe collégiens et lycéens, pour ensuite les assurer. Ces différents temps de formation (7 h 30), de préparation (16 h 30) et de sensibilisation (8h) se déroulent, après convocation des élèves par leur CPE, sur leur temps scolaire, et correspondent à plus d’une trentaine d’heures réparties sur toute l’année et réalisées en co-animation avec le CPE et les différentes professeures documentalistes. Élèves-ressources au sein du lycée, les ambassadeurs lycéens contre le harcèlement ont un rôle d’écoute et de conseil auprès de leurs camarades. Leur mission consiste également à signaler les situations de harcèlement dont ils pourraient avoir connaissance à un personnel de l’établissement (CPE ou tout autre adulte) qui prend ensuite le relais. Il ne s’agit en aucun cas pour ces élèves d’intervenir directement dans le règlement de ces situations.

La formation des ambassadeurs

Ces lycéens volontaires reçoivent une formation d’une journée courant novembre sur la question du harcèlement scolaire. Les élèves doivent être accompagnés d’un adulte-ressource de l’établissement (CPE, professeur documentaliste, ou tout autre adulte). Cette formation, pilotée par le Délégué académique à la vie lycéenne (DAVL) et le Proviseur vie scolaire (PVS) de l’académie d’Orléans-Tours, permet aux ambassadeurs d’acquérir des connaissances sur le « harcèlement » – sa définition, ses formes et ses spécificités – et de découvrir les différents outils de sensibilisation mis à disposition par le Ministère. Cette journée de formation se déroule en deux temps. Le matin, les futurs ambassadeurs reçoivent une formation théorique qui privilégie la mise en activité des lycéens à partir de supports variés ; la plupart d’entre eux sont consultables et téléchargeables sur le site de référence « Non au harcèlement ». Ces supports (vidéos, affiches, guides, cahiers d’activités) peuvent d’ailleurs être réutilisés ensuite pour de futures actions en direction de leurs pairs. Les ambassadeurs se réunissent l’après-midi par lycée afin d’élaborer leur plan de prévention, avant une mise en commun en plénière permettant à tous de découvrir les projets de chaque lycée. Cette journée est aussi l’occasion de prendre en photo les lycéens pour réaliser une affiche permettant à tous les élèves du lycée d’identifier l’équipe des ambassadeurs.

La formation des délégués de classe du lycée

Les ambassadeurs contre le harcèlement fondent leur démarche de prévention en mettant en place des actions de sensibilisation en direction de leurs camarades lycéens. Les ambassadeurs du lycée Jean Zay ont réuni l’ensemble des délégués de classe afin de leur présenter leurs missions et de les sensibiliser à leur tour au harcèlement, et à l’importance de l’implication de tous. Les études démontrent que la mise en place de ce dispositif permet de réduire significativement le nombre de cas de harcèlement, et d’améliorer sensiblement la qualité du climat scolaire, facteur essentiel d’épanouissement et de réussite des élèves.
Le mercredi 20 décembre 2017 puis, l’année suivante, le mardi 15 janvier 2019, les ambassadeurs sont intervenus auprès de tous les délégués de classe du lycée, à raison d’une heure par niveau, soit environ 90 lycéens sensibilisés.
Dans le cadre de cette formation, les élèves ambassadeurs ont commencé par faire participer leurs pairs à un brainstorming sur la notion de « harcèlement ». Ils ont ensuite diffusé et commenté des clips de prévention sur le harcèlement, disponibles sur le site institutionnel « Non au harcèlement ». Vingt-cinq minutes étaient ensuite consacrées à un quiz interactif avec l’application Kahoot, et à un diaporama contenant les réponses au quiz. Grâce à ces outils, les ambassadeurs ont donné à leurs camarades une définition du harcèlement, ont présenté des statistiques officielles sur ce phénomène et ont abordé ses conséquences juridiques. À la fin de leur intervention, ils ont remis à chacun un dépliant contenant une synthèse de leur intervention, en leur confiant la mission de transmettre ces informations au reste de leur classe durant l’heure de vie de classe, et ce, avec l’accord du professeur principal.
Cette formation aura également été l’occasion pour ces lycéens, ambassadeurs et délégués de classe, de se rencontrer pour échanger et débattre sur cette question de société à laquelle nos jeunes, citoyens de demain, doivent être préparés.

