Deux classes du lycée Washington-Touchard du Mans (3e PrépaPro et 2de Pro) participant au prix BD Une Case en Plus ont travaillé autour du titre Gaston en Normandie et posent leurs questions à l’auteur, Benoit Vidal (cf. annexe 1). Ce titre retenu dans la sélection du prix 2022-2023 présente un réel intérêt pédagogique par son contenu comme par sa forme. En effet, outre qu’il aborde la question de la mémoire de la Seconde Guerre mondiale en croisant des souvenirs de témoins directs, avec des allers-retours passé/présent, il propose une mise en récit originale, alliant roman-photo et bande dessinée.
Un parcours atypique
Pourquoi et comment avez-vous décidé d’être auteur ?
J’ai publié Gaston en Normandie en mai 2022, chez FLBLB. J’avais publié, chez le même éditeur, Pauline à Paris qui est sorti en 2015. Et j’ai aussi coscénarisé une autre bande dessinée, plus traditionnelle, qui est publiée chez Glénat1. Entre mes deux albums, j’ai fait un documentaire en bande dessinée chez un autre éditeur2.
Mais auteur, ce n’est pas mon métier principal. Je suis enseignant-chercheur. J’ai été prof en lycée, j’ai passé une thèse de doctorat et j’ai un poste de maître de conférences à l’université. J’ai donc plusieurs casquettes : enseignant, chercheur et auteur de roman-photo ou de roman graphique. Quand on est enseignant-chercheur, on publie des articles de recherche ou des manuels scolaires. J’ai donc publié beaucoup de choses !
Alors, pourquoi ai-je décidé de devenir auteur, et précisément auteur de roman graphique ? Eh bien, parce que cela me faisait plaisir ! Parce que j’en avais envie, ce n’était pas une contrainte. J’avais déjà un métier et des revenus par ailleurs.
Comment avez-vous eu envie de faire de la bande dessinée ?
Quand j’avais votre âge, je lisais beaucoup de bandes dessinées. Au collège, on faisait des fanzines. À l’origine, ça veut dire magazines de fans. Ce sont de petites revues qu’on réalise soi-même, qui ne sont pas faites de façon professionnelle, qui ne sont pas éditées. Demain, vous prenez une feuille A3, vous la pliez, et vous faites des articles et des dessins que vous réalisez vous-mêmes. Vous en faites cinquante exemplaires que vous distribuez autour de vous ou même que vous vendez. Il y en a plein qui existent ainsi partout, des millions ! Moi, j’ai fait cela avec des copains quand j’étais collégien, puis lycéen et aussi étudiant à la fac. Raconter des histoires, c’est quelque chose qui me tenait vraiment à cœur. Quand j’étais ado, mon rêve, c’était de devenir auteur de bande dessinée.
La découverte du roman-photo
Il y a autre chose d’important dont je voudrais vous parler, c’est de ma relation à ma grand-mère Joséphine. Quand j’ai eu 22/23 ans, j’ai commencé à enregistrer mes grand-mères avec un enregistreur et des cassettes. Je les faisais parler : comment elles avaient vécu leur enfance, leurs parents, leurs grands-parents, des histoires personnelles et familiales. Et puis, un jour, à Angoulême, dans les années 2000, je tombe sur des jeunes qui avaient créé un magazine intitulé FLBLB, un nom imprononçable ! (Ils venaient de l’école des Beaux-Arts de Poitiers et ils créeront ensuite les éditions FLBLB.).
Vous voyez là le numéro 14 qui n’est composé que de romans-photos. Moi, je ne connaissais pas trop le roman-photo. J’en avais lu dans Fluide Glacial, un journal de BD humoristique important à l’époque, qui publiait toujours deux pages de roman-photo dont l’auteur était Léandri. Je savais que le roman-photo existait mais je ne connaissais pas vraiment. Vous voyez cette image ? Deux pigeons qui discutent. C’est simple : on a une photo de pigeons, on met des bulles et on les fait parler. C’est ça, la magie de la bande dessinée ! Vous pouvez faire parler n’importe qui, n’importe quoi, même des objets ! C’est une construction mentale. On dit que la bande dessinée, c’est un art séquentiel. On ne voit pas l’image bouger, les images sont fixes. C’est le cerveau qui reconstruit, et on imagine ce qui s’est passé entre les deux images.
