Quoi de pire que le silence lorsque nous espérons des mots ? Et quelle signification donner au silence de l’autre ? Réflexion, indifférence, mépris ?
Nous ne manquons pas d’informations, plus ou moins fiables, plus ou moins crédibles, sur de nombreux sujets. Pourtant, force est de constater que certains médias demeurent extraordinairement silencieux ces derniers temps, quand il s’agit d’aborder la question du devenir de l’éducation dite nationale…
Depuis décembre, notamment, les professeurs, de la maternelle à l’université, expriment leur colère, aussi bien dans la rue qu’aux côtés de leurs élèves, parce qu’à la discussion, au dialogue, le gouvernement a opposé une fin de non-recevoir, un silence teinté de mépris devenu intolérable pour les enseignants confrontés aux réalités d’un terrain toujours plus difficiles à gérer.
Ce qui se joue actuellement, au-delà du gel du point d’indice, de la réforme des retraites, du lycée et de l’université ou encore de la remise en question du statut de professeur, c’est le choix d’une société : voulons-nous conserver nos acquis et les renforcer ou basculer dans un monde où d’égalité des chances, égalité déjà bien fragile, il n’y aura plus ? Où de service public, il n’y aura plus ?
Il serait nécessaire, pour préserver la bonne santé de notre démocratie, que nous puissions débattre de ces questions et que les gens exercent librement leur esprit critique : or, cela ne semble plus possible actuellement. Sur la scène médiatique, le feuilleton des élections municipales va bon train, mais qu’en est-il du débat sur l’éducation, alors qu’elle est en pleine crise ? Et que penser du recours à l’article 49.3 de la Constitution française, annoncé par le Premier ministre le 29 février ?
Silence donc sur trois mois de protestation et une grève au sein de l’Éducation nationale inédite ; silence sur les rassemblements contre les épreuves anticipées du baccalauréat -E3C-, alors que l’on ne compte plus les reports d’épreuves et que les sujets proposés circulent sur internet ; silence encore quand un professeur retraité est arrêté parce qu’il refuse d’ôter son autocollant à la sortie d’une manifestation ; silence sur les lycéens mis en garde à vue, silence sur la suppression envisagée des CIO, silence sur le démantèlement du réseau CANOPÉ, silence sur la mise en place du service national universel -SNU-…
Ces silences deviennent assourdissants… Il est urgent que les maux se disent, que les idées circulent et que le savoir se partage.
Droit à la communication, à l’échange, à la transmission et à la formation d’un esprit critique pour nos élèves, c’est ce en quoi je veux croire en tant qu’enseignante.
Rompre le silence… il en va de l’avenir de l’Éducation nationale.