La formation des délégués de classe des collèges de secteur

Chaque année, ce sont ensuite les délégués de classe de deux collèges qui sont sensibilisés à la lutte contre le harcèlement scolaire, à raison d’une heure et demie par séance. Pour organiser ces rencontres, qui permettent de créer du lien entre les collèges de secteur et le lycée, les rendez-vous sont pris par Yohan Haquin auprès de ses collègues CPE.
Après avoir présenté leur rôle, les ambassadeurs commencent par annoncer aux délégués de classe réunis sur deux niveaux (6e-5e et 4e-3e) les objectifs et le déroulement de la séance. Les ambassadeurs se révèlent à l’aise dans leur approche, et les délégués très attentifs. Un brainstorming permet de se rendre compte ensuite si les élèves possèdent déjà des connaissances sur le harcèlement, et quels aspects ils en ont retenu. Le nuage de tags numérique de l’année précédente a été remplacé cette année par une feuille blanche individuelle que chaque élève brandit après y avoir noté au marqueur quelques mots-clés : au final un paysage humain se dessine alors au-dessus de leurs mines réjouies, affichant les mots-clés repris par les ambassadeurs par thèmes sur le tableau blanc.
Plus d’une demi-heure est ensuite consacrée à un jeu de société, dont le concept provient du site de Tiphanie Jourdain, professeure documentaliste et auteure du site Lirado6, et dont trois exemplaires ont été édités. Les ambassadeurs ont personnalisé les questions et réponses proposées par les cartes, et imaginé la situation des groupes de jeu afin d’optimiser les échanges informels entre les collégiens et les maîtres de jeu. Ainsi, un ambassadeur s’installe au milieu des délégués de chaque îlot, ces derniers ayant été répartis dès le début de la séance en trois groupes autour d’une table. Il leur présente les règles du jeu, constitué d’un dé à trois couleurs, bleu, jaune, rose, qui détermine la couleur de la carte piochée, et donc de trois types de cartes :
– Les cartes bleues : le joueur lit la phrase puis décide s’il est d’accord, pas d’accord ou s’il hésite.
– Les cartes jaunes : le joueur répond à une question de « connaissance » autour du harcèlement.
– Les cartes blanches : le joueur lit un témoignage et s’exprime sur ce qu’il faudrait faire dans cette situation.
Un premier élève lance le dé. L’élève qui a tiré la carte la lit à haute voix et donne en premier son avis. Le débat est ensuite lancé entre les élèves, coordonné par le maître du jeu. Une fois la carte traitée, le dé passe à l’élève suivant et le jeu reprend ainsi de suite.
Tous les élèves participent avec plaisir, et les ambassadeurs font en l’occurrence d’excellents maîtres du jeu, adoptant une posture de pair, de camarade plutôt que de professeur. Ils ne prennent pas non plus de ton moralisateur, et ouvrent bien au contraire à l’échange.
La séance s’achève sur la présentation du diaporama élaboré par les ambassadeurs et d’un clip vidéo lauréat du concours « Non au harcèlement » adapté aux collégiens. Il ne reste plus qu’à rappeler aux délégués de transmettre toutes ces informations à leurs camarades.