Je découvre dans ce fameux magazine FLBLB n° 14 un récit qui se proclame roman photobiographique (remarquez le jeu de mot), une sorte d’autobiographie réalisée par Grégory Jarry. Je n’avais jamais vu cela, je trouvais ça très étrange. Entre temps, je comprends que FLBLB fait de la bande dessinée et que ce numéro 14 n’était qu’un numéro spécial sur le roman-photo. J’étais déçu ! Mais ensuite, voilà un autre livre de FLBLB qui m’a donné le déclic. Il s’intitule Les Maquisards du Poirier. C’est un livre qui a été réalisé avec les enfants d’une école primaire et des auteurs de FLBLB. Le projet, c’était que les enfants aillent voir les personnes âgées de leur village, les fassent parler de leur vie et de comment elles avaient vécu la Seconde Guerre mondiale. Ils les ont enregistrées et photographiées. Ils ont mis les textes dans les bulles. Ce n’était pas très sophistiqué comme procédé et les photos ne sont pas très jolies ! Je me suis dit alors : « J’aime bien la BD, j’aurais bien aimé en faire, mais bon, je ne suis pas dessinateur et c’est un rêve qui ne s’est pas réalisé. Cette histoire en photos me donne des idées ».
Une démarche personnelle
J’avais les histoires enregistrées de ma grand-mère et je me suis dit : « Je vais faire la même chose. Je vais la prendre en photo et mettre ce qu’elle me raconte dans des bulles. ». C’est comme ça que j’ai commencé à faire mes premières pages ! La première histoire faisait trois pages. Des amis m’ont dit : « Ah ! tu devrais en faire d’autres. ». Je les ai publiées sur un blog3. À la fin, j’ai réalisé quatre-vingts pages. Puis je les ai autoéditées : j’ai imprimé trois cents exemplaires de ce livre (Le débarquement et le platane) que j’ai vendu autour de moi, à ma famille et mes amis. L’année d’après, je retourne à Angoulême et je montre tout ça à FLBLB. Ils ne sont pas intéressés, mais ils m’encouragent à continuer et à revenir les voir ! Progressivement, dans mon travail, je me suis mis à ajouter des images d’archives pour illustrer ce que racontait la personne, procédé que vous avez remarqué dans Gaston en Normandie. Ça, c’est nouveau, je crois que je suis la seule personne au monde à faire ça ! C’est comme un documentaire que vous voyez à la télévision ; vous avez une personne interviewée et vous voyez des images, des extraits de films en rapport avec son propos. C’est la même chose, mais sur papier ! Voilà comment je suis devenu auteur de bande dessinée.
Pourquoi enregistrez-vous votre famille ?
Pour une raison principale qui peut être partagée par tous : connaître un peu mieux sa famille, savoir comment on vivait autrefois. Mais tout le monde ne va pas jusqu’à enregistrer. C’est dommage, car quand les gens partent, disparaissent, on se dit « mince, je ne me rappelle pas très bien ce que telle personne m’avait dit ». J’ai donc voulu garder une trace de la mémoire familiale avec des enregistrements. Et c’est comme ça que j’ai appris à poser des questions. Quand on pose une question, il faut savoir ensuite se taire. Ce n’est pas facile de se taire ! Écouter, laisser des blancs, jusqu’à ce que la personne aille au bout de ce qu’elle veut dire ou reparte sur autre chose. Au début, je posais trop de questions et je coupais la parole !
Roman-photo ou bande dessinée ?
La bande dessinée mêle dessins et textes, alors que vous, à la place des dessins, ce sont des photos. Est-ce que c’est original comme procédé ?
En fait, le roman-photo, ce n’est pas très original ! Voici un exemple de roman-photo qui date de 1896. C’est un reportage photographique : Paul Nadar va interroger Chevreul, un académicien qui avait 100 ans, comme ma grand-mère ! On y voit même Félix Nadar, pris en photo par son propre fils. Vous voyez ce genre existe depuis longtemps mais il ne s’est pas développé !