L’écriture d’un scénario de court-métrage

Après les interventions des ambassadeurs dans les collèges de secteur, il a été question, au printemps 2019, de commencer la réalisation d’un court-métrage dans l’optique de participer en janvier 2020 au concours « Non au harcèlement7 ». Une analyse du clip « Les claques8 » a donc été proposée comme modèle aux ambassadeurs par la professeure documentaliste, Sandrine Leturcq, avant de les confronter à la conception de leur propre scénario. Après avoir choisi la forme de la fiction à l’unanimité, les trois séances suivantes, de deux heures chacune, ont été consacrées successivement à la recherche du pitch et du synopsis, puis au séquenceur, c’est-à-dire au découpage de l’action dans l’espace et le temps, et enfin au découpage dialogué avant la réalisation prévue cet automne. Pour ce court-métrage, les ambassadeurs ont choisi de focaliser l’attention du spectateur sur la victime de harcèlement, et de l’amener ainsi à réfléchir sur les conséquences d’une rumeur.

Un projet-classe autour du harcèlement

« Tolérance zéro au harcèlement »

À partir des actions, un projet s’est mis en place avec deux classes de Seconde professionnelle Gestion-Administration sur le thème du harcèlement au cours de l’année scolaire 2017-2018.
Après s’être référé au plan national de prévention du harcèlement9, et avoir été sensibilisé à cette problématique par l’article des Cahiers pédagogiques10 retraçant les initiatives pionnières de Bertrand Gardette, formateur pour les CPE dans l’académie de Clermont-Ferrand11, Yohan Haquin a inscrit les élèves de ces deux classes au prix « Non au harcèlement ». Ce prix est une initiative fédératrice et crée du lien entre les élèves des séries générales et ceux de la section d’enseignement professionnel du lycée Jean Zay.
Au début du projet, une réflexion autour du concept de harcèlement s’est engagée entre le professeur de philosophie, Sylvain Theulle, et les élèves. Après ce débat, la professeure documentaliste, Marie-Claude Bouley, a proposé aux élèves de découvrir l’album graphique Mots rumeurs mots cutter12 et le témoignage De la rage dans mon cartable13 de Noémya Grohan pour illustrer ce phénomène.
L’élaboration de deux courts-métrages, futurs outils de prévention pour les élèves ambassadeurs contre le harcèlement, élargit la participation des partenaires au sein du lycée. Les élèves de l’option musique ont concocté la bande-son des vidéos avec l’aide de leur professeur d’éducation musicale, Charles Toberman, et les élèves de l’option théâtre, soutenus par leur professeure Andrée Jolibois, se sont mobilisés. Le jury, pour sélectionner la vidéo à envoyer, avait réuni équipe de direction, élèves ambassadeurs, CPE, professeure documentaliste, professeure d’arts appliqués, et un parent d’élève. Le mercredi 24 janvier 2018, après avoir voté, le petit groupe réuni autour de la proviseure-adjointe, Monique Rey, a regardé ce court-métrage d’une durée de deux minutes réalisé par la professeure d’arts appliqués, Sophie Genevaux, et proposé pour le prix académique « Mobilisons-nous contre le harcèlement ». La musique lancinante et envoûtante contribuait puissamment à l’identification à cet anti-héros. Le texte, slamé, rythmait l’action :

«  Sur Sébastien, un lycéen timide, sérieux et sans histoire, pleuvent moqueries et brimades. Il se réfugie en vain dans les toilettes : une photo humiliante est au contraire postée et partagée sur les réseaux sociaux. Sébastien s’enfuit de nouveau, éperdu, sous les projectiles et les huées. Pourtant une voix têtue et déterminée s’élève : « ne jamais abandonner ». Face au caractère protéiforme du harcèlement, le constat est désabusé, désespéré parfois ; la tentation omniprésente du suicide alterne avec une volonté farouche de résistance, voire de résilience. »