Dans les années 60-70, il y a eu beaucoup de romans-photos, c’était alors un genre très particulier, publié dans les magazines féminins, souvent des romances à l’eau de rose, cantonné à un style très particulier. C’est passé de mode dans les années 80 bien que le magazine Nous Deux existe toujours. C’est un des plus grands tirages de la presse française. Donc, en fait, ce n’est pas si original comme moyen d’expression !
Mais moi, je raconte une histoire avec une succession d’images de natures différentes. Quelle que soit la nature des images, pour faire un roman graphique, il faut que les images conduisent la narration.
Comment avez-vous procédé pour trouver les photos illustrant Gaston en Normandie ?
J’ai utilisé beaucoup de photos d’archives pour Pauline à Paris. Pour Gaston en Normandie, c’est plus ciblé comme thème. Donc, j’ai surtout utilisé les collections des services des armées américaine et anglaise. Certaines sont libres de droit mais on doit quand même les référencer. J’ai aussi utilisé des photos militaires allemandes. Je cherche sur Internet. Parfois, ce sont des photos d’anciens magazines que je scanne. Sur le site Photosnormandie4, des images ont été mises à disposition pour que les gens identifient éventuellement des personnes ou fassent des commentaires. J’ai découvert comme cela des photos où j’ai retrouvé mon grand-père !
Pour le reste, je prends des photos, j’ai acheté un appareil avec un grand angle. Au départ, je cadrais de trop près ma grand-mère et après, je ne savais pas où mettre ma bulle ! Du coup, j’ai par la suite fait des photos en grand angle, ce qui me permet après de zoomer comme j’en ai envie ! La qualité est suffisamment bonne, car les cases ne sont pas très grandes. Je prends ainsi les parties qui m’intéressent ! Par exemple, quand mon père est en short, je ne trouve pas cela élégant, alors je m’arrange pour le cacher ! Quand je photographie mon père, je ne fais pas de belles photos car ce n’est pas le plus important, c’est le témoignage qui est important. Je ne suis pas photographe ; je collecte la mémoire et je raconte des histoires. En bande dessinée, le beau dessin détourne souvent de l’histoire, il faut que le dessin soit au service de la narration. C’est la même chose ici avec la photo.
Comment procédez-vous après ?
Une fois le texte enregistré, il faut le retranscrire et c’est très long ! Parmi les photos, j’essaie de prendre l’expression qui correspond le mieux à ce que dit mon père. Quand j’ai pris cette photo-là de Gaston, croyez-vous que ce soit le texte qu’il disait ? Pas forcément et même probablement pas ! C’est vrai que c’est une forme de manipulation… Une fois que c’est retranscrit et que j’ai sélectionné les photos, je fais un montage. On peut utiliser un logiciel professionnel comme In design. Moi j’utilise Scribus qui est gratuit et qui me suffit pour organiser mes images et mon texte.
Le rapport à l’intimité familiale
Pourquoi avoir choisi le Débarquement comme thème central ?
Je ne l’ai pas vraiment choisi… Mais un peu quand même ! Parmi les souvenirs de ma grand-mère, le Débarquement était un des moments les plus forts pour elle, mais aussi parce que la petite histoire (l’histoire familiale) croise la grande Histoire (celle qu’on apprend dans les livres d’école). Sur le Débarquement, quand j’étais ado, j’en ai vu des photos, des films et lu des bandes dessinées ! C’était un sujet très souvent traité. Et voilà que ma grand-mère me racontait des choses que j’avais vues au cinéma ! D’ailleurs, au départ, les premières histoires que j’ai faites sur mon blog, c’était autour du Débarquement. Je pensais que ça plairait aux gens parce que c’est un sujet dont ils ont déjà entendu parler et qui pourrait les toucher. Si je n’avais fait que collecter des témoignages du Débarquement, cela aurait pu intéresser les historiens mais qui d’autre ? Je pense qu’il faut ajouter des choses plus personnelles. C’est ce que je fais dans Gaston en Normandie : je veux parler de ma relation avec ma grand-mère et de la façon dont j’interprète ce qu’elle me raconte. Et j’en viens à parler de choses plus personnelles et plus intimes.
Votre père a-t-il été traumatisé par la guerre ?