Rencontre avec Noémya Grohan

Le Comité de Vie Lycéenne (C.V.L.), également animé par Yohan Haquin, a invité au lycée Jean Zay Noémya Grohan le 18 avril 2018. Les élèves de Seconde professionnelle qui participent au prix « Non au harcèlement », les neuf ambassadeurs contre le harcèlement et un parent d’élève assistent à la rencontre.
D’emblée, les élèves sont plongés dans le vif du sujet en découvrant le roman graphique Mots rumeurs, mots cutter, aux dessins magnifiques et au ton pastel : l’intrigue réaliste et actuelle touche les adolescents. Une banale histoire d’amour se tisse entre Mattéo, « un redoublant », beau gosse, et Léa, une discrète jeune fille rousse… tous se sont sentis concernés ! Soudain, l’idylle s’emballe et fait place au drame : Léa devient le bouc émissaire du collège. L’insidieux et subtil engrenage du harcèlement se met en marche avec sa cohorte de mots blessants, de violences physiques, de brimades et de persistantes et avilissantes rumeurs. La faute à une photo compromettante de Léa, prise à son insu, circulant sur les réseaux sociaux… L’auditoire, sous le choc, s’est identifié sans peine à la victime, Léa. Son empathie est la première étape du chemin vers le respect de l’autre, fragile et vulnérable.
Bien différent est le témoignage, fort et poignant, de Noémya Grohan retranscrit dans De la rage dans mon cartable. Personne ne vit l’expérience traumatisante du harcèlement prolongé sans encourir des risques graves, et les séquelles sont légion chez cette jeune adulte. Mais « ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort » : Noémya puise dans sa traversée de l’enfer la force d’agir et de s’engager par l’écriture et par le rap, ses exutoires. Étonnemment et admiration se sont intimement mêlés chez les auditeurs lycéens. Le message de la chanson écrite par Noémya fait mouche : « Certains mots tuent, mais c’est motus / Et bouche cousue, je n’en veux plus ». Maintenant pour nous, lycéens, le harcèlement c’est « tolérance zéro » !
Le CDI est souvent perçu non seulement comme un lieu d’apprentissage, de travail et de recherche, mais aussi comme un lieu de détente, de repos, voire de refuge pour les élèves isolés. Ses règles de vie posent les bases d’un respect mutuel pour en faire un cadre de travail et de vie agréable où chacun se rend parce qu’il le souhaite. C’est avant tout dans cette volonté globale de savoir-être ensemble induite par le lieu que s’exprime le rôle du professeur documentaliste dans la lutte contre le harcèlement scolaire. C’est ensuite, dans le cadre d’un projet en partenariat avec un collègue de discipline qu’il a la possibilité de lancer les élèves dans des recherches documentaires sur le harcèlement, mais surtout ici de leur donner à lire des ouvrages de fiction traitant de ce sujet et de leur faire rencontrer l’autrice, Noémya Grohan. C’est aussi, dans le cadre du dispositif des ambassadeurs, dans l’accompagnement à la conception de supports de communication et dans la formation à la prise de parole en intervention qu’il joue un rôle actif. Il en est de même, enfin, avec la réalisation d’un court-métrage, vecteur de communication par excellence de ce que les élèves ont compris des rouages du harcèlement pour influencer leurs pairs.
En rendant les élèves acteurs de la prévention contre le harcèlement, en leur laissant l’initiative et la responsabilité du contenu des formations dispensées à leurs pairs, et en les plaçant directement à l’écoute de leurs camarades, le dispositif des ambassadeurs favorise une approche globale et efficace de la lutte contre le harcèlement scolaire. Sensibilisation des élèves, prise de conscience, et politique bienveillante de prévention du harcèlement contribuent à l’amélioration du climat scolaire. Ce socle pour une transmission des connaissances influence de manière significative les capacités d’apprendre des élèves.

 

 

Le harcèlement scolaire

Textes et sites nationaux

La loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République et la circulaire n° 2013-100 du 13 août 2013 font de la lutte contre le harcèlement une priorité. Ainsi que le rappelle l’article L. 111-1 du code de l’éducation, le service public d’éducation, en effet, « veille à l’inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction. » « (Il) fait acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains (…)».
La politique de lutte contre le harcèlement menée par le ministère repose sur quatre axes : sensibiliser, prévenir, former et prendre en charge. Le site Internet dédié à cette campagne promeut une approche systémique du harcèlement, qui peut être combattu par une démarche collective intégrant tout un chacun en acceptant sa différence et en favorisant un meilleur climat scolaire. www.education.gouv.fr/nonauharcelement/

• Loi n° 2013-595 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République : « La lutte contre toutes les formes de harcèlement sera une priorité pour chaque établissement d’enseignement scolaire. Elle fera l’objet d’un programme d’actions élaboré avec l’ensemble de la communauté éducative, adopté par le conseil d’école pour le premier degré et par le conseil d’administration dans les établissements publics locaux d’enseignement (EPLE). Ce programme d’actions sera régulièrement évalué, pour être amendé si nécessaire. »

• Circulaire n° 2013-100 du 13-8-2013 (Prévention et lutte contre le harcèlement à l’école) : cette circulaire a impulsé le concours et la généralisation des ambassadeurs, d’abord dans les lycées, puis dans les collèges.

• Protocole de traitement des situations de harcèlement dans les écoles. « Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Non au Harcèlement », Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, 2016. 18 p. (en ligne, consulté le 14 octobre 2019).
http://cache.media.education.gouv.fr/file/10_-_octobre/48/3/Non-Au-Harcelement_2016_Protocole-de-traitement-dans-les-ecoles_648483.pdf

• Observatoire international de la violence à l’école / sous la dir. de DEBARBIEUX, Éric. « Refuser l’oppression quotidienne : la prévention du harcèlement à l’école. Rapport au ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative », 12 avril 2011 (en ligne, consulté le 14 octobre 2019).
http://cache.media.education.gouv.fr/file/2011/64/5/Refuser-l-oppression-quotidienne-la-prevention-du-harcelement-al-ecole_174645.pdf

• « Assises nationales sur le harcèlement à l’École ». in Ministère de l’Éducation nationale. Education.gouv.fr. Ministère de l’Éducation nationale, 2 et 3 mai 2011 (consulté le 14 octobre 2019).
www.education.gouv.fr/cid55689/assises-nationales-sur-harcelement-ecole.html

• « La lutte contre le harcèlement et les violences en milieu scolaire ». in Gouvernement. Gouvernement.fr. (consulté le 6/7/2019). Disponible sur www.gouvernement.fr/action/la-lutte-contre-le-harcelement-et-les-violences-en-milieu-scolaire

Dans les programmes

Collèges
Place dans les programmes d’EMC (Bulletin officiel n° 30 du 26 juillet 2018) et dans le parcours citoyen de l’élève, cycle 3, niveau de 6e, avec pour finalité : respecter autrui.
Exemple de séquence disponible sur
www.ac-paris.fr/portail/jcms/p2_1220567/le-harcelement-scolaire (consulté le 1/7/2019)

Lycées
Parcours citoyen de l’élève : la prévention et la lutte contre le harcèlement, la culture de l’égalité entre les sexes et du respect mutuel (circulaire n° 2016-092 du 20 juin 2016).
Les programmes de l’enseignement moral et civique prévoient également que cette notion soit abordée en cycles 2 et 3.

Pistes pédagogiques

• Mise en place des ambassadeurs au sein de l’établissement : conception d’affiches, de diaporamas, de clips vidéos… à destination de leurs pairs.

• Analyses de documents suivies d’un débat en Sciences Économiques et Sociales.

• Lecture et travail en Français sur un ou plusieurs romans de la bibliographie, lectures et questions de compréhension sur les textes, accueil d’un auteur.

• Séance sur le droit à l’image et sur la réputation sur les réseaux sociaux en éducation aux médias et à l’information.

• Réalisation d’affiches contre le harcèlement avec des élèves de section professionnelle dans le cadre du cours d’Arts appliqués (participation au concours officiel).

• Réalisation d’un court-métrage ou d’une pièce de théâtre avec les élèves d’une option Cinéma ou de l’option Théâtre (participation au concours officiel).

• Participation à un hackathon (le mot hackathon désigne à la fois le principe, le moment et le lieu d’un événement où un groupe de développeurs volontaires se réunissent pour réaliser un projet commun).
Proposer un Hackathon sur la sensibilisation à l’usage responsable des réseaux sociaux :
ex. : « réfléchir avant de partager », construire une vidéo, un slogan… un message en une phrase en conceptualisant le projet : à qui ? Pour qui ? Que retenir ?