Quand on l’entend raconter, on n’a pas l’impression qu’il ait été traumatisé. On a l’impression d’un souvenir extraordinaire pour lui. Après, cela ne veut pas dire qu’il n’a pas eu de très grandes peurs ou des angoisses. Dans le livre, vous avez vu que dans ma famille, à Bayeux, personne n’est mort et rien n’a été détruit. À Caen, dans les villes autour, vous avez vu combien les gens ont souffert de la guerre : des morts, des blessés, des maisons détruites. Alors évidemment au moment même, quand on le vit, on ne sait de quoi sera fait demain et si on va s’en sortir. Et effectivement, avant que le front ne se déplace, pendant plusieurs mois, il va y avoir des combats dans la région. Ma grand-mère était très angoissée, elle avait quarante-cinq ans, quatre enfants et elle était enceinte. Tous les jours, avec son mari, ils avaient peur. Mon père raconte tout ça avec un certain recul, comme un enfant qui a vécu un moment extraordinaire. Mais il faut comprendre qu’il est né en 36 et il a trois ou quatre ans quand la guerre débute. Il n’a pas de souvenir d’avant la guerre.
Toute son enfance, entre trois et sept ans, s’est déroulée sous l’occupation militaire allemande. Il n’y avait pas de jouets, pas de cinéma et pas de télévision. Interdiction d’écouter la radio. La nourriture était rationnée, on produisait des biens qui ne servaient alors qu’à l’armée ou à l’économie allemande. Je n’ai aucune photo de mes grands-parents à cette époque car il était quasiment impossible de trouver des pellicules photos dans les magasins. Donc, mon père, enfant, n’a jamais connu le monde sans guerre. Tout d’un coup, du jour au lendemain, le 7 juin au matin, les Anglais rentrent dans Bayeux. Il n’y a pas eu de bataille dans la ville. Les gens sont heureux. Mon père ne voit que cette joie. Même s’il va aussi voir les blessés arriver des villes avoisinantes, il voit surtout de très jeunes soldats – dix-sept ou dix-huit ans – qui arrivent avec des motos, des chewing-gums et du chocolat que mon père n’a jamais mangé ! Il apprend à démonter des mitraillettes… Mais je pense qu’il est partagé entre deux extrêmes car il sait aussi que beaucoup de gens ont souffert.
Du côté de l’édition de bande dessinée
Avez-vous été aidé ou avez-vous fait ce livre tout seul ?
J’ai envie de dire, oui, je l’ai tout fait tout seul… Mais en fait on ne fait pas tout, tout seul ! Je me suis fait relire par des proches, des gens de ma famille et en fonction de ces retours-là, j’ai beaucoup modifié. Une chose que je n’ai pas faite, c’est la couverture ! C’est l’éditeur qui l’a réalisée ainsi que les pages ouvrant les chapitres. FLBLB est une petite entreprise qui publie une dizaine de livres par an, ils sont quatre salariés. Un des salariés est infographiste : il sait faire des couvertures, des photomontages. C’est lui qui a réalisé cette couverture pour Gaston en Normandie. On décide ensemble : je lui propose des choses et lui aussi. On a hésité entre plusieurs couvertures. Sur celle-là, vous avez vu, il reprend une photo de l’album, la colorise tout en la recadrant pour cacher la tête du général de Gaulle, c’est un parti pris original et je la trouve très réussie.
Combien d’exemplaires avez-vous vendu de Gaston en Normandie ?
En tant qu’auteur, je ne suis pas au fait tous les jours des ventes. Je dois demander à mon éditeur et lui aussi, il a toujours une marge d’erreur. Les livres sont chez les libraires mais peuvent être en stock. C’est donc le diffuseur qui donne les chiffres. Tous les ans, je reçois un relevé qui me dit combien j’ai vendu de livres. C’est à partir de cela que sont calculés mes droits d’auteur. L’an dernier, les ventes de Pauline à Paris avaient dépassé les 2000 exemplaires. On doit être autour de 2300 aujourd’hui. Pour Gaston en Normandie, entre 1000 et 2000. Mais il faut savoir que, dans le monde de l’édition, c’est généralement au cours de la première année de publication que les ventes sont élevées. Récemment, j’ai reçu un prix intitulé Cases d’Histoire. Je peux espérer que ça augmentera les ventes !
Combien gagne un auteur pour chaque livre vendu ?