Ces quelques suggestions peuvent être complétées par la mine d’informations et de ressources proposées sur le site institutionnel www.nonauharcelement.education.gouv.fr/ressources/outils
www.nonauharcelement.education.gouv.fr/ressources/plan-de-prevention-mis-en-place-a-lechelle-nationale/


Le concours

Le prix « Non au harcèlement »
Ce prix invite les élèves de 8 à 18 ans à s’exprimer sur le harcèlement à travers la réalisation collective d’une affiche ou d’une vidéo de prévention du harcèlement d’une durée maximale de 2 minutes. Les productions sont à remettre avant fin janvier au référent harcèlement de l’académie, la remise des prix académiques a lieu en mars, et la remise nationale en mai.
Les différents courts-métrages lauréats sont mis en ligne sur le site dédié, les réseaux sociaux du ministère et sur la chaîne Youtube.
En savoir plus : Prix 2016 « Non au harcèlement » circulaire n° 2015-159 du 22-10-2015
Disponible sur www.education.gouv.fr/cid73553/prix-non-au-harcelement.html
Voir aussi www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=93577 (consulté le 14 octobre 2019) et leur page Facebook www.facebook.com/nonauharcelementalecole/

Les associations

APEAS : cette association qui a pour objectif d’Accompagner, de Prévenir, d’Éduquer, d’Agir et de Sauver a officiellement étendu ses statuts à cette problématique.
En savoir plus https ://jeudufoulard.com/le-harcelement/

APHEE, l’Association pour la prévention des phénomènes de harcèlement entre élèves, a été créée en 2006 par Jean-Pierre Bellon et Guy Gardette, respectivement professeur de philosophie et formateur dans l’académie de Clermont-Ferrand.
http://harcelement-entre-eleves.com

Fil jeunes propose aussi un service d’appel anonyme et gratuit pour les 12-25 ans tous les jours de 9h à 23h : 0 800 235 236. Cette association propose aussi sur son site un dossier sur le harcèlement à l’école.
www.filsantejeunes.com/mal-etre/
violences-mal-etre2/des-dossiers-sur-
violences-mal-etre2/le-harcelement-a-lecole

Génér’action Solidaire, association dont Noémie Gohan est la Présidente, propose ses interventions en collèges et lycées.
https://generaction-solidaire.fr

La Fédération de la Ligue de l’Enseignement, avec le projet « Les Veilleurs », a également un programme de sensibilisation au harcèlement en milieu scolaire, sous un angle inédit, celui du témoin.
http://lae.paris/actions-scolaires-2nd-
degre/prevenir-harcelement-college-veilleurs/

Orfeee – Observation, Recherche et Formation pour une Écologie de l’Esprit à l’École – est habilité à dispenser des formations. Ce réseau a pour vocation de réunir des chercheurs et des intervenants de terrain autour des questions liées à l’école et aux diverses souffrances scolaires, dans le but de promouvoir toute avancée en termes de mieux-être à l’école.
http://probleme-souffrance-ecole.fr/

Les numéros de téléphone à connaître
• 3020 : c’est le numéro à appeler, proposé par le dispositif « Non au harcèlement à l’école »
• Net Ecoute 0800 200 00 : c’est le numéro vert proposé aux enfants et adolescents confrontés, dans leurs usages numériques, au cyberharcèlement.

Temps forts

Journée nationale de lutte contre le harcèlement le premier jeudi de novembre, organisée par le Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse.
www.education.gouv.fr/cid134915/journee-nationale-de-lutte-contre-le-harcelement-a-l-ecole.html (consultée le 14 octobre 2019)
Journée académique de formation dans les académies en novembre : imaginer des actions remarquables, relayées par les médias, pour ce jour spécial.