Ce livre-là est vendu 20 euros. Ce n’est pas cher par rapport à une bande dessinée en couleur, de 160 pages, qui va coûter plutôt 25 ou 30 euros. Un manga, de format plus réduit, en noir et blanc, c’est entre 6 et 7 euros. Un album traditionnel cartonné, c’est plutôt 12-13 euros. L’auteur va avoir environ 10 % des 20 euros, c’est-à-dire entre 1 et 2 euros. S’il vend 1000 livres, combien gagne l’auteur ? Entre 1000 et 2000 euros. Si vous y avez travaillé pendant un mois, ça va ! Mais si vous avez travaillé pendant 5 ans… Vous comprenez que pour gagner beaucoup, eh bien, il faut beaucoup vendre ! C’est le cas de quelques titres comme Astérix ou Thorgal qui sont vendus à des dizaines, voire centaines de milliers d’exemplaires. On ne gagne pas d’argent en fonction de son travail, mais en fonction du succès de son livre. Un tout petit nombre d’auteurs gagne beaucoup d’argent et de très nombreux autres ne gagnent pas leur vie comme auteurs et font un autre métier en parallèle. Pour vivre honorablement, il faut pouvoir vendre 20 000 exemplaires par an. Or, vendre 5000 exemplaires, c’est déjà beaucoup. C’est déjà un succès éditorial mais c’est à peine suffisant pour en vivre ! Il n’y a que 200 ou 300 auteurs de bande dessinée en France et en Belgique qui peuvent vivre de ce métier et ils ne représentent que 5% des auteurs de bande dessinée. L’immense majorité n’en vit pas, ils ont donc un métier à côté qui leur permet de vivre et éventuellement de continuer la bande dessinée.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées pour publier cette bande dessinée ?
J’ai rencontré des difficultés de plusieurs ordres. J’ai fait huit versions différentes de cette histoire – dont une fin différente que vous pouvez lire sur mon blog5. J’ai envoyé la quatrième version à FLBLB. Comme Pauline à Paris a bien marché – c’est le roman-photo qui se vend le mieux chez cet éditeur – je savais que j’avais de fortes chances qu’ils acceptent de publier ce livre. C’est déjà bien d’avoir un éditeur ! Il y avait aussi des contraintes techniques. J’ai utilisé de nombreuses images : les miennes mais aussi 500 à 1000 images d’archives que j’ai prises ailleurs. Sont-elles libres de droit ? Ai-je le droit de les utiliser ? Il a fallu que j’effectue les recherches et cela m’a pris plusieurs mois. Une autre contrainte très forte : vais-je oser enregistrer mon père ? Le photographier ? Car je sais qu’il n’aime pas être photographié.
De tous vos livres, quel est votre préféré ?
Je les aime tous ! J’avais de très bons retours sur Pauline à Paris alors j’avais peur de ne pas avoir le même retour positif sur Gaston en Normandie… J’avais peur de lasser, mais les retours sont très bons, en fait !
Avez-vous des projets ?
J’en ai, mais c’est un peu vague. J’y réfléchis ! Je n’ai rien commencé. Je suis dans une phase où je m’interroge…
Annexe 1
Déroulé pédagogique
Gaston en Normandie
L’objectif global de cette étude de Gaston en Normandie s’inscrit dans le dispositif Une Case en Plus dont le but est d’appréhender la richesse de la bande dessinée et ce, sous toutes ses facettes : en tant qu’objet éditorial, objet de savoirs, source de plaisirs de lectures et surtout en tant que langage spécifique. Proposer une étude approfondie d’une bande dessinée en classe, c’est envisager un travail sur la bande dessinée et non pas seulement avec la bande dessinée.
Cette séquence autour de l’album Gaston en Normandie a été conçue et réalisée en co-animation avec une professeure de lettres-histoire du lycée professionnel, pour une classe de 3e PrépaPro, composée de 16 élèves, globalement faibles lecteurs et peu accoutumés à la lecture de bande dessinée, et pour une classe de 2de Pro.
Dans le cadre du projet Une Case en Plus, les élèves ont bénéficié de plusieurs séances autour de la bande dessinée où ils ont manipulé des albums. Ils ont été ainsi amenés à identifier les différents acteurs d’une bande dessinée et à décrypter des images (rallye bd, énigmes/jeux autour des albums de la sélection). Ils n’ont pas lu Gaston en Normandie avant la première séance. Ils rencontrent l’auteur en cours d’année, à l’issue des quatre premières séances.
1. Découverte de l’album Gaston en Normandie
À partir d’un questionnaire proposant une analyse minutieuse de la couverture (image et paratexte) et de la 4e de couverture (photomontage, résumé), complété par une visite sur le site de l’éditeur, les élèves découvrent l’auteur Benoit Vidal et l’éditeur FLBLB puis émettent des hypothèses autour de l’album. La lecture guidée de la page 27 leur permet d’affiner les intentions de l’auteur (croiser les souvenirs de Joséphine et Gaston autour du Débarquement) et de préciser les liens familiaux entre les trois personnes.
Objectif : amener les élèves à réaliser que Gaston en Normandie est une bande dessinée basée sur la collecte de témoignages familiaux et une bande dessinée sur le Débarquement en Normandie.
2. Prendre conscience des spécificités de ce récit : entre bande dessinée et reportage-photo
En analysant les planches 44 et 45, les élèves sont amenés à préciser la nature des images présentes dans ces deux planches : photos venant de sources diverses (photos personnelles, photos de guerre, reproduction de peintures, de tapisseries, d’illustrations populaires ou savantes…). Ayant accès à la liste des sources iconographiques citées par l’auteur, ils prennent conscience de la richesse et de la diversité des photomontages et de la nécessité légale de la citation des sources à laquelle est confronté l’auteur.
Objectif : amener les élèves à comprendre la distinction entre roman-photo et bande dessinée, réaliser que ce titre qui emprunte aux deux genres compose une œuvre hybride et singulière.
3. Le Débarquement à travers Gaston en Normandie
À partir d’un questionnaire autour des pages 14, 18, 31-32, 55 et 85, les élèves confrontent les témoignages de Gaston et Joséphine aux événements historiques (les bombardements et le Débarquement en Normandie).
Objectif : comprendre le contexte historique des témoignages mis en scène par Benoît Vidal.
4. Les civils dans la guerre à travers Gaston en Normandie
À partir d’un questionnaire autour des pages 15-17, 30, 32-33, 38-39, 40-41, 22-23, 46-54 et 77-83, les élèves travaillent sur le thème Les civils dans la guerre, selon trois axes proposés par l’album : Partir ou rester ?, Soigner et accueillir, Les enfants dans la guerre.
Objectif : comprendre l’importance historique des témoignages tout en prenant conscience de leur subjectivité, de la différence entre témoignage et histoire.
5. Rencontre avec l’auteur
Préparation de la rencontre avec l’auteur : mot d’accueil adressé par deux élèves à l’auteur, organisation des questions par thèmes et ordre des questions. Organisation d’un goûter de fin de rencontre. Lors de la rencontre, prise de notes par une des classes.
Objectif : marquer un temps fort avec la rencontre physique de l’auteur, mieux appréhender les enjeux et les choix narratifs et graphiques de l’auteur, valoriser le travail collectif mené en classe.
6. Création graphique
Chaque élève compose une planche à « la manière de Benoit Vidal » à l’aide du logiciel BDnF1.
Thème imposé : raconter un souvenir d’enfance en utilisant des images de natures et d’origines diverses.
Contraintes : sur une planche de 9 cases de taille régulière, l’élève auteur se mettra en scène (trois photos au moins du présent), les autres images peuvent être des photographies personnelles de leur enfance ou, au choix, créées, trouvées, détournées (mais libres de droit). Les élèves devront présenter la liste des références iconographiques de leur planche.
Objectifs : en créant une narration en images basée sur la photographie ou l’illustration, prendre conscience du procédé du roman-photo et du langage spécifique de cette narration. S’initier à un outil numérique spécialisé. Être sensibilisé aux droits à l’image.
Toutes les séances (questionnaire/correction) ci-dessus sont téléchargeables via le site Le Dock (http://ledockbd.blogspot.com) qui mutualise les séances réalisées dans le cadre Une Case en Plus.
1. BDnF : outil de création numérique gratuit mis au point par la BnF permettant de créer des récits mêlant textes et images. https://bdnf.bnf.