Textes juridiques

Cyberviolences à caractère sexuel
La loi n°2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique crée un article 226-2-1 du Code pénal, qui concerne les cyberviolences à caractère sexuel :
« Lorsque les délits prévus aux articles 226-1 et 226-2 portent sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel prises dans un lieu public ou privé, les peines sont portées à deux ans d’emprisonnement et à 60 000 euros d’amende.
Est puni des mêmes peines le fait, en l’absence d’accord de la personne pour la diffusion, de porter à la connaissance du public ou d’un tiers tout enregistrement ou tout document portant sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel, obtenu, avec le consentement exprès ou présumé de la personne ou par elle-même, à l’aide de l’un des actes prévus à l’article 226-1. »

Assistance à personne en danger
Tout citoyen a obligation de porter assistance à une personne en péril. Art. 223-6 du code pénal : « Quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l’intégrité corporelle de la personne s’abstient volontairement de le faire est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. »
Les conditions préalables :
Pour qu’il y ait obligation de porter secours, trois conditions préalables doivent être réunies. Il faut :
• qu’un péril grave menace une personne ;
• qu’un secours puisse être apporté à cette personne de la part du prévenu ;
• que ce secours puisse être porté sans risque ; la loi oblige les gens à être responsables et solidaires, mais elle ne leur demande pas de faire preuve d’héroïsme.
La loi « Revenge porn » (octobre 2016) accentue les condamnations encourues lors de diffusion d’images et/ou de photos intimes.

Une exposition itinérante

Stop au harcèlement scolaire ! (du CM2 à l’arrivée en seconde)
Dans le milieu scolaire, le harcèlement entre les élèves devient plus agressif et envahissant avec l’usage du téléphone portable et des réseaux sociaux. Destinée aux enfants et aux adolescents, cette exposition fait prendre conscience des souffrances causées par le harcèlement scolaire et donne des clés pour réagir lorsqu’on en est victime. Cette exposition de 10 panneaux de 80 x 120 cm, à accrocher sur grilles ou cimaises, est proposée à l’achat ou à la location. Ce thème produit par Double Hélice est disponible sous forme d’exposition itinérante, mais aussi d’album (8 €) ou de livre-accordéon (12 €).
www.double-helice.com/fr/expositions/societe/e/harcelement.html

 

Des jeux de société

• Le serious game Stop la violence ! est destiné à sensibiliser les élèves âgés de 12 à 17 ans au problème du harcèlement, et s’adresse principalement aux témoins de la violence. www.stoplaviolence.net

• Harcelgame, jeu créé par huit élèves de 5e du Tarn. www.stoplaviolence.net

• Le jeu de l’Oie proposé par la MAE (Assurance scolaire) a pour objectif de sensibiliser les adolescents au harcèlement sexiste, sexuel et homophobe. Il est disponible en prêt www.mae.fr/article/outils-prevention/08-11-2018/jeu-de-l-oie-sexisme-sexuel-homophobie_842.html

•#arcel’g@me, serious game créé par les membres de la Commission Respect et Lutte contre le harcèlement, élus pour le mandat 2014-2016 du Conseil départemental Jeunes du Tarn, avec l’aide d’un développeur, d’un graphiste et d’une psychologue. www.youtube.com/watch?v=_3AUm0U3IEg&t=

 

Serious game « Stop la violence ! » par Tralalère
Jeu de l’Oie par la MAE

 

Les conférences en ligne

Conférence sur le harcèlement scolaire donnée par Jean-Pierre Bellon à la Haute École pédagogique du canton de Vaud (Lausanne).
Jean-Pierre Bellon est, avec Bertrand Gardette, l’un des pionniers de la lutte contre le harcèlement en France. Leur dernier ouvrage, Harcèlement scolaire  : Le vaincre, c’est possible, La méthode Pikas, une technique éprouvée, est paru en 2016 (ESF Editeur).

APHEE. Conférence de Jean-Pierre Bellon sur le harcèlement scolaire à la HEP de Lausanne (vidéo en ligne). Youtube, 13 octobre 2016 (consulté le 17/10/2019). 1 vidéo, 1 h 23.
www.youtube.com/watch?v=KKwT4N36Lls

CATHELINE, Nicole. Le harcèlement scolaire. Canal U, 29 mars 2018 (consulté le 6 juillet 2019). 1 vidéo : 1 h 13.
www.canal-u.tv/video/universite_de_rouen/le_harcelement_scolaire.42031

Conférence sur le harcèlement scolaire avec Marie Quartier, psychopraticienne et responsable du réseau Orfeee qui intervient en milieu scolaire, et Elise Gauthier-Bakhoum, juriste et directrice de l’association Justice et Ville. Lycée Teilhard de Chardin. Conférence sur le harcèlement scolaire. Youtube, 2017 (consulté le 6 juillet 2019). 1 vidéo : 1 h 19.
www.youtube.com/watch?v=Fgpt3fAcxoA

Filmographie

Fictions

DE PALMA, Brian. – Carrie au bal du diable. Redbank films, Metro-Goldwyn-Mayer, 1976. 98 min.

FRANCO, Michel. – Después de Lucia. Filmadora Nacional, Lemon Films, Pop Films et Stromboli Films, 2012. 103 min.

GUERDJOU, Bourlem. – Marion, 13 ans pour toujours. – France 3, EuropeCorp, 2016. 89 min.

LAMOTTE, Christophe. – Le Jour où j’ai brûlé mon cœur. – Argo production, 2018. 104 min.
On pourra également se reporter à la page Wikipédia évoquant les films traitant du harcèlement à l’école
https://fr.wikipedia.org/wiki/Catégorie:Film_traitant_du_harcèlement_à_l %27école

 

Documentaires

RAWLINS-GASTON, Andrea ; FOLLEA, Laurent. Infra-rouge : souffre-douleurs, ils se manifestent. France 2, 2015. 52 min.

CNAF, CINEQUANON. – Harcèlement scolaire : comment lutter ? Vies de famille. 42 min. 34. Disponible sur http://viesdefamille.streamlike.com/media.php?p=9f7a59399b7b0ed2c387

Court-métrage réalisé par des élèves
CITE SCOLAIRE JACQUES MARQUETTE. – Parle ! (vidéo en ligne). Youtube, 2018. 1 vidéo, 10 min.
www.youtube.com/watch?v=UwA7-0XWTyg&frags=wn

 

Autres créations artistiques

Musique, chansons ou clips qui parlent de harcèlement scolaire

Indochine. – College Boy (vidéo en ligne). Youtube, 2013. Disponible sur www.youtube.com/watch?v=Rp5U5mdARgY
Attention, ce clip vidéo réalisé par Xavier Dolan est extrêmement violent.

Linkin Park. – Numb (vidéo en ligne). Youtube, 2007. Disponible sur www.youtube.com/watch?time_continue=62&v=kXYiU_JCYtU

Rise Against. – Make it stop (vidéo en ligne). Youtube, 2011. Disponible sur www.youtube.com/watch?time_continue=6&v=XP4clbHc4Xg

Soprano. – Fragile (vidéo en ligne). Youtube, 2019 Disponible sur www.youtube.com/watch?v=zgBEVbDzuu4

Step by step. – On en parle (vidéo en ligne). Youtube, 2019. Disponible sur www.youtube.com/watch?v=y9aJ38kNLjM&feature=youtu.be

Superchick. – Hero (vidéo en ligne). Youtube, 2008. Disponible sur www.youtube.com/watch?v=6zv7xaDZoto

The Readings. – Wanda’s song (vidéo en ligne). Youtube, 2008. Disponible sur www.youtube.com/watch?time_continue=142&v=a5X2FJyjBxE
http://anti-bullying.superforum.fr/t80-les-chansons-et-les-clips-qui-parlent-de-harcelement-scolaire

 

Théâtre

STERNE, Christian. – Harcèlement. Les fous de bassans, 2016. Adaptation de Pierre Garin, d’après le roman de Guy Jimenes.